Pression sur Israel après la mort de sept humanitaires à Gaza, une résolution appelle à un embargo sur les armes livrées à Tel Aviv
Malgré les excuses du président israélien Isaac Herzog pour la mort de sept travailleurs humanitaires de l'ONG américaine World Central Kitchen, Tel Aviv est sous le feu de vives critiques. Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU examine ce vendredi un projet de résolution appelant à un embargo sur les armes pour Israël, évoquant “le risque plausible d'un génocide à Gaza”, tandis que la pression sur le gouvernement britannique pour suspendre ses ventes d’armes à Israël s’accroît. Joe Biden presse Nétanyahou de "conclure sans délai un accord" pour "un cessez-le-feu immédiat", sur fond de “mécontentement croissant” entre les deux alliés. Sur le front, les forces de Tsahal ont annoncé la fin de leur opération et leur retrait de l’hôpital Al-Shifa.
L’ONG Médecins sans frontières (MSF) a dénoncé jeudi 4 avril la “destruction systématique” par Israël du système de santé de Gaza. "Aujourd'hui, nous assistons à la destruction systématique et délibérée du système de santé" de l’enclave palestinienne, a affirmé Amber Alayyan, responsable adjointe des programmes de l'ONG pour le Proche-Orient, lors d'une conférence de presse animée à Genève.
Une situation “pire que catastrophique” après 6 mois de guerre
"Il y a des blessures par écrasement à l'abdomen, au thorax, des amputations des jambes et des bras nécessaires, et en plus de cela, les patients souffrent de graves brûlures", a-t-elle expliqué, affirmant que ces blessures résultent des bombardements et des tirs israéliens.
Selon elle, des médecins assistent "maintenant” à “des enfants blessés par balle" par des tirs de drones.
Cette conférence de MSF intervient quelques jours après le retrait par l’armée israélienne de ses chars de l’hôpital Al-Shifa. Tsahal annonce avoir “éliminé” lors d’affrontements “environ 200” membres présumés du Hamas, mouvement palestinien qui contrôle Gaza depuis 2007. “Les troupes ont achevé une activité opérationnelle dans la zone de l’hôpital Al-Shifa et ont quitté la zone”, précise-t-on dans un communiqué.
Après leur départ, le ministère gazaoui de la Santé a annoncé avoir découvert “des dizaines de cadavres”. “Des dizaines de corps, certains en état de décomposition, ont été retrouvés dans l’enceinte et aux abords de l’hôpital d’Al-Shifa”, explique-t-on, tout en insistant sur les “importants” dégâts matériels sur l’ensemble des bâtiments.
L’armée israélienne a annoncé ce lundi que 600 de ses soldats ont été tués depuis le 7 octobre 2023. Plus de la moitié ont péri lors de l’attaque sans précédent du Hamas en Israël le 7 octobre. Au moins 256 soldats ont, eux, été tués dans la bande de Gaza depuis le 27 octobre, début de l’opération militaire terrestre lancée en représailles. Selon un communiqué de jeudi, le nouveau bilan est de 33 037 personnes tuées et 75 668 blessées depuis le début de la guerre. 62 morts supplémentaires ont été enregistrés entre mercredi et jeudi, selon la même source.
Six mois après le début de la guerre, la situation humanitaire est “pire que catastrophique” selon Dominic Allen, représentant du Fonds des Nations unies pour la population (UNFPA). “Je pense que la situation est pire que catastrophique. Ce que j'ai vu m'a vraiment brisé le coeur. Gaza est devenu un amas de poussière. Les gens que nous avons croisés étaient décharnés, ils nous indiquaient qu'ils cherchaient de quoi manger”, témoigne-t-il à son retour d'une mission d'une semaine dans l’enclave.
L’acheminement de l’aide pour les populations locales, exposées à un risque croissant de famine, est également source d’inquiétude. Lundi 1er avril, sept travailleurs humanitaires de l'ONG américaine World Central Kitchen, qui livre de la nourriture dans la bande de Gaza, ont été la cible d’un bombardement. Le Premier ministre, Benjamin Netanyahou, affirme que la frappe était “non intentionnelle” tandis que le président, Isaac Herzog, a présenté ses “sincères excuses” et “a exprimé sa profonde tristesse". L’armée israélienne a annoncé une enquête qui pourrait prendre plusieurs semaines.
Accord pour un cessez-le-feu: Biden presse Netanyahou
La mort des septs travailleurs humanitaires, originaires d'Australie, de Pologne, du Royaume-Uni notamment, a suscité un vif émoi. Le Conseil des droits de l'homme de l'ONU, qui évoque “le risque plausible d'un génocide à Gaza”, examine ce vendredi un projet de résolution demandant un embargo sur les armes pour Israël. Le texte condamne “le recours par Israël à des armes explosives à large rayon d'action” dans des zones peuplées et demande à Tel Aviv de “respecter sa responsabilité légale de prévenir un génocide”.
Le projet de résolution de huit pages, présenté par le Pakistan, exige aussi “la fin immédiate de l’occupation de territoires palestiniens” et du “blocus illégal” de la bande de Gaza. Le document appelle aussi à cesser tout transfert d'armes, munitions et autres équipements militaires.
La question est au cœur des tensions au Royaume-Uni, où le gouvernement est appelé à réexaminer, voire suspendre ses ventes d’armes, suite à la mort des travailleurs humanitaires. En France, qui a exprimé sa “ferme condamnation”, l’ancien ministre français des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a estimé que Paris devait reconnaître un État palestinien pour faire pression sur Israel. La Chine se dit “choquée”.
Le président des États-unis a exigé de Benjamin Netanyahu dans un appel téléphonique jeudi une "augmentation spectaculaire" de l'aide humanitaire à Gaza, à travers des mesures concrètes "dans les heures et jours qui viennent". Le locataire de la Maison-Blanche a même évoqué la possibilité de conditionner le soutien américain à Israël, dans un contexte de "mécontentement croissant" de la part de Washington face à son allié.
Joe Biden a également pressé Netanyahou de "conclure sans délai un accord" pour un "cessez-le-feu immédiat”. Vendredi dernier, le PM israélien a déclaré qu'Israël retournerait à la table des négociations avec le Hamas en vue d'un cessez-le-feu.
Le chef du Hamas du mouvement palestinien accuse Tel Aviv de tergiverser “obstinément” et de ne pas répondre à des “demandes légitimes”, à savoir “mettre fin à la guerre et à l'agression”. Le retour des Palestiniens déplacés par la guerre et le nombre de Palestiniens emprisonnés devant être libérés dans le cadre de cet accord sont les principaux points de divergence.
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