Affaire judiciaire Antoine Daoust. La justice à Castres encourage-t-elle les violences faites aux femmes et aux enfants ?
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Les violences faites aux femmes en France : une justice à deux vitesses ?
Les violences faites aux femmes restent un fléau majeur en France, malgré les discours des politiques qui en ont fait une « Grande Cause Nationale ». Les chiffres officiels, bien que sous-estimés en raison du faible taux de plaintes, sont alarmants. Selon le ministère de l’Intérieur, « en 2023, les services de sécurité ont enregistré 271 000 victimes de violences commises par leur partenaire ou ex-partenaire, soit une augmentation de 10 % par rapport à 2022 ».
Ces données traduisent une réalité dramatique : « 85 % des victimes enregistrées par les services de sécurité sont des femmes » et « 64 % des violences conjugales enregistrées par les services de sécurité sont des violences physiques ». Pourtant, derrière ces chiffres se cachent des histoires individuelles, des combats pour la justice et, trop souvent, des défaillances du système judiciaire, comme en témoigne l’affaire de Malika Daoust.
Une affaire emblématique : le cas de Malika Daoust
L’histoire de Malika Daoust illustre de manière poignante les défis auxquels sont confrontés les victimes de violences conjugales en France. Mariée à Antoine Daoust, un ancien militaire reconverti en « fact-checker » autoproclamé, Malika a subi des violences physiques graves en présence de leur fille mineure. Comme elle le raconte dans un communiqué poignant :
« J’ai interrogé mon mari sur sa sincérité dans ses articles et j’ai reçu des coups en réponse. »
Cette dispute violente, déclenchée par des questionnements légitimes sur les activités professionnelles de son époux, a conduit à une intervention des services de police et des pompiers. Malika explique : « En voyant mon état, la police et les pompiers m’ont conseillé de déposer plainte. Je suis restée 6 jours en incapacité de travail. »
Ce certificat d’incapacité temporaire de travail (ITT) de 6 jours, délivré par une unité médico-judiciaire, aurait dû constituer une preuve solide pour une condamnation. Pourtant, l’issue judiciaire de cette affaire soulève de graves interrogations. Trois ans après les faits, le procureur de Castres, considérant Daoust coupable des faits reprochés a requis une simple mesure de « stage de prévention des violences conjugales » à son encontre, une sanction jugée dérisoire par la victime et son avocate. Plus choquant encore, le tribunal n’a même pas suivi cette demande, prononçant une relaxe. Malika Daoust exprime son désarroi :
« Cette décision de relaxe banalise les violences faites aux femmes et je vis aujourd’hui dans la peur que cette impunité judiciaire le pousse à recommencer. Ma fille aussi. »
Antoine Daoust qui se voyait en redresseur de tort serait-il un « frappe-checker » en employant son média pour frapper au sens figuré sur ses cibles comme les Professeurs Perronne et Raoult, l'essayiste Idriss Aberkane ou le journaliste Xavier Azalbert et au sens propre sur son épouse qui lui demandait s’il respectait réellement la charte de Munich du journalisme en confondant journalisme et propagande et se servant de son site pour blanchir des fausses informations.
Une justice à deux vitesses ?
L’affaire Daoust met en lumière une problématique plus large : existe-t-il une justice à deux vitesses en France, où certains profils, notamment ceux ayant des connexions avec le pouvoir ou des institutions, bénéficient d’une clémence injustifiée ? Malika Daoust dénonce cette situation avec force :
« Cette décision rompt l’État de Droit et crée une Justice à deux vitesses : sévère pour les délinquants ordinaires, clémente pour les ‘fact-checkers’ qui ont servi le pouvoir politique. »
À titre de comparaison, dans un autre cas jugé au tribunal de Créteil, où un homme reconnu coupable de violences conjugales ayant entraîné 4 jours d’ITT a été condamné à 6 mois de prison avec sursis, une sanction bien plus lourde et prononcée en quelques mois seulement. Deux poids deux mesures.
L’avocate de Malika Daoust, Me Diane Protat, partage cette indignation et pointe du doigt un changement d’orientation dans le traitement des affaires de violences conjugales à Castres : « À la sortie de l’audience, des confrères du Barreau de Castres sont venus spontanément vers moi pour me faire part de leur incompréhension face aux réquisitions du Procureur et m’ont dit qu’il venait d’entrer en fonctions. Selon eux, auparavant, le Parquet de Castres se montrait diligent et ferme dans son traitement des violences conjugales. » Cette remarque soulève une question cruciale :
« À Castres, la violence faite aux femmes et aux enfants est-elle traitée de manière différenciée selon que vous êtes ou non fact-checker ? »
En France, la perception de corruption augmente avec un recul important dans le classement de Transparency Internation en février 2025, qui place la France en dessous de la moyenne des pays catégorisés comme pleinement démocratiques. Une raison de plus pour certains de douter de la réelle indépendance de la justice ?
Une dimension intersectionnelle : la question de la discrimination raciale
L’affaire de Malika Daoust soulève également une autre problématique, rarement abordée dans les débats sur les violences conjugales : celle de la discrimination intersectionnelle. Malika Daoust, française d’origine algérienne, incarne une double vulnérabilité en tant que femme et en tant que personne issue d’une minorité ethnique. Dans un contexte où les violences faites aux femmes sont déjà insuffisamment prises en compte, se pose la question de savoir si la couleur de peau ou l’origine de la victime influence la manière dont la justice traite ces affaires. La relaxe d’Antoine Daoust, un homme blanc, ancien militaire et figure médiatique, face à une victime franco-algérienne, peut être perçue comme un symbole des inégalités systémiques qui persistent en France. Ce type de décision judiciaire risque de renforcer le sentiment d’injustice et d’abandon chez les femmes issues de minorités, déjà confrontées à des discriminations multiples dans leur vie quotidienne.
Un parallèle avec les tensions franco-algériennes
Cette affaire ne peut être isolée du contexte plus large des relations entre la France et l’Algérie, marquées par des tensions historiques et contemporaines. Les discriminations perçues ou réelles envers les personnes d’origine algérienne en France alimentent un sentiment de méfiance envers les institutions françaises, tant en France que de l’autre côté de la Méditerranée. Le traitement judiciaire de l’affaire Daoust, où une femme franco-algérienne se voit dénier justice face à un agresseur bénéficiant d’un statut social privilégié, risque d’être perçu comme un nouvel impair dans ces relations déjà fragiles. Ce genre de décision, loin d’apaiser les tensions, pourrait au contraire exacerber les ressentiments et renforcer l’idée que la France ne protège pas équitablement tous ses citoyens, en particulier ceux d’origine maghrébine. À une époque où la diplomatie et le dialogue entre les deux pays sont essentiels, de tels incidents judiciaires ne font qu’ajouter de l’huile sur le feu.
L'OCDE, dans sa base de données sur l'égalité des genres, donnait les chiffres suivants (tableau ci-dessous) en 2023 pour les violences faites aux femmes. Notons que la France présentait un score de 0 pour la discrimination juridique sur les violences faites aux femmes et l'Algérie un score de 75. La décision du Tribunal de Castres est donc d'autant plus surprenante puisqu'elle fait effectivement entrer la France dans une autre dimension. Outre la pertinence de l'interrogation de Me Protat sur traitement juridique des violences faites aux femmes et aux enfants au Tribunal de Castres, la décision en référence fait franchir à la France le rubicon de la discrimination juridique. Une observation qui ne manquera pas d'interpeller plus d'une association de victimes et qui devrait aussi inquiéter Gérald Darmanin le ministre de la Justice.
Un fléau sous-estimé et une prise de parole encore insuffisante
Au-delà de l’affaire Daoust, les statistiques nationales rappellent l’ampleur du problème des violences conjugales en France. Il faut rappeler que « dans un contexte de libération de la parole et d’amélioration des conditions d’accueil des victimes par les services de police et de gendarmerie, le nombre de victimes enregistrées a ainsi doublé depuis 2016 ». Pourtant, cette augmentation ne reflète pas une hausse réelle des violences, mais plutôt une meilleure prise en compte des plaintes. En effet, « selon l’enquête Vécu et Ressenti en matière de Sécurité (VRS), seules 14 % des victimes ont porté plainte auprès des services de sécurité pour les faits qu’elles ont subis en 2022 ». Ce faible taux de signalement est révélateur des obstacles auxquels les victimes font face : peur des représailles, honte, manque de confiance dans le système judiciaire ou encore dépendance économique et affective envers l’agresseur.
Les violences conjugales touchent principalement les femmes, avec « 85 % des victimes enregistrées » et « 74 % ayant entre 20 et 45 ans ». Les agresseurs, quant à eux, sont majoritairement des hommes, représentant « 86 % des mis en cause ». Ces chiffres confirment la dimension genrée de ce fléau, qui nécessite des politiques publiques ambitieuses et cohérentes pour protéger les victimes et punir les coupables.
Vers une véritable « Grande Cause Nationale » ?
L’affaire de Malika Daoust et les statistiques nationales posent une question fondamentale : la France protège-t-elle réellement les femmes et les enfants victimes de violences, comme elle s’y est engagée en faisant de ce combat une « Grande Cause Nationale » sous le quinquennat d’Emmanuel Macron ? Malika Daoust interpelle directement les autorités : « La France protège-t-elle plus ses anciens militaires violents et récidivistes que les femmes et les enfants battus ? Est-ce comme cela que la France défend la prétendue Grande Cause Nationale du quinquennat d’Emmanuel Macron ? »
Un recul de la liberté d’expression et des droits des femmes
Enfin, cette affaire s’inscrit dans un contexte plus large de recul des libertés fondamentales en France, notamment de la liberté d’expression tous azimuts puisqu’elle régresse en France. Au-delà des restrictions légales, le recul de la liberté d’expression se manifeste par un phénomène plus insidieux : l’autocensure. Une enquête de l’Ifop menée en 2020 révélait que 40 % des professeurs français déclaraient s’autocensurer, notamment sur des sujets liés à la religion, par peur des représailles ou du manque de soutien institutionnel.
L’autocensure des femmes pourrait donc être liée à la question du traitement des violences faites aux femmes. Antoine Daoust, comme « frappe-checker » autoproclamé, a bénéficié d’une aura médiatique et d’un partenariat avec des institutions prestigieuses comme l’AFP, malgré son absence de qualifications. Cette situation illustre une dérive où la liberté d’expression est parfois instrumentalisée pour protéger des figures controversées, au détriment des victimes. Dans le même temps, les voix des femmes comme Malika Daoust, qui dénoncent des injustices, peinent à être entendues, voire sont étouffées par un système judiciaire et médiatique qui semble privilégier certains profils. Ce double standard contribue à un climat de défiance envers les institutions et compromet les progrès dans la lutte contre les violences faites aux femmes, un domaine où la liberté d’expression des victimes devrait être une priorité absolue.
Pour que ce combat ne reste pas un simple slogan, il est impératif de garantir une justice équitable, rapide et ferme, sans distinction de statut ou de connexions. L’appel interjeté par Malika Daoust, dans l’attente de la motivation du jugement du 21 janvier 2025, sera un test crucial pour le système judiciaire français. Plus largement, il est urgent de renforcer les moyens alloués à la prévention, à la protection des victimes et à la sensibilisation, afin que les femmes comme Malika et leurs enfants puissent vivre sans peur et dans la dignité.
Contacté par France-Soir à trois reprises, le tribunal de Castres n’était pas disponible pour répondre. (1)
1) Questions posées au tribunal de Castres restées sans réponse à ce jour
Le 12 février 2025, la juge Manon Fraysse rendait une décision de relaxe en faveur de monsieur Antoine Daoust dans le cadre d’une affaire de violences conjugales et sur mineurs avec 6 jours d’ITT. En tant que journaliste pour France-Soir, je me permets de vous adresser les questions suivantes :
1 – Est-il exact que le Procureur Madame Suquet a demandé la condamnation de Mr Antoine Daoust pour les faits, mais seulement à un stage de prévention des violences conjugales ?
2 – Des avocats du barreau de Castres présents à l’audience ont indiqué que « ces réquisitions étaient très inhabituelles par leur clémence, car le tribunal de Castres est spécialisé dans les violences conjugales qu’il traite habituellement avec fermeté et sévérité dans ce type de cas ». Ils ont ajouté que « Madame Frédérique Suquet venait juste d’entrer en fonction et que peut-être la réponse pénale aux violences conjugales avait changé ».
La réponse pénale a-t-elle effectivement changé à Castres ?
3 – Dans une affaire de violences conjugales à Créteil le 24 janvier 2025 avec 4 jours d’ITT de la femme victime, le procureur avait requis 10 mois de prison avec sursis contre le mari. Le tribunal a condamné à 6 mois de prison avec sursis.
Y-a-t-il un traitement différent des violences conjugales par le parquet de Castres, qui remet en cause l’approche égalitaire de la justice des femmes battues en France ?
4 – La cause de la violence faite aux femmes et aux enfants, grande cause nationale décrétée par le Président Macron n’a-t-elle pas la même priorité au Tribunal de Castres, consacrant pas la même le sentiment d’insécurité des victimes ?
5 - Un représentant de la communauté franco-algérienne déclare : « Madame Kamla épouse Daoust et sa fille de notre communauté semble faire l’objet d’un traitement clairement différencié. Les violences faites aux femmes d’origine algérienne seraient-elles moins protégées en France qu’en Algérie ? Ceci pourrait être une grande source de conflit additionnel entre la France et l’Algérie ». Commentaires ?
6 – Le Parquet compte-t-il faire appel de cette décision ?
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