« Les juges et l’assassin » : un livre avec moins d’informations que d’omissions ? - partie 2
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Suite de la première partie "impréparation et improvisation – des décideurs peu inspirés"
Les impasses majeures du livre - l’enquête sur les choix de soins reste à faire
Quel a été le rôle de Buzyn dans la création présidentielle (non souhaitée par Matignon) d’un Conseil scientifique ad hoc autour de spécialistes du Sida et de l’hépatite C, et non des maladies respiratoires, émanation du consortium parisien Reacting ? Celui-ci a été co-créé en 2013 par son époux Yves Levy (directeur général de l’Inserm, et auteur d’une tentative de mettre les instituts hospitalo-universitaires (IHU) sous sa coupe) et Jean-François Delfraissy, ex-directeur de l'Agence Nationale de Recherche sur le Sida (ANRS), appelé à présider le nouvel organe. Les auteurs ne mentionnent pas la création en parallèle d’un Comité analyse, recherche et expertise (CARE) dédié au Covid 19, présidé par Françoise Barré-Sinoussi, prix Nobel avec le Pr Montagnier pour la découverte du virus du sida, dont 10 membres sur 12 sont parisiens : il est difficile de trouver trace de sa ‘production’.
Les auteurs ne mentionnent pas les relations historiquement mauvaises entre les Marseillais et les Parisiens de Reacting (établissements nationaux type INSERM et ANRS ; hôpitaux tels que Bichat), incapables d’obtenir comme Marseille le statut d’IHU en maladie infectieuses, ni leurs stratégies de recherche opposées (molécules nouvelles via coopération avec Big Pharma pour Paris ; nouveaux usages des molécules anciennes, éprouvées et économiques, pour Marseille) : c’est une fameuse impasse ! L’équipe Reacting avait exclu de sa stratégie le test PCR – qu’elle n’avait pas la capacité de faire en nombre. Celui-ci a été réservé initialement aux seuls arrivants de Wuhan, et du coup non réalisé pour le 1er malade chinois reçu à l’hôpital Bichat renvoyé chez lui et décédé. On ne sait trop si le test a été réalisé en février lors d’un rapatriement de français à la base militaire de Creil, second cluster de malades en France. Reacting a par ailleurs tout misé à l’origine sur un médicament complexe d’emploi, et coûteux, le remdesivir de Gilead, qui s’est avéré, comme lors des épidémies précédentes, à la fois inefficace et dangereux : une autre impasse.
Les grands reporters ne creusent guère la prise en charge de l’épidémie fin février 2020 par le Conseil de défense sanitaire, qui a bloqué l’accès des magistrats aux documents afférents, classés Secret Défense. Ce choix transférait les responsabilités du premier ministre au président ; il a pu s’inscrire dans une coordination occidentale type OTAN dont on sait qu’elle peut se traduire par un alignement européen sur les Etats-Unis. Autre impasse majeure.
Autre sujet clef non traité par la CJR, et impasse des grands reporters, concernant notamment Véran : lors du Covid 19, les autorités ont « réussi » à innover totalement sur l’organisation et la nature des soins : médecins libéraux ‘priés’ de ne pas voir les malades et de ne prescrire qu’un anti-douleur, le paracétamol (ou le Rivotril pour les aînés en EHPAD, forme d’euthanasie) ; malades ‘priés’ d’attendre chez eux que cela aille vraiment mal avant d’aller aux urgences, d’où la fréquence des décès dans les 3 premiers jours d’hospitalisation ; limitation des sites de traitements en urgence Covid 19 à un nombre limité d’hôpitaux, pratiquement tous publics, vite en surchauffe, combinée à la limitation de l’activité de leurs autres services et à l’exclusion des autres hôpitaux du dispositif Covid (d’où des personnels inoccupés et un retard de prise en charge des autres maladies) ; refus systématique des soins par molécules anciennes à la sécurité éprouvée et à l’efficacité parfois déjà démontrée pour le Sars-CoV1 ainsi qu’absence de toute incitation au renforcement préventif de l’immunité naturelle (vitamines C et D, zinc, etc.). Tout ceci, décidé semble-t-il en Conseil de Défense, et largement similaire à ce qui a été décidé dans l’ensemble de l’Occident, ne ressortirait-il pas, et plus nettement qu’un manque de masque et un retard de convocation d’une instance, du délit d’abstention volontaire de combattre un sinistre ?
C’est en quelque sorte la thèse du Professeur Raoult, responsable du seul IHU spécialisé en maladie infectieuses, et microbiologiste le plus cité au monde. La rancœur des ‘Parisiens’ - envers celui qui à leur différence a pu convaincre le jury international IHU des mérites de son projet scientifique et médical - a pu coûter cher aux français. Les grands reporters, avec leur traitement caricatural du rôle de Raoult pour le Covid 19 qui tient de l’attaque personnelle et relève de la désinformation, et l’omission de la validation de l’hydroxychloroquine par des centaines d’études scientifiques depuis 2020 (prescrite semble-t-il par Buzyn en avril 2020 à tel ou tel patient de l’hôpital militaire Percy), démontrent leur appartenance à l’écosystème parisien et leur incapacité de prise de recul. Que les auteurs ne mentionnent pas que Delfraissy a de facto reconnu, à l’issue de son mandat de président du Conseil scientifique Covid, s’être trompé sur à peu près tous les sujets, donnant ainsi raison à Raoult, pourrait être leur pire impasse !
En définitive, l’instruction de la CJR a été circonscrite à quelques sujets sous les feux de la rampe à l’origine, et les grands reporters s’y sont cantonnés. Or avec le recul, ces sujets n’ont-ils pas eu qu’un effet modeste sur l’impact global de l’épidémie ? Outre l’exemple suédois, la littérature médicale conclut maintenant à l’absence d’effet positif du port du masque et du confinement en population générale. Dans ce cadre limité, les magistrats d’instruction ont commis une erreur de droit assez élémentaire avec l’inculpation mal fondée de Buzyn pour mise en danger d’autrui, cassée en appel, et se sont avérés incapables de documenter, au milieu des multiples signes d’incurie politique et administrative, des faits constitutifs du délit pénal d’abstention de combattre. D’où l’absence finale de mise en examen de tel ou tel des 3 ministres à la clôture de l’enquête CJR fin novembre 2024, et un probable non-lieu général en 2025.
De leur côté, les auteurs ont effectué, comme annoncé, de nombreuses impasses, mais furent-elles les bonnes ? En tout cas, leur long texte dont l’écriture est du type « sensationnel – Voici » conviendra plus à l’amateur d’anecdotes et de citations à l’emporte-pièce qu’à celui qui souhaite vraiment comprendre ce qui s’est passé, et ce qui a péché avec impact fort.
Les hauts fonctionnaires vont maintenant répondre de leurs incuries devant les juridictions de droit commun. Il n’est pas dit que des responsabilités ministérielles ne seront pas recherchées dans le futur lorsque les choses en matière de soin et de vaccination pourront enfin être investiguées en France. Les Etats-Unis, sous l’impulsion du nouveau responsable du département de la Santé, Robert Kennedy Jr, vont-ils ouvrir la voie ?
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