Pas de taxis volants à Paris   : les associations ont obtenu gain de cause

Auteur(s)
Corine Moriou pour France-Soir
Publié le 08 janvier 2025 - 09:29
Image
taxi volants
Crédits
DR
Regardez bien ce drôle d’oiseau. Il n’est pas prêt de réapparaître dans le ciel de Paris
DR

C’est une victoire pour les associations qui s’opposaient aux projet de taxis volants au-dessus de Paris. L’UFCNA, l’Advocnar, SOS Paris et inCOPruptibles ont obtenu gain de cause. L’Etat est condamné à démonter le « vertiport » sur la Seine et à les indemniser des frais de justice.  

« Nous avons gagné la première manche, mais notre bataille n’est pas finie, car on peut s’attendre à voir ressurgir dans quelque temps les taxis volants dans le ciel de la capitale. La nature a horreur du vide en matière aéronautique », souligne prudente Chantal Beer-Demander, Présidente de l’UFCNA, l’Union Française Contre les Nuisances des Aéronefs.  

Le Conseil d’Etat, la plus haute juridiction administrative de notre pays, a en effet annulé, le 18 décembre dernier, l’arrêté ministériel autorisant la création d’une hélistation – ou plus exactement d’un mini-aérodrome – sur la Seine, à hauteur de la Cité de la mode et du design.   

Un coup dur pour les promoteurs du projet, Aéroports de Paris et le constructeur allemand Volocopter, qui rêvaient que Paris devienne la première capitale au monde à accueillir des taxis volants, à l’image des scènes du film « Le Cinquième élément » de Luc Besson.  

Les Parisiens peuvent être rassurés. Ils ont échappé au trafic de ces engins futuristes qui auraient dû s’installer dans le paysage dès l’été 2024 à l’occasion des Jeux Olympiques et Paralympiques.  

Au vacarme des gros-porteurs qui survolent déjà allègrement la capitale – dont nous avons abondamment dénoncé les nuisances sonores dans les colonnes de France Soir  - ne va pas s’ajouter le bourdonnement intempestif des VoloCity. Tout du moins pour le moment.    

Nous nous réjouissons de cette bonne nouvelle. Nous refusons d’être les chantres du dit « progressisme » de peur de passer pour des rétrogrades, inaptes à comprendre les nouvelles évolutions technologiques. 

Pas de taxi volant au-dessus de Notre-Dame de Paris 

Revenons sur le feuilleton de l’été.  

Au cœur de la tourmente des élections législatives, Patrice Vergriete, le ministre des Transports, démissionnaire, avait donné l’autorisation de créer un vertiport sur la Seine et de l’ouvrir à la circulation aérienne des aéronefs électriques à décollage et atterrissage verticaux (eVTOL).  

Il n’avait pas tenu compte de l’opposition à l’unanimité des élus de la Ville de Paris, des associations de riverains et de défense de l’environnement, de l’avis défavorable de l’Autorité Environnementale (AE) à l’automne 2023 et de l’enquête publique qui avait recueilli 87 % d’avis négatifs en février 2024.  

A J moins 2 de la cérémonie d’ouverture des JO, le mercredi 24 juillet, le Conseil d’Etat avait donné le feu vert à l’expérimentation des taxis volants . Il s’agissait d’une mesure d’urgence, donc provisoire, en attendant une audience sur le fond.  

Les démonstrations ne devaient concerner que les VIP embarqués gratuitement, faute d’une certification de l’Agence Européenne de Sécurité Aérienne (AESA), comme nous l’expliquions dans notre article du 9 avril dernier

Augustin de Romanet, P-DG sortant d’ADP avait alors lancé une invitation à Emmanuel Macron : « S’il souhaite être le premier Européen à voler sur ce type de véhicule, en conditions réelles, au moment des JO, il est le bienvenu. ».  

Coup de tonnerre dans le ciel bleu de Paris : Dirk Hoke, le P-DG de Volocopter, avait annoncé le 8 août (deux jours avant la fin des JO) que les VoloCity ne pourraient voler « en raison du retard d’un sous-traitant américain et faute de certification des moteurs » 

Finalement, le Président Macron n’a pas été le VRP de la société allemande Volocopter devant les caméras du monde entier. La séance de rattrapage, programmée le 8 décembre au-dessus de Notre-Dame, est également tombée à l’eau. Ainsi s’écrit l’histoire avec un petit h. 

Une administration française aux pratiques contestables 

Le 18 décembre dernier, le Conseil d’Etat a donné raison sur le fond au recours déposé par les associations de défense des riverains et de l’environnement et à la Mairie de Paris qui estimaient que le gouvernement aurait dû au préalable consulter l’Autorité de Contrôle des Nuisances Aériennes (ACNUSA), comme le prévoit la loi.  

La Mairie de Paris qui dénonçait « une aberration écologique au profit des ultra-riches », a salué la décision du Conseil d’Etat. « C’est polluant, énergivore, avec un impact sur la biodiversité », avait taclé Dan Lert, maire adjoint de Paris.  

L’UFCNA décortique la décision pour France Soir : « Cette affaire en dit beaucoup sur les pratiques contestables de l’administration de l’aviation civile. Il est étonnant que la Direction Générale de l’Aviation Civile n’ait pas respecté cette procédure, car l’avis de l’ACNUSA n’est que consultatif », a fait remarquer Chantal Beer-Demander dont l’association est défendue par Maître Louis Cofflard.  

Il faut le souligner : L’ACNUSA n’est pas « un machin » de plus inutile. Mais c’est le gendarme des transports aériens qui sanctionne les compagnies en infraction (près de 1 000 poursuites par an) et perçoit les amendes. On connaît les rivalités qui opposent les fonctionnaires de l’administration et les membres de l’ACNUSA nommés de manière indépendante. Après une place de Président vacante depuis le 12 avril (en plein dans la période des JO !), Pierre Monzani, ancien préfet, a été nommé le 18 décembre dernier.   

Faisons un peu de politique fiction. Si demain Elon Musk investissait plusieurs millions de dollars dans le ciel de Paris en vue d’y faire voler des Robotaxis Tesla, l’administration française pourrait-elle lui opposer un refus catégorique ?  

A cela, la Présidente de l’UFCNA répond : « Nous attendons le jugement d’un autre recours qui porte cette fois-ci sur la légalité de l’arrêté portant autorisation de la circulation des eVTOLS à titre dérogatoire dans le ciel de Paris. Nous voulons stopper ce type d’initiative qui pourrait réapparaître à tout moment. »  

Cette affaire n’est pas seulement parisienne. Elle concerne la santé et la sécurité de tous les Français dans un monde en pleine mutation. « Au-delà des taxis volants, il faut une réglementation environnementale de l’aviation générale à l’heure où les loisirs aériens explosent partout en métropole et outre-mer avec l’aviation légère, les ulm, les avions de voltige, les drones … », tient à souligner Chantal Beer-Demander.  

La fin du rêve aérien pour Volocopter  

Dirk Hoke quittera son poste de P-DG de Volocopter à la fin du mois de février 2025. @Volocity

En novembre dernier, le conseil régional d’Ile-de-France a annulé une subvention d’un million d’euros attribuée à ADP un an plus tôt.  

Valérie Pécresse s’était pourtant montrée une ardente partisane du projet de VoloCity , mais elle a regretté les « retards pris en matière de certification » et l’impossibilité de vols de démonstration en 2024. A l’heure où les Français qui galèrent dans les transports en commun, nul n’aurait compris le maintien de cette subvention.  

Sale temps pour les promoteurs du projet. ADP aurait dépensé 12 millions d’euros pour la construction de cinq vertiports franciliens.  

En mars 2021, Volocopter avait levé 200 millions d'euros, suivis de 182 millions de dollars supplémentaires l'année suivante. Elle avait notamment été soutenue par Mercedes-Benz et le constructeur chinois Geely. Elle prévoyait de nouvelles levées de fonds… avant que ses VoloCity soient cloués au sol pendant les Jeux olympiques.  

Lundi 30 décembre, Volocopter a annoncé avoir déposé le bilan faute de financements. "Malgré les efforts intensifs de levée de fonds récents, il n'a pas été possible de trouver une solution viable pour maintenir une activité régulière en dehors des procédures d'insolvabilité”, explique le P-DG de l'entreprise, Dirk Hoke dans un communiqué de presse . En conséquence, la start-up créée en 2011 a engagé une procédure d’insolvabilité auprès du Tribunal de Karlsruhe, outre-Rhin. Dirk Hoke quittera son poste à la fin du mois de février 2025. Volocopter ne désespère pas et recherche de nouveaux investisseurs. 

Son rival européen, l’Allemand Lilium, a également cessé ses opérations la semaine dernière, avant d’être repris in extremis par un consortium d’investisseurs.  

Les taxis volants n’ont plus vraiment la cote en Europe. Cela semble être la fin du rêve aérien au-dessus des villes.   

 

À LIRE AUSSI

Image
Taxis volants partie 2
Taxis volants : la folle idée de circuits touristiques au-dessus de Paris
TRANSPORT - Les associations de riverains et de défenseurs de l’environnement sont en colère. Mais les acteurs du projet ne lâchent rien. A l’occasion des JO, des dépl...
08 décembre 2023 - 15:02
Société
Image
taxi volant
Taxis volants pendant les JO 2024 : le passage en force
Le Conseil d’Etat vient de donner le feu vert des expérimentations des taxis volants pendant et après les JO. Un déni de démocratie alors que la Mairie de Paris et le ...
29 juillet 2024 - 14:00
Société

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Les dessins d'ARA

Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.