Nouvelle-Calédonie : une cyberattaque “d’une force inédite” cible le réseau de télécommunications, peu avant l’arrivée de Macron

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France-Soir
Publié le 23 mai 2024 - 07:09
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Des personnes régulent la circulation à un barrage indépendantiste dans le quartier de Magenta Tour à Nouméa, territoire français du Pacifique de la Nouvelle-Calédonie, le 22 mai 2024.
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Emmanuel Macron se rend-il en terrain hostile ? Peu après l’annonce de sa visite en Nouvelle-Calédonie, théâtre d’une crise politique marquée par des émeutes violentes et des pertes humaines, une cyberattaque “d’une force inédite”, visant à “saturer le réseau calédonien”, a ciblé l’archipel. Un membre du gouvernement précise que cette tentative a été stoppée avant “qu’il y ait des dégâts importants”, l’imputant à la Russie. L’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) appelle à “l’extrême prudence”, quant à son origine.  

Les émeutes ont éclaté cela fait une dizaine de jours en Nouvelle-Calédonie, en réponse à une réforme constitutionnelle votée par l'Assemblée nationale française, visant à modifier le corps électoral local. La réforme, qui prévoit de dégeler les listes électorales pour les élections provinciales pour permettre à de nouveaux résidents de voter, est vivement contestée par des indépendantistes kanaks.  

La Russie pointée du doigt, l’ANSSI appelle à la prudence 

L’état d’urgence a été décrété mercredi 15 mai dernier, suite à trois jours de violences qui ont causé cinq morts, dont deux gendarmes, et des centaines de blessés. Mais pour l’administration de la ville de Nouméa, capitale calédonienne, c’est "beaucoup trop tôt" pour établir un bilan global des dégâts. Des quartiers restent inaccessibles pour ses agents et le Haut Commissariat a indiqué dans son communiqué que "plus de 90 barrages ont déjà été neutralisés et sont progressivement nettoyés". 

Jusque-là, selon la déclaration du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, mardi devant les députés, six personnes ont été tuées et 84 policiers et gendarmes ont été blessés. Le même jour, peu après le Conseil des ministres, une visite du chef de l’État est annoncée, pour mercredi soir ou jeudi matin. Son avion a décollé en début de soirée du mardi. Le président, qui entend faire accélérer un retour à l’ordre et faciliter la reprise du dialogue, prévoit d’installer une “mission” en Nouvelle-Calédonie, selon la porte-parole du gouvernement, Prisca Thevenot.  

Si la nuit du mardi à mercredi dans l’archipel “a été plus calme que la précédente” malgré deux incendies dans l’agglomération de Nouméa, qui ont ravagé deux écoles et les 300 véhicules d’un concessionnaire, le réseau calédonien a subi une cyberattaque. Selon Christopher Gygès, membre du gouvernement collégial de la Nouvelle-Calédonie, la force de cette opération était “inédite” et visait à “saturer le réseau” à travers l’envoi, simultané, de “millions d’emails”.  

L’attaque n’a pas provoqué “des dégâts importants”, ayant été contrée, poursuit-il. “Un fournisseur d’accès à internet a subi une attaque de l’extérieur sur une adresse IP avec le but de saturer le réseau calédonien”, explique-t-il durant une conférence. “Des millions d’emails ont été envoyés de manière simultanée sur une adresse mail”, affirmant que les “équipes de l’État et de l’OPT (Office des postes et télécommunications, NDLR) ont réussi à stopper cette attaque avant qu’il y ait des dégâts importants”.   

Christopher Gygès impute cette cyberattaque “par déni de service”, qui vise à saturer un serveur par l’envoi continu de requêtes, à la Russie. Mais l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) relativise son ampleur. Il s’agit d’une opération qui n’a duré que “quelques heures”, insuffisante pour provoquer des “conséquences dans la durée”.  “Il n’y a pas d’intrusion dans les systèmes d’information de l’opérateur concerné, ni de ses différents clients”, explique-t-on. Mais l’Anssi appelle surtout à “l’extrême prudence” quant à l’origine de la cyberattaque.  

L’état d’urgence maintenu, TikTok censuré 

Le gouvernement français, lui, pointe du doigt l’Azerbaïdjan. Du moins, Matignon. Jeudi dernier, Gérald Darmanin a ouvertement accusé le pays, proche de Moscou, de soutenir les indépendantistes. “Sur l’Azerbaïdjan, ce n’est pas un fantasme, c’est une réalité”, a-t-il affirmé, déplorant “qu’une partie des indépendantistes calédoniens aient fait un deal avec” ce pays. Une accusation rejetée par Bakou.  

Quant à la visite du chef de l’État, elle est aussi bien attendue en France qu’en Nouvelle-Calédonie. Son ancien Premier ministre, Edouard Philippe, réputé être spécialiste du dossier, attend d’Emmanuel Macron des “annonces à la hauteur”. "La situation est terriblement triste et dangereuse. La France, qui a une relation compliquée avec son histoire coloniale, a une possibilité de trouver une solution originale, même si c'est plus difficile qu'il y a trois mois", estime-t-il.  

Paris maintient les mesures décrétées depuis le début des émeutes, comme le couvre-feu nocturne, l’interdiction des rassemblements et du transport d'armes, la vente d'alcool et surtout, la censure de l'application TikTok. Envisagée dans la Métropole durant l’été dernier après les violentes émeutes qui ont suivi la mort de Naël, la censure des réseaux sociaux est déjà appliquée outre-mer.  

Les politiciens calédoniens non-indépendantistes ont appelé à la poursuite de l’examen de la réforme constitutionnelle, estimant que son retrait serait “une erreur gravissime” qui “donnerait raison aux casseurs, aux pilleurs et aux émeutiers”. Mais des élus du même camp exhortent le gouvernement français à suspendre le projet momentanément ou son report, pour permettre de renouer le dialogue.

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