La Hongrie perd un peu plus d’un milliard d’euros de fonds européens, la CE maintient le gel de plus de 20 milliards
La Commission européenne (CE) ne lâche pas la Hongrie, dont la présidence de l’UE vient de s’achever. Privée de son aide de plus de 20 milliards d’euros, suspendue par les institutions européennes en raison du “non-respect” de l’État de droit, Budapest perd définitivement une tranche d’un peu plus d’un milliard d’euros à compter du 1er janvier. Le 16 décembre dernier, la CE a estimé dans un communiqué que “la Hongrie n'a pas suffisamment remédié aux violations des principes de l'État de droit et maintient donc les mesures visant à protéger le budget de l'Union”.
Le bras de fer se poursuit. Depuis décembre 2022, l’UE a gelé le transfert d’une trentaine de milliards d’euros destinés à la relance de la Hongrie. 21,7 milliards d'euros sont issus du fonds de cohésion tandis que 10,4 milliards sont liés au plan de relance et de résilience. Bruxelles justifie cette mesure par les “violations de l’État de droit” dans le pays, provoquant une hausse sensible des tensions avec Budapest. Une année plus tard, le Premier ministre Viktor Orban parvenait à débloquer un tiers de ce montant, soit un peu plus de 10 milliards d’euros du fonds de cohésion, en contrepartie de la levée de son véto à un financement de l’UE pour l’Ukraine.
Des réformes “pas suffisantes”, perte d’un milliard d’euros
La décision des 27 de libérer ce montant avait d’ailleurs provoqué la réaction du Parlement européen, qui a reproché à la CE d’avoir cédé au “chantage” du PM et qui a saisi la justice européenne pour faire annuler le déblocage de ces fonds, qui seront transférés progressivement. Mais l’UE maintient la pression sur la Hongrie avec les 21 milliards restants, dont 11,7 milliards de fonds de cohésion et 10,4 milliards pour la relance et la résilience suite à la pandémie de COVID.
Le 16 décembre dernier, la CE diffusait un communiqué pour évoquer les efforts de Budapest en matière de réformes. Cette institution européenne “estime que la Hongrie n'a pas suffisamment remédié aux violations des principes de l'État de droit et maintient donc les mesures visant à protéger le budget de l'Union”. La Commission a rappelé que les violations “concernaient les domaines des marchés publics, des poursuites judiciaires, des conflits d'intérêts, de la lutte contre la corruption et des fiducies d'intérêt public”.
Les modifications apportées par Budapest aux lois concernant les fiducies d’intérêt public, et notifiées le 2 décembre à la CE, “ne répondaient pas de manière adéquate aux préoccupations en suspens concernant les conflits d'intérêts au sein des conseils d'administration des fiducies d'intérêt public”. C’est sur cette base que la Commission a conclu que la suspension des fonds hongrois restait en vigueur.
Certes,” la Hongrie peut à tout moment adopter et notifier de nouvelles mesures pour démontrer à la Commission que les mesures adoptées par le Conseil devraient être adaptées ou levées”, conclut le communiqué. Mais chaque année passée sans satisfaire l’UE et ses ingérences pourrait coûter très cher à Budapest.
A compter du 1er janvier, une tranche de 1,04 milliard d’euros sera définitivement ponctionnée, comme le permet le mécanisme de conditionnalité, dispositif qui autorise la CE à suspendre, réduire ou restreindre l’accès aux financements européens par un État membre concerné. Le Financial Times explique qu’il s’agit des 6,3 milliards d’euros de fonds gelés fin 2022, qui représentent environ 55% des 11 milliards restants du fonds de cohésion et dont cette tranche devait être allouée avant la fin de 2024.
Une “situation discriminatoire"
Le ministre hongrois des Affaires européennes, János Bóka, a déclaré mi-décembre qu'il était “très difficile” de ne pas interpréter le retrait des fonds comme une “pression politique”. Budapest prendrait des mesures pour “remédier à cette situation discriminatoire”, a-t-il promis.
La situation dépeint surtout les relations tendues entre la Hongrie et les institutions européennes, que la présidence hongroise de l’UE n’a pas sensiblement apaisée. Le mandat de Budapest, qui a débuté par les rencontres de Viktor Orban avec Vladimir Poutine, Donald Trump ou encore Xi Jinping en vue de discuter de la paix en Ukraine, s’achève en cette fin de décembre pour céder le siège à la Pologne, fervent défenseur de l’Ukraine et de son soutien.
Le bilan est qualifié par la presse de “mitigé” mais les partenaires européens de la Hongrie lui reconnaissent des avancées, comme l’intégration de la Roumanie et la Bulgarie dans l’espace Schengen le 1ᵉʳ janvier, la Déclaration de Budapest, un 15e paquet de sanction contre la Russie ou encore un accord dans le cadre du G7 sur un nouveau prêt en faveur de l'Ukraine, gagé sur les revenus futurs des avoirs russes immobilisés.
La Pologne, qui fait de plus en plus entendre sa voix sur la scène européenne, prendra dès mercredi le relais à la présidence tournante du Conseil de l'Union européenne. Ceci pourrait modifier, pas de manière positive pour la Hongrie, la dynamique des négociations, aussi bien sur les fonds gelés que sur les autres questions sensibles comme la migration ou la guerre en Ukraine.
En plus du gel de 21 milliards d’euros de subventions, Budapest doit en plus céder au moins 200 millions d’euros afin de régler une amende pour non-respect des traités en matière de droit d’asile. Cette amende est liée à une condamnation par la cour de justice de l’Union européenne le 13 juin dernier, qui exige également de la Hongrie de s’acquitter d’une astreinte d’un million d’euros par jour tant que ce pays ne se met pas en conformité avec les tests européens.
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.