Dans un village autrichien, l'utopie zéro chômeur à l'essai

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France-Soir, avec AFP
Publié le 05 juillet 2023 - 12:30
Cet article provient directement de l'AFP (Agence France Presse)
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F. Froger / Z9, pour FranceSoir
F. Froger / Z9, pour FranceSoir

DÉPÊCHE — Éradiquer le chômage de longue durée : un village autrichien a lancé un projet pilote inédit ciblant l'ensemble des personnes exclues du marché du travail, avec de premiers résultats prometteurs.

Après cinq ans à la maison à s'occuper de ses deux enfants, Sarah Sklenicka désespérait de décrocher un poste. "C'était un vrai défi", dit-elle à l'AFP, malgré une formation d'électrotechnicienne.

Devant ses échecs répétés, elle a sauté sur l'occasion quand elle a eu vent de ce programme baptisé Magma, qui s'adresse aux habitants en recherche d'emploi depuis plus d'un an.

Désormais, cette femme de 37 ans officie comme menuisière : vingt heures par semaine, elle fabrique et restaure des meubles pour les entreprises et la communauté de Gramatneusiedl, bourg de 4 000 habitants situé dans les environs de Vienne.

Au contact de ce nouveau métier, elle "a repris confiance" et se sent "prête à se lancer de nouveau dans la prospection". "Il s'agit d'une période de transition, pour me remettre dans le bain" et "j'ai le sentiment que cette fois, je peux vraiment y arriver", sourit-elle.

Surmonter les obstacles

Yasemin Yaman, vendeuse de 38 ans, livre la même expérience. Une fois ses enfants grands, elle se sentait "tellement seule", oscillant entre dépression et attaques de panique. Elle assure avoir maintenant retrouvé "la force de repartir de l'avant".

Depuis 2020, près de 130 chômeurs ont bénéficié d'un emploi garanti et sur mesure, payé au salaire minimum, comme pour réparer le passé dans ce village meurtri dans les années 1930 par la fermeture d'une usine de textile.

La cheminée désaffectée domine encore le quartier de Marienthal, douloureux rappel des conséquences dévastatrices scrutées dans une étude de 1933 devenue une référence en sociologie.

Parmi le public visé par l'initiative, quasiment tous ont accepté de participer, à l'exception de ceux souffrant de problèmes de santé. Environ un tiers ont ensuite trouvé un poste permanent par leurs propres moyens.

Le projet accompagne "ceux qui n'ont aucune chance" d'être embauchés du fait de "divers obstacles", explique Sandra Kern, Sandra Kern, directrice adjointe de l'Agence publique d'emploi (AMS) de la région de Basse-Autriche.

Longue période d'inactivité — surtout dans un pays alpin où la mère de famille reste plusieurs années à la maison, phénomènes d'addiction... les facteurs sont multiples.

Si l'Autriche est en situation de plein emploi avec un taux de chômage de 4,6 % (selon Eurostat) et déplore des pénuries de main d'œuvre dans de nombreux secteurs, une catégorie de la population reste marginalisée.

"Effets positifs sur le bien-être"

Des chercheurs de l'université britannique d'Oxford se sont penchés sur ce programme, présenté comme une première au monde par son ampleur et son ambition.

"Il se distingue des politiques classiques du marché de l'emploi visant principalement à la réinsertion", ont-ils souligné dans un rapport d'étape. "Là, c'est une intervention à grande échelle, avec un impact durable (...) et dont l'objectif affiché est d'éradiquer directement le chômage de longue durée dans la municipalité".

Les experts notent "d'importants effets positifs sur le bien-être des candidats", à la fois du fait des revenus perçus, du statut social ou des interactions avec les collègues.

"Sans débourser une somme folle", le projet Magma montre qu'il est possible de parvenir à une société avec zéro chômeur, analyse Oliver Picek, économiste de l'Institut Momentum de Vienne. "C'est la preuve qu'on peut donner à chacun un métier".

L'initiative coûte annuellement à l'État 30 000 euros par participant, un montant similaire aux allocations chômage selon l'AMS, qui n'a pas encore décidé si elle serait prolongée au-delà de 2024 ou transposée dans une autre communauté.

Ancien employé de Magma, Robert Leisser vole aujourd'hui de ses propres ailes. Il travaille dans le secteur du bois après deux ans à jardiner et rénover des appartements.

Sans cette bouée de secours, "sans les contacts noués par ce biais, je n'aurais jamais trouvé d'emploi", raconte cet homme de 37 ans au "passé entaché" par des problèmes de drogue.

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