Stopper l'escalade
CHRONIQUE — Dans "L'odeur du monde a changé", ce dont à l'évidence personne ne peut se réjouir, j'ai comparé l'invasion de l'Ukraine à celle de la Tchécoslovaquie en 1968.
Dans ma mémoire, j'avais gardé cette idée fondamentale que le général de Gaulle avait considéré qu'en aucune façon la mise au pas du printemps de Prague ne devait faire obstacle à la politique de détente, d'entente et de coopération qu'une France ombrageuse de son indépendance nationale entendait mener envers l'est du continent.
Une brève recherche m'a permis d'en trouver l'illustration. Et, si on a coutume de dire que comparaison n'est pas raison, dans les temps compliqués que nous vivons comparaison serait assurément raison.
Dans les "Lettres, notes et carnets" (Juillet 1966-Avril 1969) du général de Gaulle, figure une Réponse à la communication orale du gouvernement soviétique présentée à la présidence de la République par M. Zorine, ambassadeur d'URSS, au sujet de la Tchécoslovaquie, datée du 24 août 1968.
On peut d'abord y lire que « le gouvernement français ne peut qu'estimer non conforme au droit international une action qui porte atteinte aux principes de l'indépendance des États et de la non-intervention dans les affaires intérieures », puis que « cette politique des blocs conduit à méconnaître le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes et fait régner sur le monde un état de tension qui met en danger la paix ».
Pour autant, la France n'entend pas changer sa politique de non-alignement sur les deux grandes puissances qui se partagent alors la domination du monde : les États-Unis et l'Union soviétique.
« En différentes occasions, une autre politique avait été dessinée, celle de la détente, de l'entente et de la coopération européennes, qui serait suivie en toute indépendance par les peuples de notre continent. La France, pour sa part, y reste attachée. Elle souhaite que l'Union soviétique, par le retrait de ses forces hors du territoire de la Tchécoslovaquie et par la possibilité rendue à son peuple de disposer de lui-même, choisisse la même voie. Elle le souhaite d'autant plus vivement que le développement de ses rapports d'amitié et de coopération avec la Russie répond à ses propres sentiments ainsi qu'à l'intérêt fondamental de l'Europe tout entière et de la paix. »
Voilà pour les grands principes qui pourraient encore, qui devraient même, inspirer une politique d'indépendance nationale résolue, permettant à la France de jouer un rôle majeur et de faire entendre une voix libre et désintéressée dans le concert des nations.
Pour l'heure, il faut mettre fin à l'escalade. L'escalade militaire, du côté russe. L'escalade verbale du côté de l'Occident, très éloignée — on le voit ! — de la position française en 1968 (la France "souhaitait" le retrait des forces russes de Tchécoslovaquie), et qui a amené Vladimir Poutine à évoquer la menace nucléaire. Quand on sait, et surtout quand on affirme que l'on n'enverra pas ses armées en Ukraine, il ne sert à rien de brandir un sabre de bois.
De toutes les manières, il faudra mettre un terme à cette guerre et le plus tôt sera bien sûr le mieux. C'est pourquoi il n'était pas utile de dire, comme l'a fait M. Macron au salon de l'agriculture, que la guerre serait longue.
Parce qu'il n'y a pas de guerre qui ne se termine pas, il faut que la diplomatie entre en jeu le plus tôt possible. Éric Zemmour vient de proposer une médiation auprès de Vladimir Poutine conduite par Nicolas Sarkozy et Hubert Védrine. Pour ma part, j'avais songé à une médiation menée par Nicolas Sarkozy et Angela Merkel.
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.