Le Président en Absurdistan, le peuple en pénitence
"Eclairé par la science" - nous voilà sauvés ! - le Président a donc parlé.
Et comme il était seul à réciter le catalogue du plan élaboré dans le secret de son Conseil de défense (contre quel ennemi ?), il ne risquait pas d'aborder les questions qui dérangent en haut lieu.
En Absurdistan nous étions. En Absurdistan nous demeurons.
Il y a bien longtemps, un doyen des Facultés de Droit, Charles Debbasch, avait consacré un ouvrage à "L'administration au pouvoir".
Aujourd'hui, c'est la technocratie au pouvoir !
Car, enfin, il fallait y penser ...
Un "déplacement pour une promenade dans un rayon de 20 km et pour 3 heures". D'abord, c'est ne pas permettre aux habitants des grandes villes de quitter vraiment la ville. Ensuite, c'est parfaitement incontrôlable : il suffit d'avoir une attestation de rechange avec soi pour transformer les 3 heures en 4 ou 5 heures.
30 personnes dans une église... Il faut n'être jamais entré dans une église pour ne pas faire la différence entre une chapelle du pays bigourdan, où 30 personnes, ce serait effectivement beaucoup, et une église ou une cathédrale, où ce chiffre est parfaitement ridicule.
Imaginons, un seul instant, les discussions dans ce trop fameux Conseil de défense ! 30 km, 10 km ? Allez, va pour 20 km. Après d'âpres discussions. On atteint les sommets ...
En réalité, l'enfermement des Français va encore durer trois longues semaines. Au total, et si tout va bien, cela fera un mois et demi à l'automne, après deux mois au printemps. Avec toutes les conditions que le Président mettait pour présenter les étapes du 15 décembre et du 20 janvier, j'en venais à me demander s'il n'allait pas nous confiner ... jusqu'en mai 2022 ! Prenons le parti d'en sourire !
Après son allocution, le choeur des commentateurs patentés était presque unanime : quelle belle décision que l'ouverture des magasins accessoires, pardon "non essentiels" !
Désolé ! Je ne peux y joindre ma plume.
On ne saurait oublier, en effet, que c'était vraiment par une autre décision purement technocratique que ces commerces "non essentiels" avaient été autoritairement fermés. Et, au moment où ils vont de nouveau ouvrir leurs portes - et pourquoi attendre samedi matin ? - j'ai plutôt envie de crier ma colère contre cette injustice dont ont été victimes ces commerçants. Et que dire des restaurateurs appelés à attendre la Saint Glinglin ?
Evidemment, il n'a pas été expliqué aux Françaises et aux Français que le recul de l'épidémie avait commencé avant ce deuxième confinement, ni qu'aucun lien n'est établi "par la science" entre le confinement et l'évolution de la pandémie.
Tout juste le Président a-t-il consenti à dire, dans une allusion à sa précédente intervention télévisée : "Nous redoutions des chiffres bien pire encore" que ceux qui permettent, à ses yeux, d'atténuer les mesures de confinement. Chacun appréciera le "nous". Mais la ficelle est un peu grosse. En parlant de 9 000 personnes en réanimation, et en prononçant le seul chiffre de "400 000 morts", il s'agissait tout bonnement de justifier - par la peur - cette nouvelle assignation à résidence. Et, cela, M. Macron le sait mieux que quiconque.
Du vaccin, "formidable lueur d'espoir", les Françaises et les Français ont abondamment entendu parler mardi soir. Et ce n'est qu'un début !
Naturellement, pas un mot du traitement de la maladie. Que fait-on en attendant l'arrivée et l'effet de la vaccination ? Pas de réponse à cette question, qui ne doit pas en être une.
Par conséquent, on continue à compter nos morts. Du reste, le pouvoir n'est guère bavard à ce sujet. Il est vrai que les chiffres ne parlent pas en sa faveur ...
Et il aura fallu attendre que la barre des 50 000 morts soit presque atteinte pour que l'on évoque, la semaine dernière, un plan pour les EHPAD, c'est-à-dire pour la population la plus menacée par le virus.
Il aura fallu ... 9 mois au gouvernement, au ministre de la Santé, au Directeur Général de la Santé, pour nous proposer, enfin, un plan pour protéger nos aînés.
Non, décidément non, je n'ai pas envie - alors que j'écris cela - de me joindre au choeur des bien-pensants. Aucune indulgence n'est possible. Nous avons 33 000 morts de plus que les Allemands...
Trop de choses ont été passées sous silence : les vagues de licenciements qui déferlent, la détresse des femmes et des hommes qui ne supportent plus l'assignation à résidence par un pouvoir qui fait payer au peuple français son imprévoyance et son incurie. "Ils ne sont pas de niveau", entend-on d'ailleurs dans la France d'en bas.
Le président de la République aurait bien pu parler trois heures - il en est certainement capable ! - que cela n'aurait pas emporté mon adhésion.
Le Président est en Absurdistan, le peuple est en pénitence.
Non sans raison, des comparaisons sont faites avec l'Allemagne ou avec la Suède. Ne comparons surtout pas notre situation à celle de la Corée du Sud, dont M. Véran n'a pas craint de souligner récemment qu'elle était aussi amenée à prendre des mesures contraignantes. Bien évidemment, il a omis d'indiquer que la Corée du Sud vient de franchir la barre des ... 500 morts. 100 fois moins que la France, pour seulement 15 millions d'habitants en moins. Et sans avoir dangereusement mis son économie à l'arrêt ...
Où est l'erreur ? Dans le peuple français, ou dans ses dirigeants ?
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