Origine de l’épidémie Covid  : le congrès des Etats-Unis va-t-il vraiment ouvrir le couvercle de la marmite  ?

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Daniel Godet pour France-Soir
Publié le 05 février 2025 - 16:45
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Revue du livre « Covid 19 : Mystery Solved » de Jim Haslam paru fin 2024. 

La Chambre de représentants a publié le 2 décembre dernier son rapport sur l’origine et le management aux USA de la pandémie. Ce rapport donne un certain nombre d’indications sur les subventions accordées par l’agence américaine NIAID (National Institute of Allergies and Infectious Diseases), dirigée par Tony Fauci, à l’organisme EcoHealth Alliance pour des recherches de microbiologie, et notamment les coronavirus à l’origine de l’épidémie SARS1 en 2003. Un point central en est qu’une sous-traitance partielle a été assumée par l’institut de virologie de Wuhan (WIV) en Chine ; le financement de travaux en Chine et le partage de technologies américaines sont déplorés. Le rapport évoque aussi une proposition de recherche ‘DEFUSE’ présentée en mars 2018 par EcoHealth Alliance au titre du programme PREEMPT de la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency), l’agence militaire américaine de recherche et développement. Cette proposition – qui a fuité en 2021 via un lanceur d’alerte américain, officier des marines, alors en fonction au sein de DARPA1 - montre le type de recherche de ‘gain de fonction’ proposée par le monde de la recherche américaine, et notamment les universités, aux autorités américaines : ce type de recherche pourrait être à l’origine d’une épidémie telle que le Covid19. 

Mais cette proposition n’a pas été acceptée ; DARPA a en définitive retenu d’autres propositions que celle d’EcoHealth Alliance, globalement moins coûteuses ($ 10 millions vs $ 14 millions). 

L’histoire ne s’arrête pas là : le livre « Covid 19 : Mystery Solved » de Jim Haslam, récemment paru aux USA, à compte d’auteur, présente la suite.  

Il y apparait que l’institut NIAID, dirigé par Tony Fauci, qui œuvre tant en recherche biomédicale civile que militaire, a en définitive financé la recherche DEFUSE dans le cadre de son programme CREID, avec cependant une modification majeure. Au bout du compte, le livrable de cette recherche payée par le contribuable américain serait tout simplement le virus SARS-Cov2 à l’origine de l’épidémie Covid19. 

Que visait DEFUSE à l’origine : selon l’auteur, l’objectif était de contribuer à la protection des troupes américaines en Asie (150 000 environ) en anticipant l’émergence parmi les chauves-souris d’Asie d’un nouveau coronavirus de type SARS-COV1 (2003), mais en plus contagieux, voire plus létal. Pour protéger les troupes US, l’approche retenue (associant, outre EcoHealth Alliance, l’université de Caroline du Nord-Chapel Hill et celle de Duke, via son établissement de Singapour) était de vacciner de façon préventive les chauves-souris, probables vecteurs de ce coronavirus, plutôt que d’attendre l’épidémie parmi ces animaux et de constater son risque de transmission à l’homme. En pratique, il s’agissait de produire un virus chimérique vivant atténué proche du SARS-CoV1, se diffusant bien parmi les chauves-souris, et peu - voire pas -  symptomatique : un vaccin. Le mode d’administration proposé dans DEFUSE était la mise en place de ‘sprays’ à l’entrée des grottes où les chauves-souris habitent, visant à toucher systématiquement chaque individu parmi les populations de chauves-souris.  

Il a été mis en avant que DARPA a refusé la proposition DEFUSE en raison de son coût et de ses risques. Il est exact que DARPA n’a alloué que $10 millions au titre de son programme, nettement moins que les $14 millions demandés pour DEFUSE ; cependant une des recherches retenues par DARPA apparait plus dangereuse que celle proposée par EcoHealth Alliance : la mise au point d’un virus autotransmissible par aérosol parmi la population animale. Cette fonctionnalité a été proposée par le laboratoire Rocky Mountains Lab (RML) dans le Montana ; particularité importante : le RML fait partie de l’agence NIAID que dirige Tony Fauci.  

A l’issue de l’échec avec DARPA sur son projet DEFUSE, l’équipe EcoHealth Alliance – UNC/Chapel Hill -Duke a présenté début 2019 au NIAID une nouvelle version de la proposition DEFUSE, modifiée sur le seul mode de diffusion : celui du RML, le virus autotransmissible par aerosol, a pris la place du ‘spray’. 

Le programme CREID du NIAID a ainsi pris en charge, en trois modules distincts décidés successivement, le projet DEFUSE modifié. D’où la possibilité pour Fauci de jouer avec les mots et d’affirmer sous serment qu’il n’avait pas approuvé, ni financé, la proposition (initiale) DEFUSE. 

Qui a réalisé les travaux, sous la coordination d’EcoHealth Alliance (dirigé par le britannique Peter Daszac) ? 

  • L’université (américaine) de Caroline du Nord-Chapel Hill (Ralph Baric) a créé le virus chimérique ‘atténué’ visant à vacciner les chauves-souris contre un nouveau virus SARS qui menacerait de passer à l’homme et donc d’obérer la défense nationale américaine en Asie. Ralph Baric et son équipe seraient l’équipe de pointe mondiale en matière de construction de chimères supposées indétectables (technologie dénommée ‘No-see’m’, brevetée en 2002), et de recréation de virus à partir de leur seul génome. Sa technologie relève du secret d’Etat militaire américain. 
  • Le laboratoire RML du NIAID (Vincent Munster, hollandais, ancien de l’équipe de Marion Koopmans et Ron Fouchier au sein de l’université Erasmus, célèbre pour ses travaux controversés de gains de fonction sur le virus de grippe aviaire) a assuré le peaufinage de la chimère produite par Ralph Baric pour en optimiser la capacité de transmission par aérosols jusqu’à une distance de 60 pieds. Il serait le spécialiste mondial de la transmission aérosol et de son optimisation. Secret militaire US également. A noter que le virus SARS-CoV2 se diffuse au sein de cinq espèces animales seulement, toutes présentes dans le laboratoire RML (souris locale, vison d’Amérique, hamster de Syrie, chauve-souris d’Egypte) ou dans son environnement immédiat (cerf local) 
  • L’université (américaine) de Duke (Wang Linfa, de nationalité chinoise et d’éducation américaine, surnommé ‘the Batman’), via son établissement de Singapour en coentreprise avec l’université national locale (NUS), a pris en charge - outre la coordination scientifique d’ensemble, le test du produit de Baric et Munster sur les chauves-souris ‘fer à cheval’ d’Asie. Ce test était explicitement prévu au labo BSL4 (le meilleur niveau de sécurité) du WIV à Wuhan, seul endroit au monde où un laboratoire de recherche biologique disposait alors des chauves-souris nécessaires, dont l’élevage et le nourrissage sont complexes (La construction d’une telle installation a été lancée depuis aux USA, pour $120 millions). Wang Linfa, en tant que responsable du comité consultatif scientifique pour les maladies infectieuses émergentes du WIV, avait pu obtenir que sa collaboratrice Danielle Anderson, australienne, soit seule en charge du test au sein de labo BSL4 de Wuhan, sans intervention du personnel du WIV : un élément clef du dossier de subvention CREID. 
  • Le WIV de Wuhan, outre la mise à disposition de son labo BSL4, a assuré via Shi Zengli (surnommée ‘Batwoman’) la fourniture de chauves-souris asiatiques et divers travaux sur des virus sauvages collectés en Chine ; elle n’aurait eu ainsi aucun rôle opérationnel dans la création de la chimère SARS-CoV2. Ralph Baric a insisté durant son audition au Congrès américain sur l’absence totale de partage de ses technologies avec les équipes chinoises de Wuhan, et le retard des équipes chinoises en la matière. 

La création du SARS-COV2, selon l’auteur Jim Haslam, est donc ainsi une affaire particulièrement américaine, même si les personnes contributrices constituent une équipe internationale. Les travaux réalisés à Wuhan seraient restés très limités. 

Il révèle que ce virus chimérique a été construit par Ralph Baric comme une plate-forme virale ‘de consensus’, à partir de plusieurs virus extrêmement proches du SARS-CoV2 : 

  • deux virus sauvages, l’un souvent évoqué, le RaTG13 (similarité de 96%), identifié par le WIV de Wuhan en 2013 sous financement NIAID, et le virus identifié au Laos Banal-52 (similarité de 97%), issu d’une équipe de recherche sur le terrain de l’US Navy en 2017,  
  • avec apports provenant d’autres virus sauvages, notamment le RShSTT182 (similarité de 93%), collecté au Cambodge via des financements USAID (faux nez fréquent de la CIA), et le RacCS203 (similarité de 94%), collecté en Thaïlande par Duke-NUS.  

Le travail de Jim Haslam est très étayé et convaincant sur la mécanique DEFUSE – CREID, et la répartition du travail entre les intervenants ; il comporte à mon sens deux limites : 

  • Selon lui, l’épidémie serait née d’un accident de laboratoire à Wuhan, dont le scénario serait que Danielle Anderson se serait ‘piquée’ accidentellement mi-octobre 2019 à Wuhan avec une seringue destinée à une chauve-souris ; elle serait ainsi le ‘Patient 0’. Elle se serait mise en ‘auto-quarantaine dans son ‘dortoir’ de Wuhan, mais aurait diffusé le virus auprès de ses collègues, et lors de ses déplacements à Wuhan, etc. Ce scénario manque de preuve finale, même s’il apparait établi (données de téléphone portable) que l’intéressée a subitement quitté le labo BSL4 puis la ville de Wuhan pour quelques semaines ; il manque de mise en cohérence avec la dynamique de l’épidémie (traces de Covid19 dans plusieurs pays – notamment en Europe - durant l’automne, rôle des jeux militaires à Wuhan de fin octobre, virulence différentiée suivant les pays…) 
  • Il ne tire pas toutes les conséquences du contenu de la proposition DEFUSE ; en effet, celle-ci ne décrit pas seulement la conception d’un virus atténué ‘vaccinal’ chimérique (dont le concept a été déposé par Ralph Baric en 2015, avec brevet délivré en 2018). Elle contient en premier lieu la conception d’un nouveau virus chimérique type SARS, bien plus virulent que le SARS-CoV1, via notamment un site furine jamais rencontré dans la nature pour ce type de virus : c’est ce virus virulent que le virus atténué vaccinal devait permettre de contrôler. L’existence de ce virus chimérique virulent serait susceptible d’expliquer pourquoi en Chine, en Iran, voire en Italie, l’épidémie initiale a été bien plus dure que dans la plupart des pays. La dualité de virus SARS-CoV2 (virus S/virus L) avait été mentionnée sur France Soir dès le 23 février 2023 lors de l’interview du Pr Tritto. 

La différence entre le scénario de fuite fortuite et une fuite non accidentelle est bien sûr essentielle, notamment pour les ‘services’ qui seraient à l’origine d’un scénario non accidentel. 

Pour autant, la responsabilité des Etats-Unis semble établie ; comme l’a écrit le 16 mars 2024 Jeffrey Sachs, qui a présidé la Commission Covid19 établie par le journal scientifique The Lancet, « les Etats-Unis doivent au reste du monde la vérité, et peut-être d’importantes compensations financières, selon ce que les faits révèleront en définitive »  – une responsabilité impossible à assumer par quelque gouvernement américain que ce soit. 

Pas sûr donc que l’Administration Trump, ou le Congrès US, mène des investigations sur le déroulement détaillé des évènements de 2019-2020 ou la définition précise des responsabilités. En tout cas, le rôle du RFL, de même que le relais financier du NIAID via les subventions CREID, n’ont pas encore été abordés au Congrès. 

Documentation : 

Substack de l’auteur : (13) Jim Haslam | Substack 

Interview par James McCullough : (13) Was SARS-CoV-2 Designed as a Spreadable Vaccine for Bat Colonies? 

Forum de discussion sur le site Unz Review : Five Years and Thirty Million Deaths, by Ron Unz - The Unz Review 

Interview sur FS de Charles Rixey, notamment sur la fuite de la proposition DEFUSE 

J. Sachs : What Might the US Owe the World for Covid-19? — Jeffrey D. Sachs

 

Daniel Godet est ancien administrateur civil, cadre de grande entreprise en retraite, et esprit curieux. 

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