Stop à la psychose Internet  ! Analyse des vidéos de François Asselineau et Youssef Hindi sur la Worldwide Freedom Initiative

Auteur(s)
Lucien Cerise pour France-Soir
Publié le 24 janvier 2024 - 15:41
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Worldwide Freedom Initiative Philippot
Crédits
Adrien Lapeyrere / France-Soir
Adrien Lapeyrere / France-Soir

TRIBUNE - Le 10 novembre 2023, des représentants et sympathisants de Donald Trump et du Parti républicain américain organisaient à Paris la conférence Worldwide Freedom Initiative – Initiative mondiale pour la liberté – sur une ligne politique conservatrice et antimondialiste. Cet événement déclenchait aussitôt des commentaires négatifs émanant de médias conventionnels, mais aussi de publicistes critiques de ces médias, tous ayant pour dénominateur commun de n'avoir pas assisté à l’événement ! France-Soir vous propose ci-dessous une tribune de Lucien Cerise en forme de réflexion sur ce type de dérive, qui a toujours existé, mais que le virtuel et Internet amplifient sans limites, ni garde-fous.

TRIBUNE - La psychose est un trouble mental caractérisé par une altération du rapport entre la subjectivité et la réalité objective. La limite entre les deux, c’est-à-dire entre l’intérieur – ce que veut le sujet, son désir – et l’extérieur, le monde réel tel qu’il est – devient floue, et la subjectivité finit par l’emporter et devenir toute-puissante. C’est le moment du délire, de la reconstruction subjective de la réalité, quand le sujet ne tient plus compte d’aucune extériorité à son discours, et qu’il élabore dans le langage une réalité personnelle à sa mesure, selon ses besoins fantasmatiques et son principe de plaisir, en contournant les faits objectifs et la discipline consistant à vérifier les informations. Ou alors, en ne sélectionnant que les informations qu’il estime attester de sa théorie – phénomène du biais de confirmation aboutissant à ce que son univers mental personnel se superpose complètement au monde réel. Comme on dit couramment : il prend ses désirs pour des réalités.

L’illusion de la réalité objective sans sortir de chez soi

Ces mécanismes hypertrophiés jusqu’à la maladie chez le psychotique sont latents chez tout individu, mais sont amplifiés de nos jours par Internet, cette immense médiathèque de données numériques en ligne, qui peut donner l’illusion d’avoir accès à la réalité objective sans jamais sortir de chez soi. Pour certains analystes, nous serions entrés dans l’ère de la post-vérité et du monde post-factuel, soit le subjectivisme déchaîné. La banalisation de cette psychose Internetdans la population avait été baptisée en son temps hyper-réalité par Jean Baudrillard, lequel désignait ainsi ce phénomène de construction d’une réalité parallèle au monde réel par les médias de masse, mais aussi par les critiques des médias de masse, quand tous se commentent mutuellement sans vérifier leurs sources, et élaborent ainsi ensemble une réalité virtuelle aux apparences polémiques, donnant l’illusion du débat contradictoire, mais sans rapport avec le terrain et les faits. On assiste de nos jours à une épidémie de fausses nouvelles, diffusées par les médias conventionnels, mais aussi par certains individus critiques de ces médias, positionnés comme lanceurs d’alerte et leaders d’opinion, mais n’ayant pas accès à toutes les informations, et remplissant les trous avec des théories personnelles, qu’ils érigent immédiatement en vérités objectives. Un certain public peut prendre au sérieux cet alliage d’erreurs et de commentaires d’erreurs, articulés dans un discours apparemment rationnel et contradictoire, ce qui fait entrer les médias, les commentateurs critiques des médias et le public dans une hyper-réalité, soit une réalité virtuelle partagée, une sorte de folie à plusieurs, où les critiques des uns n’ont pas plus d’appui dans le réel que les affirmations des autres.

Le Worldwide Freedom Initiative, cas d'école de “psychose Internet”

Un cas décole de cette psychose Internet", nous a été donné en novembre 2023 par les commentaires de François Asselineau (1), d’une part et, d’autre part, de Youssef Hindi, interrogé par Éric Verhaeghe pour Le Courrier des Stratèges (2), sur la réunion de la Worldwide Freedom Initiative le 10 novembre 2023 à Paris. Un article du quotidien Sud-Ouest intitulé Que viennent faire Zemmour, Dupont-Aignan ou Philippot au meeting des soutiens de Trump ce vendredi à Paris ? (3), comportant de nombreuses erreurs factuelles, a été repris sans le corriger, créant un effet boule de neige de désinformation, ouvrant un espace de pensée apparemment critique, mais baignant dans l’arbitraire du début à la fin. Cette bulle spéculative s’apparente aux phénomènes de rumeurs et de légendes urbaines colportées par ouï-dire et sources secondaires. Une représentation individuelle composée d’informations fausses trouvées sur Google peut devenir une véritable hallucination collective quand le sujet parvient à partager son récit, sa vision, et à convaincre autrui de ne pas chercher à vérifier ce qu’il dit. C’est le grand remplacement du réel par le virtuel. Tout le monde se met à parler sérieusement de quelque chose qui n’a pas eu lieu, d’où une inflation polémique produisant un effet de réalité, mais sans consistance autre que verbale, qui l’apparente à un long bavardage sans intérêt du type dialogue de sourds.

Le “fact checking” doit s’étendre aussi aux commentateurs critiques des médias

Comme le notait Walter Lippmann dans son ouvrage sur l’opinion publique en 1922, Pour faire de la propagande, il faut qu’il y ait une barrière entre le public et l’événement. L’accès à l’environnement réel doit être limité, avant que quiconque puisse créer un pseudo-environnement qu’il juge sage ou souhaitable. (Public Opinion, partie II, chap. II, section 3). Ce pseudo-environnement – cette pseudo-réalitérecouvrant l’environnement réel, est aujourd’hui construit brique après brique par les médias de masse, mais aussi par leurs critiques et par le public crédule, répétant et prenant parti pour les arguments des uns ou des autres, prononcés avec aplomb et assurance, mais tous aussi fictifs les uns que les autres. La barrière de Lippmann entre le public et l’événement réel permettant d’élaborer une propagande efficace s’étend dans ce cas à tous ceux qui parlent de l’événement réel sans avoir été sur place, et qui reconstruisent la réalité sur la base de perceptions déjà déformées. Florian Philippot, qui participait à l’événement Worldwide Freedom Initiative, a déjà répondu de son côté aux attaques de François Asselineau (4). À notre demande, les organisateurs de l’événement ont rédigé également un droit de réponse pour rétablir la vérité factuelle, condition sine qua non avant tout débat (5). 

Des erreurs ou des mensonges deviennent des vérités si on ne les corrige pas. Sans correction, ni rétablissement des faits, les désinformateurs, volontaires ou non, ont le dernier mot, et c’est leur version de la réalité qui fait foi et qui passe à la postérité comme étant LA réalité. C’est le dernier qui a parlé qui a raison. Ce débat peut être élargi à un problème philosophique plus vaste : qui écrit l’Histoire, le récit de ce qui s’est passé, et qui définit la réalité ? Le langage a une fonction performative. La parole est créatrice. Or, aujourd’hui, des milliers de gens risquent de tenir pour des faits historiques avérés les spéculations personnelles de François Asselineau ou de Youssef Hindi interrogé par Éric Verhaeghe sur cette réunion politique franco-américaine du 10 novembre 2023 (6).

Le fact checking s’applique naturellement aux médias, mais doit s’étendre aussi aux commentateurs critiques des médias, dont la crédibilité suppose désormais de tenir compte des correctifs de la Worldwide Freedom Initiative. Cette mise au point permet de restituer la base empirique qui autorisera de lancer un vrai débat contradictoire et de s’opposer éventuellement à cette initiative, mais en s’appuyant sur le réel, et non sur sa reconstruction subjective. La bouffée psychotique qui a entouré l’événement du 10 novembre 2023 ne serait pas inquiétante si elle était isolée mais la fréquence et l’amplitude de ce genre de phénomène doit nous alerter sur cette société du virtuel et des écrans omniprésents qui fait peser une vraie menace sur la santé mentale de nos contemporains (7).

 

(1)Accourus au coup de sifflet de Zemmour et d'Oncle Sam, Dupont-Aignan et Philippot jettent le masque (Youtube).

(2) Youssef Hindi : comment le Deep State US contrôle les souverainistes français 

(3) Que viennent faire Zemmour, Dupont-Aignan ou Philippot au meeting des soutiens de Trump ce vendredi à Paris ?  (Sud-Ouest).

(4) Israël, Macron : ATTALI balance tout ! (+ réponse aux diffamations d’Asselineau, en direct)  (Youtube).

(5)  Nos vœux pour Monsieur Asselineau en 2024 : qu’il vérifie ses sources d’information !  (WFI).

(6) Proposition de bonne résolution pour 2024 à Youssef Hindi et Éric Verhaeghe : évitez les fake news ! (WFI).

(7) François Asselineau : Florian Philippot veut me tuer et il a fait partie du complot contre nous’” (Putsch).

 

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