Le rôle du gouvernement des États-Unis dans le complexe industriel de la censure au Brésil - rapport de Civilization Works

Auteur(s)
Phoebe Smith, Alex Gutentag, Eli Vieira et David Ágape. Traduit en français par Antoine Bachelin Sena pour France-Soir
Publié le 11 février 2025 - 18:45
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Rapport brésil
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Le rôle du gouvernement des États-Unis dans le complexe industriel de la censure au Brésil - rapport de Civilization Works
France-Soir, Pixabay, DR

ndlr : Ce rapport examine l'implication alléguée du gouvernement des États-Unis, à travers l'Agence des États-Unis pour le Développement International (USAID), dans ce que l'on appelle le « Complexo Industrial da Censura » au Brésil. Voici les points clés du rapport préparé par Phoebe Smith, Alex Gutentag, Eli Vieira, David Ágape et Michael Shellenberger pour la fondation Civilization Works. Il a été traduit en français par Antoine Bachelin Sena pour France-Soir.

  1. Implication des Agences Américaines : Plusieurs entités américaines sont mentionnées comme étant impliquées, directement ou indirectement, dans ce complexe de censure. Cela inclut le Conseil Atlantique, le FBI, le Département d'État, la USAID, la Maison-Blanche, entre autres.
  2. Interventions et Financements :
    • Le rapport détaille des réunions et des collaborations entre des agences américaines comme le FBI et des institutions brésiliennes, notamment le Tribunal Supérieur Électoral (TSE), pour discuter de la lutte contre les "fake news".
    • La USAID est accusée de financer des ONG et des initiatives qui mènent à des politiques de censure au Brésil, notamment en soutenant des projets de « vérification des faits » et des campagnes contre la désinformation.
  3. Critiques et Réactions :
    • Des critiques ont été formulées à l'encontre de cette implication, suggérant qu'elle interfère avec la souveraineté et la démocratie brésiliennes. Certains politiciens et journalistes brésiliens ont utilisé ces accusations pour alimenter des théories de conspiration.
    • Des organisations mentionnées dans le rapport ont nié avoir utilisé des fonds américains pour promouvoir la censure au Brésil.
  4. Répercussions Politiques et Légales :
    • Des projets de loi ont été proposés aux États-Unis pour restreindre la coopération judiciaire et financière avec des institutions brésiliennes impliquées dans la censure, en réponse à ces allégations.
    • Le document cite également des initiatives législatives visant à interdire le financement ou la coopération avec des entités qui promeuvent la censure à l'étranger.
  5. Réactions Internationales :
    • Il y a eu des réactions internationales, avec des demandes de transparence et de documentation des échanges entre les gouvernements américain et brésilien sur ces questions de censure.

 

Le rapport de Civilization Works

Ces dernières années, la Cour suprême du Brésil a pris des mesures de plus en plus drastiques pour censurer le contenu en ligne. La Cour suprême fédérale (STF) et le Tribunal électoral supérieur (TSE), même s’ils semblent opérer de manière indépendante, ont été fortement influencées par des organisations non gouvernementales (ONGs) financées par le gouvernement des États-Unis.

De plus, diverses agences et autorités américaines ont joué un rôle dans l'encouragement et la facilitation de la censure au Brésil.

Le complexe industriel de la censure au Brésil - un vaste réseau d'ONG, de vérificateurs de faits ou fact checkers et d'agents étatiques - reçoit souvent des suggestions, des formations et un soutien financier de son homologue américain.

En soutenant la censure brésilienne, le gouvernement fédéral des États-Unis et ses filiales se sont engagées dans des interventions étrangères inappropriées, visant spécifiquement les élections et les politiques publiques.

Les entités américaines impliquées directement et indirectement dans le complexe industriel de la censure au Brésil incluent :

  • le Atlantic Council,
  • le Congrès américain,
  • le Federal Bureau of Investigations (FBI),
  • le National Endowment for Democracy (NED),
  • la Fondation nationale des sciences (NSF),
  • le Département d'État,
  • l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID),
  • la Maison-Blanche et d'autres.

Les activités des agences et des groupes financés par le gouvernement des États-Unis dans leur ensemble montrent clairement une campagne visant à interférer dans le processus démocratique du Brésil.

Le gouvernement des États-Unis devrait cesser de financer cette campagne ainsi que des campagnes similaires afin de respecter la souveraineté nationale de ses alliés et d'éviter de miner la démocratie à l'étranger.

 

Principales organisations

Laboratoire de recherche forensique digitale du Conseil Atlantique (DFRLab) : Le DFRLab est financé par le Fonds national pour la démocratie (NED), le Département d'État et l'Agence des États-Unis pour le développement international (USAID).

Lors de divers événements organisés par le DFRLab, les palestrants ont plaidé pour une censure généralisée au Brésil. Lors d'un panel du DFRLab en 2019, des chercheurs spécialisés dans la désinformation ont affirmé que les messages privés cryptés représentaient une menace pour la démocratie au Brésil.

(Benz, M. le 26 juin 2023 : “Les impôts américains financent la censure des messages texte au Brésil”).

En ligne avec cette vision, WhatsApp a banni des centaines de milliers de comptes au Brésil et, en 2022, le ministre du STF Alexandre de Moraes a ordonné la suspension de Telegram, bloquant temporairement tout accès à l'application dans le pays.

Le DFRLab a été cité dans le plan stratégique du TSE pour les élections de 2022, marquées par la censure.

En 2019, le Conseil Atlantique a publié un rapport intitulé « Désinformation dans les démocraties : renforcer la résilience numérique en Amérique latine », qui affirme : « Bolsonaro a été élu avec 55 % des voix au second tour - une victoire attribuée non seulement à la situation économique et politique compliquée dans laquelle le Brésil se trouvait, mais aussi à l'utilisation efficace des réseaux sociaux comme principal moyen de connexion avec les électeurs brésiliens. »

(Brookie, G., Marczak, J., & Braga, R. le 28 mars 2019. “Désinformation dans les démocraties : fortifier la résilience digitale en Amérique Latine”.)

Le rapport conclut que l'élection a été fortement influencée par la « désinformation » sur des plateformes cryptées.

 

Agence centrale de renseignement (CIA)

En mai 2022, Reuters a rapporté que le directeur de la CIA aurait dit à des responsables brésiliens de haut niveau que Bolsonaro devait cesser de diffuser de la désinformation liée aux élections et d'éroder la confiance dans le système électoral du pays.

Un autre rapport prétend que c'était la délégation du directeur, et non le directeur lui-même, qui a transmis ce message, tandis que d'autres sources le nient.

(Stargardter, G. e Spetalnick, M. le 5 mai 2022. Le chef exécutilf de la CIA a dit au gouvernement Bolsonaro de ne pas s’immiscer dans les élections brésiliennes, relatent des sources. Reuters.)

 

 

Entités du Congrès

Le Wilson Center, financé par le Congrès des États-Unis, a travaillé avec des fonds du Département de Sécurité Intérieure (DHS) dans une initiative intitulée « Agents contre la désinformation : vaincre la désinformation avec des jeux numériques », comme « méthode d'inoculation » contre la désinformation pour les jeunes étudiants.

(Buynevich, O. le 7 juin 2024. Le jeu vidéo financé par le DHS met en scène le gouvernement en tant que "super-héros" contre la "désinformation".)

Le Wilson Center a expliqué que le jeu avait déjà été testé auparavant dans des pays

comme le Brésil et avait « créé un atelier sur comment vaincre la désinformation » pour « les membres du Parlement, les congressistes et les fonctionnaires ».

(Centre Wilson. Comment le Wilson Center est financé ?)

Les participants « n'ont pas seulement appris à identifier la désinformation, mais également à travailler avec des groupes de parties prenantes (c'est-à-dire les médias, l'industrie et le gouvernement) dans la réponse à la désinformation - et, ce qui est important pour la prévention, dans la nécessité de formuler des stratégies collaboratives à court et à long terme. »

La National Science Foundation, qui est également financée par le Congrès des États-Unis, a accordé une subvention de 200 000 dollars à l'Université George Washington en 2022 pour son travail de lutte contre la désinformation au Brésil, ainsi que dans trois autres pays.

(Sur la National Science Foundation (NSF) : Benz, M. le 26 juin 2023 : “La National Science Foundation de Biden a injecté près de 40 millions de dollars en subventions et contrats de censure sur les réseaux sociaux.”)

L'initiative « utilise diverses méthodes pour étudier comment les politiciens populistes ont déformé la communication sur la santé pendant la pandémie de Covid-19 afin d'encourager des attitudes polarisées et la méfiance parmi les citoyens, les rendant ainsi plus vulnérables à la désinformation”.

(Benz, M. le 5 septembre 2024. Dictionnaire FFO Censorpeak.)

Des chercheurs individuels comme Kate Starbird ont reçu régulièrement des subventions de la National Science Foundation pour leur travail de contre-désinformation, qui a caractérisé les partisans de Jair Bolsonaro au Brésil comme des propagateurs de désinformation dangereuse.

(Starbird, K. (2022). Financement des recherches de Kate Starbird. Faculté de l’Université de Washington. Benz, M. le 7 juin 2023. L'Agence de Censure du DHS a eu une première mission étrange : interdire les discours qui remettent en question les événements électoraux de « mirage rouge, changement bleu ».)

La NSF a également financé l'ONG Meedan avec un contrat de 5 749 900 dollars distribués entre 2021 et 2024 pour la création “d’outils de vérification des faits académiques et de collaboration communautaire, combattant la haine, l'abus et la désinformation avec des partenariats menés par des minorités ».

La NSF a également accordé à Meedan 255 997 dollars en 2021 pour "identifier et combattre la désinformation [sur Covid-19] sur des plateformes de messagerie fermées". Avant les élections de 2022 au Brésil, Meedan s'est associée avec les vérificateurs Agência Lupa, Aos Fatos, Projeto Comprova, Estadão Verifica, Universo Online (UOL) et le TSE pour créer Conf 2022, un partenariat dédié au travail de contre-désinformation.

 

Consortium pour les Élections et le Renforcement du Processus Politique (CEPPS) 

Le Consortium pour les Élections et le Renforcement du Processus Politique (CEPPS) est financé par le Programme d'Élections Globales et de Transitions Politiques (GEPT) de l'USAID.

Le CEPPS a formé des partenariats importants avec le TSE par le biais d'organisations intermédiaires au Brésil.

En 2021, le CEPPS a créé un guide de lutte contre la désinformation, rassemblant des organisations comme l'Institut Républicain International (IRI) et l'Institut Démocratique National (NDI) avec le financement de l'USAID pour « souligner le travail qui est fait pour combattre la désinformation et promouvoir l'intégrité de l'information » dans le monde entier.

Le guide présente une campagne brésilienne de lutte contre la désinformation de 2018 intitulée "NãoValeTudo", encourageant les politiciens à se dissocier des faux contenus en ligne. Le projet était médiatisé par Aos Fatos parmi d'autres agences de vérification qui ont participé à un sommet financé par la NED dans le but de "vérifier les allégations" faites par des leaders politiques de différents pays.

 

En août 2023, un « partenaire principal » du CEPPS, la Fondation Internationale des Systèmes Électoraux (IFES), a travaillé avec le TSE pour discuter des stratégies de censure à travers une initiative visant à « préserver l'intégrité de l'information et la confiance publique dans les élections ».

Le « partenaire technologique senior » du CEPPS, Internews, a créé un rapport sur les effets du « discours de haine » et de la « désinformation » en juin 2023.

En octobre 2023, l'IFES a de nouveau fait équipe avec le TSE pour coordonner l'« intégrité de l'information » dans les organes de gestion électorale.

 

Agence de Sécurité Cybernétique et Infrastructurale (CISA)

En 2023, l'Agence de Sécurité Cybernétique et Infrastructurale (CISA) a financé un projet via l'Elliott School of International Affairs de l'Université George Washington intitulé « Résilience contre la désinformation électorale : études de cas du Canada et du Brésil pour une utilisation dans les politiques des États-Unis ».

Le contenu du rapport n'est pas disponible publiquement en ligne. (Université George Washington. 2023 Rapport GWU)

 

FBI

Le TSE s'est réuni avec le Federal Bureau of Investigations (FBI) et un représentant de l'ambassade des États-Unis le 5 mars 2018 pour discuter de la censure des « fausses informations » et de la manière de censurer la « désinformation étrangère ».

Des agents du FBI et des fonctionnaires du Département de la Justice (DOJ) américain ont participé à des réunions au TSE pour planifier des efforts de censure en collaboration avec l'Agence Brésilienne de Renseignement (ABIN).

Le superviseur des organisations cybernétiques du FBI et un agent du DOJ spécialisé en contre-espionnage ont partagé leurs insights sur les efforts du FBI et du DOJ pour combattre les « fausses informations » aux États-Unis.

Le 24 avril 2018, le TSE a organisé un « Séminaire International sur les Fake News et les Élections », auquel ont participé des représentants du FBI.

 

Institut Républicain International (IRI):

 

L'IRI a publié plusieurs articles et interviews sur la désinformation au Brésil, y compris un intitulé « Désinformation au Brésil - La Bonne Réponse ? », qui affirme que « la désinformation menace l'intégrité démocratique » au Brésil.

L'article indique que 92% des citoyens « considéraient les faux contenus sur le web comme un problème » avant les élections de 2018.

L'article cite également les intérêts économiques des États-Unis comme raison de limiter la désinformation au Brésil.

« Comme partenaire commercial important des États-Unis, [le Brésil] se remet encore d'une récession marquée, et une instabilité électorale pourrait affecter ses perspectives économiques.

Globalement, les Brésiliens doivent découvrir comment minimiser la propagation de contenu faux, restaurer la confiance dans les institutions et le faire de manière cohérente avec les libertés démocratiques. »

En 2021, l'IRI, le NDI et l'Observatoire de l'Internet de Stanford (SIO) se sont associés pour créer le « Combat contre la manipulation de l'information : un manuel pour les élections et au-delà », un guide conçu pour les agents de la société civile, les journalistes, les gouvernements, les organes de gestion électorale et autres acteurs démocratiques.

Le guide explique comment WhatsApp a élargi l'accès à l'API via Zendesk pour la First Draft Coalition, une organisation financée par la National Science Foundation (NSF) qui travaille pour « collecter des données sur les événements politiques, la propagation d'informations fausses et le discours de haine, et d'autres objectifs de recherche » via Comprova au Brésil.

Le guide approuve ces relations entre le gouvernement et les plateformes cryptées, argumentant que de telles relations sont essentielles pour atténuer la désinformation.

 

Institut Démocratique National (NDI)

L'Institut Démocratique National (NDI) est financé par la NED, l'USAID et le Département d'État des États-Unis. Le NDI a financé diverses initiatives de recherche qui examinent la désinformation au Brésil, y compris un rapport intitulé « Interventions pour mettre fin à la violence en ligne contre les femmes en politique », en partenariat avec Meedan.

Ce rapport vise à combattre la « violence en ligne » et la « désinformation de genre » par le « développement d'un mécanisme de coordination à l'échelle nationale », avec les gouvernements, « leur donnant la capacité de recevoir et de gérer les incidents de violence de genre en ligne — y compris la désinformation — susceptibles d'avoir un impact sur le discours ou les résultats politiques. »

Il prône également la mise en œuvre d'une « politique de tolérance zéro pour les discours de haine et les abus de nature sexiste, sexualisée, raciste et d'autres formes de discrimination sur les pages, profils et plateformes législatives, ainsi que sur celles des candidats ».

En 2018, le NDI a co-organisé une conférence contre la désinformation en partenariat avec la commission électorale mexicaine (INE).

Pat Merloe, associé senior du NDI et directeur des processus électoraux, a partagé que « le NDI soutient les organisations de surveillance électorale dans le développement et le partage d'approches et d'outils pour surveiller et analyser l'impact des opérations de désinformation sur l'intégrité électorale » au Mexique, en Colombie et au Brésil.

En 2021, le NDI a travaillé avec l'IRI et le SIO pour créer le « Combat contre la manipulation de l'information : un manuel pour les élections et au-delà ».

 

Fonds National pour la Démocratie (NED)

Le Fonds National pour la Démocratie (NED) a financé une initiative de l'École de Communication, des Médias et de l'Information de la FGV Rio, lancée le 25 juillet 2018.

Bien que le site original ait été retiré, des pages archivées expliquent que le projet, intitulé Salle de Démocratie Digitale, « est une initiative pour surveiller et analyser le débat public sur Internet et pour combattre les stratégies de désinformation qui menacent la justice des processus politiques et électoraux, cherchant à renforcer les institutions démocratiques ».

Un chercheur, Amaro Grassi, a commenté que « l'idée de la Salle de Démocratie Digitale - #observa2018 est d'avoir un impact réel sur l'agenda public brésilien - c'est-à-dire, surveiller le débat électoral et politique », dans un communiqué de presse de 2018.

En fin de compte, la Salle dépend d'« un réseau international de partenaires académiques, de la société civile et gouvernementaux », qui « interagissent constamment avec les chercheurs du DAPP [Département d'Analyse des Politiques Publiques de la FGV] ».

En 2019, le Fonds National pour la Démocratie a alloué des fonds pour diverses initiatives de lutte contre la désinformation au Brésil.

Cela incluait un fonds nommé « Combat contre la désinformation dans les élections locales au Brésil », accordé à l'Institut Technologie et Équité « pour combattre la désinformation dans les élections locales au Brésil».

Cet effort « a formé des fonctionnaires dans les organes de gestion électorale et la justice électorale, ainsi que des acteurs clés de la société civile, sur différentes approches pour lutter contre la désinformation, en préparation pour les élections locales de 2020 au Brésil », travaillant en concertation avec des agences de vérification des faits.

Un fonds nommé « Dialogues Imprévisibles au Brésil », accordé à l'ONG Politize, « implique des influenceurs des réseaux sociaux, des réseaux de la société civile, ainsi que ses propres bénévoles pour assurer la participation de multiples publics » dans « des discussions informatives sur des questions politiques pertinentes ».

Le NED finance également l'Institut pour la Démocratie et l'Assistance Électorale (IDEA). En 2021, l'IDEA a organisé un sommet où les conférenciers ont appelé à la fin de « l'échange international d'idées » entre les partisans de Trump et de Bolsonaro.

En 2021, le NED a de nouveau alloué des fonds pour diverses initiatives de lutte contre la désinformation au Brésil. Ces dons ont financé des projets comme « Fura Bolha - Encourager le Dialogue Démocratique au Brésil », de la Fondation Fernando Henrique Cardoso, qui « aborde les espoirs et les peurs des citoyens dans un effort pour réduire l'anxiété concernant le vote, la pandémie de COVID-19, et le discours public de diabolisation des opposants politiques et idéologiques ».

Un autre fonds, nommé « Encouragement du Dialogue Démocratique au Brésil », accordé à l'Association Internetlab de Recherche en Droit et Technologie, a soutenu un projet visant à « promouvoir un agenda démocratique parmi les principaux acteurs des réseaux sociaux et à renforcer les efforts de la société civile pour combattre l'ingérence numérique malveillante dans les discussions publiques et politiques ».

Le projet a travaillé « avec une organisation partenaire d'influenceurs numériques et d'activistes de la société civile » pour « l'engagement de la société civile dans l'identification des utilisations malveillantes et coordonnées de techniques informatiques pour déformer la sphère publique numérique ».

Le NED a accordé plusieurs fonds supplémentaires pour « impliquer les influenceurs des réseaux sociaux » dans la promotion d'un « discours constructif autour de sujets délicats » ; « surveiller et mobiliser des actions collectives en réponse aux menaces contre la démocratie » ; « former des communicateurs influents et des influenceurs sur les réseaux sociaux » sur « l'importance des politiques démocratiques de sécurité publique » ; et a établi des systèmes de "veille sociale" pour défendre la démocratie au Brésil. 

Le NED soutient également un réseau mondial de think tanks, le Réseau des Instituts de Recherche pour la Démocratie (NDRI), qui inclut des organisations comme l'Institut Sivis, basé au Brésil.

L'Institut Sivis est une « organisation de la société civile apolitique et à but non lucratif » et affirme que « le Brésil est un pays marqué par le manque de participation active de la population dans les affaires publiques et dans la construction de la politique », ce qui serait dû à « un faible niveau de connaissance politique, un manque d'intérêt pour le progrès de la vie politique, [et] de faibles niveaux d'adhésion au régime démocratique et une méfiance envers les étrangers, ce qui rend la coopération sociale difficile ».

L'Institut Sivis a publié des articles d'opinion concluant qu'« il y a un risque réel que la désinformation et l'utilisation malveillante de fausses informations génèrent encore plus d'instabilités politique et sociale, comme le soulignent les experts consultés par le Forum Économique Mondial », en rapportant la soi-disant 'récession globale de la liberté d'expression ».

 

Agence des États-Unis pour le Développement International (USAID)

Dans son « Guide de la Désinformation » publié en février 2021, le Centre d'Excellence en Démocratie, Droits Humains et Gouvernance de l'USAID a affirmé qu’« au Brésil, des forfaits de données bon marché qui incluent uniquement l'accès à des applications comme WhatsApp et Facebook rendent les citoyens plus susceptibles de consommer des réseaux sociaux dans lesquelles des fausses affirmations sont relayées par des sources non fiables ».

Le document cite un article d'opinion publié en 2019 par l'ancien diplomate australien Arjun Bisen, qui affirme : « de l'Inde à l'Indonésie et au Brésil, la démocratie est compromise par des campagnes de désinformation domestique en ligne des partis politiques cherchant à obtenir un avantage » et incite les institutions à « créer de nouvelles règles et à tenir responsables les parties impliquées. »

Le guide recommande comme modèle dans la lutte contre la désinformation l'initiative "TruthBuzz" du Centre International pour les Journalistes (ICFJ).

Dans son dernier rapport financier, l'ICFJ remercie les organisations gouvernementales suivantes pour les fonds fournis : USAID, Département d'État des États-Unis et les ambassades des États-Unis à Tbilisi, Tunis et Skopje.

L'ICFJ utilise des ressources gouvernementales pour combattre la désinformation au Brésil : « Neuf initiatives médiatiques ont été sélectionnées pour recevoir financement et conseils pour développer des projets qui combattent la désinformation au Brésil dans le cadre du Jogo Limpo ('Fair Game'), programme du Centre International pour les Journalistes (ICFJ) en partenariat avec YouTube Brésil », a-t-il affirmé en 2020.

Le guide soutient également que « les fonctionnaires du gouvernement et les journalistes ne sont plus les seuls gardiens de l'information. Ainsi, les citoyens ont besoin d'un nouveau niveau d'information ou d'alphabétisation médiatique pour évaluer la véracité des affirmations faites sur Internet ».

L'USAID a également étudié le temps moyen que les Brésiliens passent en ligne et a argumenté que l'utilisation de WhatsApp était problématique.

L'Ambassade des États-Unis au Brésil et l'USAID ont fourni un soutien financier pour le congrès de 2024 de l'Association Brésilienne de Journalisme Investigatif (Abraji).

Cette organisation, conjointement avec l'Information Futures Lab (IFL), a fondé Comprova, un consortium de 28 organisations de presse brésiliennes dédiées à « identifier et expliquer les rumeurs, les contenus fabriqués et les tactiques de manipulation. »

Entre 2020 et 2023, l'USAID a soutenu le projet Rooted in Trust (RiT), qui « a travaillé aux côtés de plus de 40 médias, organisations de santé et humanitaires» pour « identifier la désinformation nocive » dans plusieurs pays, y compris le Brésil.

Depuis 2020, le RiT « a recueilli et analysé plus de 40 000 rumeurs sur les réseaux sociaux et des activités d'engagement communautaire » et « a soutenu la production de plus de 500 émissions de radio et pièces médiatiques, ainsi que du théâtre de rue, des campagnes d'influenceurs et des événements d'extension communautaire ».

Au Brésil, le RiT « a travaillé pour faire face aux impacts de la désinformation liée à la pandémie avec des partenaires locaux, l'Institut International de l'Éducation du Brésil (IEB), l'Institut de Recherche et de Formation Indigène Iepé et le Projet Santé et Joie (PSA), dans les États du Pará, Amapá et Roraima. »

Selon le RiT, les chercheurs au Brésil créeraient « des bulletins réguliers d'analyse des rumeurs pour soutenir les réseaux humanitaires et de coordination sanitaire, orienteraient la presse locale et les groupes de base et les aideraient à s'engager avec les questions de santé de leurs communautés et à produire un contenu localisé et de haute qualité pour aborder et neutraliser les rumeurs. »

L'USAID cite le TruthBuzz comme une stratégie efficace de vérification des faits contre la désinformation. Le TruthBuzz a reçu une formation de First Draft News, qui a été financé par la National Science Foundation.

Le TruthBuzz est également soutenu par l'ICFJ, qui reçoit un financement du Département d'État des États-Unis depuis 2020 pour le programme « Leaders émergents des médias », qui travaille avec des boursiers des États-Unis et d'Amérique latine et soutient leurs intérêts professionnels dans le journalisme.

Un rapport récent du programme affirme que 61% des projets développés dans le programme sont encore en cours.

 

Département d'État des États-Unis

Le Département d'État américain a accordé des fonds au Département d'Analyse des Politiques Publiques de la Fondation Getúlio Vargas (FGV DAPP) et au Centre de Technologie et Société pour deux projets distincts en 2021 et 2022.

En 2021, le Département d'État des États-Unis a accordé à la FGV DAPP 20 000 dollars « pour former des candidates femmes cis et trans aux compétences sociales et techniques nécessaires pour l'exercice complet de leurs droits politiques. Cela contribue à réduire le déficit de représentation des genres en augmentant l'accès des femmes à la politique au Brésil ».

En 2022, le Département d'État a accordé à la FGV DAPP 24 435 dollars « pour combler un fossé entre les professionnels des médias et la communauté scientifique sur la manière de communiquer les changements climatiques et les risques climatiques au public au Brésil ».

En 2023, le Département d'État des États-Unis a donné 20 430 dollars à l'Association Brésilienne de Journalisme Investigatif pour financer « un programme de formation en ligne pour les journalistes de tout le Brésil afin de traiter de la désinformation électorale alimentée par l'IA ».

Le Département d'État explique que ces trois bourses faisaient partie d'un Programme de Diplomatie Publique « pour soutenir la réalisation des objectifs et des buts de la politique étrangère des États-Unis, promouvoir les intérêts nationaux et augmenter la sécurité nationale en informant et en influençant les publics étrangers et en élargissant et renforçant la relation entre le peuple et le gouvernement des États-Unis et les citoyens du reste du monde ».

 

Ambassade des États-Unis

Le 26 avril 2024, Felipe Neto, le YouTuber le plus populaire du Brésil avec 46,3 millions d'abonnés, a annoncé sur X un partenariat avec l'Ambassade des États-Unis et son Institut Vero pour organiser des ateliers en Amazonie axés sur l'éducation à la communication avec pour objectif de « favoriser l'émergence et le développement de voix locales. »

Neto, qui a soutenu et fait campagne pour Lula lors des élections de 2022, a été nommé par Lula dans un groupe de travail du ministère des Droits Humains et de la Citoyenneté. Ce groupe a été créé pour lutter contre le discours de haine et l'extrémisme, avec un accent particulier sur la régulation des réseaux sociaux.

Neto est également le fondateur de l'Institut Vero, une ONG qui collabore avec le Programme de Lutte contre la Désinformation du TSE.

En 2020, l'Institut Vero a parrainé des événements du TSE auxquels a participé Graham Brookie, directeur senior du DFRLab.

Pendant ces événements, le DFRLab a formé les fonctionnaires du TSE à « l'identification et au combat de la désinformation » en utilisant des méthodes d'Intelligence de Source Ouverte (OSINT) pour l'analyse des réseaux.

L'Ambassade des États-Unis a donné 25 000 dollars au Vero en 2023 et 5 000 dollars en 2024. Elle a également fait don de près de 30 000 dollars à l'ONG Redes Cordiais en 2023 et de 45 000 dollars en 2024.

Le 22 août 2024, le Tribunal Suprême Fédéral a tenu une réunion avec Redes Cordiais et l'Institut Vero pour « rapprocher la justice de la société ».

La seconde édition des Twitter Files Brésil a révélé que Felipe Neto avait un accès privilégié à Twitter, qu'il a utilisé pour demander la censure de contenu pendant la pandémie de COVID-19.

En 2021, l'Ambassade et les consulats des États-Unis au Brésil ont mis en œuvre un programme pilote appelé « Élective Information et (dés)information », avec un cours sur la désinformation, où « 23 professeurs ont été formés et 600 élèves ont suivi le cours optionnel proposé dans huit écoles de six villes de l'État de São Paulo».

Au second semestre de 2021, le cours était disponible pour les élèves de tout l'État.

En 2024, l'Ambassade et les consulats des États-Unis au Brésil ont annoncé une opportunité de financement « pour des projets qui promeuvent des objectifs et des initiatives stratégiques des États-Unis, tout en mettant en avant des valeurs partagées ou de meilleures pratiques et en renforçant les liens entre le Brésil et les États-Unis ».

Une initiative intitulée « Expansion de l'accès des Brésiliens au journalisme basé sur des faits pour combattre la désinformation » a accepté des demandes de financement jusqu'au 30 juin 2024 « pour collaborer avec des organisations locales afin de fournir des opportunités de formation ou des programmes de renforcement des capacités pour la presse et les journalistes locaux brésiliens, avec une attention particulière aux déserts de l'information – une communauté, rurale ou urbaine, avec un accès limité aux types de nouvelles et d'informations crédibles et approfondies qui alimentent la démocratie au niveau populaire. »

La liste des candidatures explique que « les idées de projets dans le cadre de cette initiative incluent, mais ne se limitent pas à » celles qui « renforcent la capacité institutionnelle des médias traditionnels et émergents pour lutter contre la désinformation et la mésinformation », « améliorent les compétences en vérification des faits parmi les journalistes, les influenceurs et autres parties prenantes » et « promeuvent des solutions innovantes pour combattre la désinformation ».

 

La Maison Blanche

Le 10 février 2023, le président Joe Biden a rencontré le président du Brésil, Luiz Inácio Lula da Silva, à Washington DC, où le duo « a réaffirmé la nature vitale et durable de la relation États-Unis - Brésil et a souligné le renforcement de la démocratie ».

Un communiqué de presse de la Maison-Blanche concernant la réunion détaille que « comme leaders des deux plus grandes démocraties des Amériques, le Président Biden et le Président Lula se sont engagés à travailler ensemble pour renforcer les institutions démocratiques. (...) Les deux leaders ont noté qu'ils continuent de rejeter l'extrémisme et la violence en politique, ont condamné le discours de haine et ont réaffirmé leur intention de construire une résilience sociale face à la désinformation, et ont convenu de travailler ensemble sur ces questions. »

 

Principales organisations citées dans ce rapport :

  • Laboratoire de recherche forensique digitale du Conseil Atlantique (DFRLab).
  • Agence centrale de renseignement (CIA).
  • Dotations du Congrès.
  • Consortium pour les élections et le renforcement du processus politique.
  • Agence de sécurité cybernétique et infrastructure.
  • Département fédéral des enquêtes.
  • Institut républicain international.
  • Institut démocratique national.
  • Fonds national pour la démocratie.
  • Agence des États-Unis pour le développement international.
  • Département d'État des États-Unis.
  • Ambassade des États-Unis.
  • La Maison-Blanche.

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Le 6 avril 2024, Michael Shellenberger, journaliste déclarait dans une vidéo et un tweet « le Brésil est engagé dans une vaste répression de la liberté, au bord du pré...
10 avril 2024 - 10:23
Politique
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#TwitterFilesBrazil 2 – La pression augmente, Starlink, service internet menacé, les répliques politiques
Le 6 avril 2024, Michael Shellenberger, journaliste déclarait dans une vidéo et un tweet « le Brésil est engagé dans une vaste répression de la liberté, au bord du pré...
10 avril 2024 - 10:23
Politique
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Paul Figueiredo
#TwitterFilesBrazil 3– Le Brésil au bord de la dictature après les demandes abusives du juge Moraes, debriefing avec le journaliste brésilien Paulo Figueiredo
Paulo Figueiredo était jusqu’en 2022 un des journalistes présentateurs les plus connus au Brésil, aux audiences pharaoniques de plusieurs millions chaque jour, et suiv...
11 avril 2024 - 13:30
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TwitterFilesBrasil 4
TwitterFilesBrazil 4 – Gustavo Gayer dénonce la dictature brésilienne au Parlement Européen : Une dictature qui se prétend démocratie.
Des députés brésiliens reçus au Parlement européenGustavo Gayer, député du Goiàs au Brésil, ainsi que d’autres élus brésiliens étaient reçus hier au Parlement européen...
11 avril 2024 - 16:50
Politique
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Eli Vieira
Au Brésil, « les limites ont été franchies » - TwitterFilesBrazil 5 avec le journaliste Eli Vieira
Docteur en biologie génétique, Eli Vieira est journaliste pour la Gazeta do Povo au Brésil. Il s’est illustré aux côtés des journalistes Michael Shellenberger et David...
16 avril 2024 - 15:20
Vidéos

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