Reconstruire l'Europe pendant le mandat de Trump
Aujourd'hui, le grand méchant Trump est de retour à la Maison Blanche. Avec lui, son équipe d'élites "anti-élites", qui plonge l’Europe dans l’incertitude. Et si c'était une bonne chose pour le Vieux Continent ?
Si l'on en croit le discours ambiant, comme souvent, ce serait la fin du monde. En l'occurrence, Trump et ses puissants amis propriétaires de multinationales signeraient l'arrivée au pouvoir de l'extrêmisme et du populisme, torpillant au passage les valeurs intrinsèques de l'Union européenne. Entre la multiplication des menaces commerciales, l’affaiblissement des institutions internationales et l’isolement diplomatique, il y a de quoi s’inquiéter. Cependant, cette victoire étant aussi celle du souverainisme et de l'isolationnisme, elle pourrait aussi avoir des effets positifs sur notre autonomie.
L'Europe, sans les États-Unis
Trump n'a que faire de l'Europe, et il l'a fait savoir à de multiples reprises. Lors de son premier mandat, le Vieux Continent avait été réduit à une simple variable d’ajustement dans les rapports géopolitiques, sous la pression de ses priorités nationales et économiques. En 2025, avec une administration Trump 2.0, on ne pourra pas se reposer sur de bons vieux accords transatlantiques pour faire tourner l'Europe. On ne pourra plus tellement compter sur l'OTAN non plus, qu'il fait peser dans la balance des négociations dès qu'il en a l'occasion. De fait, Donald Trump a toujours affirmé que l’Europe devait prendre en charge sa propre défense et se défaire de sa dépendance à l’égard des États-Unis, et il a peut-être raison.
Cette "thérapie de choc" pourrait être l’occasion de nous réinventer, plus indépendants, plus cohérents et plus stratégiques. Que ce soit d'un point de vue économique, géopolitique ou culturel, les pays européens vont devoir, ou pouvoir, se départir des États-Unis, qui jusqu'alors, semblaient peu à peu nous dicter notre conduite. En d'autres termes, les prochaines années risquent d'être mouvementées, mais comme dans toute bonne crise, il y aura aussi un lot d'opportunités que nous pourrions saisir.
Résignation ou coordination
A priori, il y a deux options possibles en termes de stratégie : se débrouiller pour être dans les bonnes grâces de Trump, et espérer en tirer avantage à l'échelle nationale ; ou bien trouver une autre solution, une force ailleurs qu'à l'autre bout de l'Atlantique. La première option est naturellement privilégiée par les partis européens de droite dure, pour qui le nationalisme est une priorité absolue, et c'est bien ce qui risque de désunir le continent, rendant la deuxième option difficilement accessible. Toutefois...
L'autre option, suggérée par le géopoliticien Cyrille Bret dans un article pour The Conversation, repose sur l'idée que les Européens doivent oublier leurs frustrations et se concentrer sur une seule priorité : la coordination. Selon lui, l'Union européenne pourrait trouver dans l'ignorance de Trump un moteur d'unité. Avec des désaccords croissants sur des sujets comme l’Ukraine, l’économie, le climat ou la diplomatie, les Européens seraient contraints de bâtir une politique commune, plus affirmée et plus autonome. Pendant que Trump adoptera ici et là un rapport de force, que ce soit vis-à-vis de la Russie, de la Chine ou du Moyen-Orient, l'Europe pourrait se présenter comme une alternative sérieuse, à condition que ses membres se serrent les coudes. Dans son article, Cyrille Bret explique que "les Européens doivent s’imposer une discipline de fer en matière de coordination sur les principaux dossiers sécuritaires (Ukraine, Israël), économiques (IA, énergie, tarifs douaniers) et diplomatiques (sanctions, dialogue avec le Sud, organisations multilatérales)". En d’autres termes, il s’agit de dépasser l’attitude de simple "suiveur" pour devenir un acteur géopolitique autonome, capable de peser sur les décisions mondiales. Ce dont l'Europe a toujours rêvé, finalement.
Pour ça, il faudrait nécessairement dépasser les peurs et les dissensions internes pour éviter de céder à la tentation de la conciliation et du pragmatisme économique. Sur le long-terme, ce pourrait être l'occasion de relever les pays européens indépendamment du reste, d'abord dans leur unicité, afin de recréer ensuite un continent capable.
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