Interview exclusive : l'hydroxychloroquine ne fonctionne pas en prophylactique nous dit Dr Emily Gibson McDonald
Dans le cadre de nos recherches sur les études liées au SRAS-Cov2, nous avions demandé une interview au co-auteur principal Docteur David Boulware de l’Université de Minnesota. nous avons été orientés vers la co-auteur Emily Gibson McDonald MD MSc FRCPC.
Emily Gibson McDonald est professeur assistant de médecine en médecine interne générale à l'institut de recherche du Centre de santé universitaire Mcgill. Maîtrise en épidémiologie de l'université McGill et j'ai effectué un stage de recherche post-universitaire sur la sécurité des patients et l'amélioration de la qualité. Directeur de l'unité d'évaluation des pratiques cliniques du département de médecine. Elle est co-auteure de l’étude « Un essai randomisé de l'hydroxychloroquine comme prophylaxie post-exposition pour Covid-19 » dont les co-auteurs sont David R. Boulware, MD, MPH, Matthew F. Pullen, MD, Ananta S. Bangdiwala, MS, Katelyn A. Pastick, B.Sc., Sarah M. Lofgren, MD, Elizabeth C. Okafor, B.Sc., Caleb P. Skipper, MD, Alanna A. Nascene, BA, Melanie R. Nicol, Pharm.D., Ph.D., Mahsa Abassi, DO, MPH, Nicole W. Engen, MS, Matthew P. Cheng, MD.
Dans un français parfait, la docteur Emily Gibson répond à nos questions.
FranceSoir : quels étaient les objectifs et les motivations de l’étude ?
EGMD : Je suis professeur à l’Université de McGill au Canada et responsable de l’unité d'évaluation des pratiques cliniques. Nous avions cherché à faire une étude pour répondre aux besoins actuels de traitements sur la SRAS Cov2. L’objectif de l’étude était de tester si l’hydroxychloroquine donnait des résultats positifs en mode prophylactique. Cette étude est une des quatre stratégies pour tester si l’hydroxychloroquine fonctionne ou pas. L’objectif était de voir si ce type d’approche pouvait éviter la propagation du virus après une exposition.
Actuellement c’est la plus grande étude randomisée post exposition contrôlée avec un groupe placébo.
FS : Aviez-vous déjà travaillé avec David Boulware de l’Université du Minnesota ?
EGMD : Non c’est la première fois, et ce sont des circonstances un peu uniques qui font que nous avons travaillé ensemble. Nous avons vu l’annonce sur Twitter du Docteur Boulware qui faisait une étude et cherchait des correspondants. Tout a été fait sur internet.
Nous cherchions à en faire une aussi donc nous avons pris contact avec lui pour voir si l’on pouvait travailler ensemble.
FS : Comment se passe une telle étude ?
EGMD : Nous avons fait un échange de bons procédés. Notre partie était financée sur nos fonds de donateurs. L’équipe du Boulware a aussi reçu des fonds de donateurs. Nous avons partagé les données anonymisées. Nous n’avons pas reçu de rémunération pour cette étude.
FS : Et votre hypothèse de départ sur le traitement à l’HCQ ?
EGMD : Et bien l’HCQ avait montré des résultats encourageants dans le passé sur le virus SRAS Cov1. Donc nous espérions trouver un traitement qui fonctionne. C’est mieux non ?
FS : Quel type de patients avez-vous recruté ?
EGMD : A l’origine l’étude était centrée sur les USA mais là avec notre participation l’univers a été étendu. Les personnes recrutées ont été exposées à une autre personne infectée par le SRAS Cov2. Par exemple une infirmière à qui il manquait un élément des équipements de protection auprès d’un patient qui est ou qui sera quelques jours après testé positif au SRAS Cov2, ou une personne qui a été en contact avec une autre infectée, qui vivait dans la même maison.
Le principal résultat a été le développement des symptômes du Covid19. Tous les participants n'ont pas été testés mais ils ont été inclus s'ils avaient développé des symptômes compatibles tels que la fièvre et la toux.
FS : Comment avez-vous fait le recrutement ? Comment vous êtes vous assuré que les patients avaient bien pris le traitement ?
EGMD : Les patients ont été recrutés par internet et le traitement ou le placebo ont été envoyés par courrier. Pour ce qui est de la vérification de la bonne prise du traitement, c’est encore une des limites de l’étude mais nous avons vérifié directement avec les patients ; en fait, les patients du groupe placebo avaient plus respecté la prise de traitement.
FS : A qui avez-vous prescrit HCQ ?
EGMD : Nous avons donné l’HCQ a des personnes qui avaient été exposées à une autre personne qui a été testée positive au SRAS Cov2 dans un délai de moins de 4 jours après l’exposition.
FS : Quels sont les résultats ?
EGMD : Nous avons fait l’analyse et les résultats montrent qu’il n’y a pas de différences significatives entre le groupe traité HCQ et le groupe placebo. Donc on peut conclure que l’HCQ n’est pas utile en mode prophylactique pour limiter la contagiosité.
Le tableau des résultats est bien celui en annexe S1
FS : Nous avons regardé ce tableau. C’est bien celui-là qui vous permet de conclure ?
EGMD : Oui tout à fait. Il n'y a aucune différence entre le groupe traitement et le groupe placebo, même si nous avons examiné le nombre de jours entre l'exposition et le début du traitement Nous avons regardé pour divers critères âge, pathologies, antécédents et il n’y avait pas de différence non plus.
Donc nous avons fait les tests sur 1 jour,2 jours, 3 jours et 4 jours et aucune différence statistique n’est apparue.
FS : Avez-vous fait les différences statistiques sur les sous-groupes de 1 à 2 jours ou 1 à 3 jours ?
EGMD : Non nous n’avons pas fait ces analyses-là.
FS : Avez-vous fait les tests statistiques ? Quels types de tests statistiques ?
EGMD : Oui nous avons fait les tests statistiques et il n’y a pas de différences significatives. Nous avons évalué l'incidence de la maladie Covid-19 au jour 14 avec le test exact de Fisher. Les résultats secondaires concernant le pourcentage de patients ont également été comparés avec le test exact de Fisher.
FS : Est-ce vous qui avez fait les analyses ?
EGDM : Nous avons envoyé les données anonymisées à l’équipe de David Boulware, et c’est le Docteur Hullsiek qui s’est chargé des études statistiques. Nous avons eu accès aux analyses que nous avons revues et validées car dans une étude comme celle-là, nous sommes tous cosignataires et donc nous devons tous valider. Chaque coauteur a un rôle différent dans l'étude,
mais TOUS les coauteurs doivent assumer la responsabilité de la fidélité des résultats finaux.
FS : Quelles peuvent être les limites d’une telle étude ?
EGDM : Et bien par exemple comme nous avons recruté les personnes par internet, nous avions une population plus jeune (âge moyen 40 ans) et donc peut-être que cette population est moins fragilisée que les plus âgés.
Nous ne sommes pas en mesure de dire si cette stratégie pourrait bénéficier aux personnes âgées souffrant de maladies plus graves et présentant un risque plus élevé de complications liées à l'infection.
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