G20 : l'Occident perd de son influence

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Trina Banderas, France-Soir
Publié le 15 septembre 2023 - 15:30
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Money SHARMA / AFP
Le Premier ministre indien Narendra Modi salue les représentants des médias, sur le site du sommet du G20, à New Delhi, le 10 septembre 2023.
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GÉOPOLITIQUE - L'Inde a mené un véritable festival diplomatique toute l'année : plus de 200 réunions de délégations internationales ont été organisées dans 60 villes du pays, avec en point d'orgue le 18e sommet du G20. Pendant trois jours, les chefs d'États de plus de 40 pays se sont retrouvés à New Delhi, mais sans décisions majeures à la clé. Du côté des dirigeants occidentaux, c'est la grise mine.

Le G20 s'est conclu dimanche 10 septembre à New Delhi. Si ce sommet a tenté d'afficher une image d'unité entre ses pays participants, celle-ci ne correspond pas à la réalité d'un monde de plus en plus fragmenté. Lors de sa création, en 1999, avec une première réunion à Berlin, l'objectif du G20 était pourtant d'améliorer la coordination des politiques économiques et financières. Au sortir d'une importante crise financière asiatique, il s'agissait de stabiliser les échanges internationaux et faire se rencontrer à la fois les grandes puissances et les pays dits émergents.

Mais, aujourd'hui, ce vœu de coopération est menacé par une nouvelle "guerre froide" entre les deux superpuissances étasunienne et russe. D'autres pays comme la Chine ou l'Inde veulent imposer par ailleurs leur leadership et sont prêts pour cela à remodeler l'ordre mondial. Par exemple avec une participation au bloc des BRICS, une entente géopolitique alternative qui est en plein élargissement.

L'essor de Pékin et l'émergence des nations du Sud

De leur côté, les principales démocraties d'Europe perdent de l'influence en Afrique, au Moyen-Orient et en Amérique latine, au profit de régimes tels que Pékin. Dans le même temps, le Sud (nommé parfois "Sud global"), qui comprend des pays en voie de développement ou dont le PIB a déjà nettement augmenté ces dernières années, est de plus en plus actif sur plusieurs fronts : il réclame plus d'attention au sein de la communauté internationale et veut prendre toute sa place dans les accords de gouvernance mondiale.

Pour faire face à cette nouvelle concurrence, l'Occident fait avec les moyens du bord et réagit à pas feutrés. Le président américain Joe Biden a profité de l'absence de son homologue chinois Xi Jinping à Delhi pour essayer de partager la vedette avec l'hôte Narendra Modi, le Premier ministre indien.

Le président des États-Unis a saisi cette opportunité pour dévoiler un programme ambitieux. Celui-ci comprend de nouveaux accords de financement destinés aux pays à faibles revenus, ainsi qu'un méga projet d'infrastructure, à savoir un corridor maritime et ferroviaire visant à relier l'Inde au Moyen-Orient.

Cette initiative est conçue pour contrer la nouvelle route de la soie promue par Pékin ("One Belt, One Road"). Et de donner du répondant aux partenaires arabes des USA qui, désormais, renforcent leurs liens avec la Chine.

La guerre en Ukraine en sourdine ?

Malgré ces efforts, le sommet des dirigeants laisse un goût amer côté occidentaux. Si une défense du multilatéralisme a été louée de façon unanime, aucun engagement d'ampleur pour développer une coopération internationale plus équilibrée et diverse n'a été proposé.

Seul le président indien a triomphé du moment, profitant de cette rencontre internationale pour soigner son aura nationale, grâce à l'obtention d'un consensus lors de la signature de la déclaration finale du sommet.

La partie sur la guerre en Ukraine, l'un des points attendus de la discussion, n'a eu finalement aucun écho. Si le sujet relatif à l'invasion de l'Ukraine par la Russie a pu faire du bruit lors du G20 en Indonésie, avec la déclaration de Bali (2022), l'évocation du conflit au moment de l'accord final a été cette fois quasi absente.

Le questionnement de l'impact politique et économique de la guerre russo-ukrainienne à l'échelle mondiale a été sans relief. Un bref rappel à charte de l'ONU a été fait : "Tous les États doivent s'abstenir de recourir à la menace ou à l'emploi de la force pour chercher à obtenir des gains territoriaux à l'encontre de l'intégrité territoriale et de la souveraineté politique de tout État."

Aucune condamnation de pays présents au G20 n'a été entendue. Sans doute vis-à-vis de la position de la Chine, qui refuse de pointer du doigt la Russie. Les délégations se sont ainsi satisfaites de l'accord final du sommet, même s'il révèle une plus grande défiance à l'idée d'un soutien inconditionnel à Kiev : cet accord porte un coup à l'influence des pays occidentaux qui ont tenté, en vain, d'amener les autres États à se joindre à une condamnation plus ferme de la Russie.

Le ministre russe des affaires étrangères, Sergei Lavrov, a qualifié le sommet de l'Inde de succès. Il a déclaré qu'en raison de la position consolidée des pays du Sud, la Russie a réussi à faire en sorte que l'agenda du G20 ne soit pas éclipsé par le conflit en Ukraine.

"Nous avons contré les tentatives de l'Occident de faire de l'Ukraine l'élément central de l'agenda du sommet", a-t-il déclaré. En revanche, à Kiev, le gouvernement de Volodymir Zelensky a exprimé son mécontentement en déclarant que le "G20 n'a pas de quoi être fier".

La clôture du sommet a été marquée par le transfert de responsabilités entre Modi et le Brésilien Lula da Silva, qui sera l'hôte du prochain sommet du G20 à Rio de Janeiro l'année prochaine. Lula a fait un clin d'œil inattendu à Poutine, absent à Delhi, en lui assurant qu'il ne serait pas arrêté s'il décidait de se rendre au Brésil.

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