L’hydroxychloroquine, la censure, la Résistance Française, un manuel pour la réélection de Trump et les bons Allemands

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Filipe Rafaeli pour FranceSoir
Publié le 31 août 2020 - 19:31
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Resistance
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TRIBUNE : En 1941, alors que la France était occupée par les Allemands, le journal clandestin Défense de la France - FranceSoir est né dans une cave de la Sorbonne à Paris, fondé par Robert Salmon et Philippe Viannay puis porté par François Lazareff.

De jeunes journalistes de la résistance voulaient dénoncer le gouvernement fasciste d’occupation alors au pouvoir en France. Ils avaient compris l’importance de combattre le récit officiel. Bravant héroïquement la censure, ils distribuèrent quotidiennement 450 000 exemplaires de leur journal en 1944. FranceSoir revendiquait une phrase du philosophe Blaise Pascal : « Je ne crois qu’aux histoires dans lesquelles les témoins seraient tués ». Nombreux sont ceux à avoir connu ce destin.

En plus du journal, ils imprimèrent aussi des documents en soutien aux Juifs persécutés. Ces journalistes étaient, sans aucun doute, des « hommes bons ». Sans eux, ce sont plus de 60 000 Juifs français qui auraient sans doute été envoyés dans les camps de concentration.

Chaque dictature se doit de contrôler sa version de l’histoire. C’est la règle. Clairement, les gens ne doivent pas savoir ce qui se passe. C’est ce qui s’est pratiqué pendant la Seconde Guerre mondiale. Avec une seule version des faits, une partie des Français, trompés, ont soutenu le régime, puis furent condamnés pour complicité avec l’occupant. Ils avaient accepté ce qui n’était pas naturel, le fascisme, comme naturel.

Aujourd’hui, un récit officiel a pris place dans les pays occidentaux. Il met en scène le coronavirus, la plus grande menace du moment, a déjà entrainé la mort de plus de 800 000 personnes, et l’économie mondiale dans une immense crise.

Ce récit affirme qu’il n’y a pas de traitement contre la Covid-19. Il raconte que l’hydroxychloroquine n’est soit pas efficace, soit pas scientifiquement prouvée. Il conclut aussi à la dangerosité et aux effets secondaires graves causés par le médicament, depuis des arythmies cardiaques mortelles jusqu’à la cécité.

Le problème de cette version de l’histoire est que ses arguments sont erronés et facilement réfutables. L’hydroxychloroquine est connue depuis 65 ans. Au cours de sa longue utilisation, de nombreuses études ont été réalisées sur ce médicament.

Par exemple, une étude de 2003 a conclu qu’en dessous d’une utilisation continue pendant six années d’affilée, personne n’a eu sa vision altérée. Cette autre étude de 2019 montre que seulement 0,68% des personnes développent une altération partielle de la vision entre la 5e et 7e année d’utilisation continue.

Sur les risques cardiaques, une étude de 2018 affirme que l’hydroxychloroquine réduit en fait les risques cardiovasculaires. C’est exactement le contraire du message qui nous est servi en ce moment et qui a entraîné une forme d’hystérie généralisée. Même quand l’hydroxychloaquine est prise avec de l’azithromycine.

Dans le même temps, les médias traditionnels tentent d’imposer l’idée qu’il existe un consensus parmi les scientifiques, comme si l’utilisation de ce médicament était déjà un sujet clos, que l’on était passé à autre chose.

Devant cette incohérence, j’ai décidé de poursuivre mes recherches, dans les sources et les faits. Lire les études, suivre les tweets des scientifiques et des journalistes, c’est comme apprendre de conversations en coulisses. Je suis cette histoire depuis le début. La grande majorité des gens ont décidé de ne pas la suivre ; après tout, l’idée a été défendue par Trump, et il ne dit que des bêtises quand il parle de science.

Tous ceux qui disent que cela fonctionne sont censurés et attaqués

Le professeur Didier Raoult, infectiologue à Marseille en France, a proposé un traitement combinant l’hydroxychloroquine et l’azithromycine, un antibiotique. Le Pr. Raoult est un scientifique reconnu au sein de sa communauté, lauréat de nombreux prix. Il a une réputation internationale de haut niveau. Il a publié près de 3000 articles scientifiques selon PubMed.

Il est traité comme un charlatan dans les médias grand public et sur des sites spécialisés. Le site « For Better Science » de Leonid Schneider, journaliste scientifique de Francfort, a été l’un des premiers à produire un article extrêmement décevant. Oui, le Pr. Raoult a connu des controverses, mais rien de grave. Leonid Schneider se présente comme un journaliste scientifique indépendant et promet de faire entendre la voix des bons scientifiques contre le pouvoir et l’argent.

Coïncidence, quand on recherche le Pr. Raoult sur Google, des histoires négatives apparaissent avant sa page Wikipedia. A mes yeux, c’est comme si en faisant une recherche sur Lewis Hamilton, les premiers liens renvoyaient à des analyses approfondies de l’erreur grotesque qu’il a commise pendant le Grand Prix de Chine en 2007, ce qui construirait un récit dans lequel Lewis ne sait pas conduire une voiture.

Ce n’est pas ce qui se passe dans la réalité. Lorsque vous recherchez Lewis Hamilton sur Google, son compte Twitter puis sa page Wikipedia s’affichent en premier.

« Remède miracle » est l’expression péjorative utilisée dès qu’une personne ose utiliser ou parler de l’hydroxychloroquine. Aux États-Unis, le docteur Vladimir Zelenko de New-York n’a cessé d’être qualifié de guérisseur. Ses vidéos sur youtube ont été censurées.

Simone Gold, urgentiste américaine, est l’un des leaders du collectif American Frontline Doctors. Ces médecins se sont réunis et ont donné une conférence de presse. La vidéo a obtenu 17 millions de vues avant d’être censurée par Facebook et Twitter. Pour quelle raison ? Les fact-checkers ont estimé que ces médecins présentaient de fausses informations.

Oui, c’est l’étrange situation dans laquelle nous nous trouvons actuellement : les journalistes de fact-checking décident de ce que les médecins et les scientifiques peuvent ou ne peuvent pas dire sur les réseaux sociaux. Peu de temps après, Simone a été licenciée de son poste. Même le « clandestine newspaper », le site du collectif, a vu son hébergement Web définitivement suspendu.

Harvey Risch, professeur à Yale, a suivi l’avancée de la recherche sur l’usage de l’hydroxychloroquine contre la Covid-19, l’a analysée et a conclu que le traitement devait être immédiatement utilisé. Cela sauverait de nombreuses vies, a-t-il affirmé. Il a bientôt été attaqué lui aussi, ce qui a ultérieurement été réfuté dans un solide article.

Aujourd’hui, nous avons atteint une situation grotesque dans laquelle des scientifiques en arrivent à produire des études non signées pour éviter de devenir des cibles.

Cui bono ?

Toute enquête se pose d’abord la question, le point de départ : pour qui est-ce important ? Ici, qui a intérêt à disqualifier l’hydroxychloroquine ?

La première disqualification facile est venue de l’absence d’un essai clinique randomisé (RCT), en double aveugle, évalué par des pairs, publié dans une revue réputée. C’est l’« étalon-or de la science ». Sans ces études, il n’y a aucune preuve scientifique.

Depuis, des choses incroyables se sont produites. Les deux revues les plus respectées dans le monde médical, le Lancet et le New England Journal of Medicine, ont publié deux études frauduleuses. Qui disqualifiaient l’hydroxychloroquine. C’est le plus grand scandale de la science moderne. Ces études ont été rapidement rétractées.

Une inversion sans précédent entre les valeurs de gauche et de droite

La droite n’est pas claire, utilise les fake news, est traditionnellement anti-science, crée des théories du complot telles que les infiltrations communistes au sein des universités et le marxisme culturel, nie le réchauffement climatique, est anti-vaccin et protège les intérêts des grandes entreprises.

La gauche se fonde sur la science, écoute les experts, les universitaires, fait des discours pro-scientifiques passionnés et dénonce les puissances maléfiques du capitalisme, quand les entreprises mettent l’intérêt de leurs profits au-dessus de ceux de la collectivité.

La droite, aux États-Unis avec Trump, et au Brésil avec Bolsonaro, préconise un traitement générique bon marché qui n’enrichira personne et coûte 10 $ par patient.

La gauche défend l’utilisation de ce traitement seulement s’il est validé par le plus haut niveau de preuves scientifiques, des « essais cliniques randomisés, en double aveugle, évalués par des pairs, publiés dans une revue réputée ».

Cette position est parfaite si l’on veut défendre les intérêts des grandes sociétés pharmaceutiques. La confiance aveugle dans l’opinion des scientifiques, sans comprendre leurs motivations et leurs egos, a fait perdre son sens critique à la gauche.

C’est une mauvaise posture.

Cet article de 2005 de Richard Smith explique que « les revues médicales sont une extension de la branche marketing des entreprises pharmaceutiques». Et cet article de 2018 explique que cet « étalon-or » n’est pas aussi brillant que celles-ci le prétendent.

Le traitement proposé par le Pr. Raoult parle de l’utilisation de l’hydroxychloroquine et de l’azithromycine dès l’apparition des premiers symptômes.

Aujourd’hui, nous avons 82 études observationnelles, dont 47 ont été évaluées par des pairs. En prophylaxie, pré-exposition et post-exposition, et en traitement précoce, nous avons des résultats positifs à 100% pour le traitement à l’hydroxychloroquine. Dans le traitement des patients à un stade avancé de la maladie, où aucun antiviral n’a beaucoup d’effet, 60% des études recommandent le médicament.

« Où est le RCT positif ? » La question se veut mettre fin au débat. Il s’avère que personne ne veut réaliser cette étude du traitement précoce avec l’hydroxychloroquine et l’azithromycine, proposé par Didier Raoult.

L’étude est coûteuse et nul n’a intérêt à la financer. Peu de temps après la publication des fausses études dans le Lancet et le NEJM, l’étude du NIH[AC2] , en tout point conforme à l’utilisation à un stade précoce de la maladie que préconise le Pr. Raoult, a été annulée.

Vous voulez connaître le résultat des élections américaines ? Regardez du côté de la science

Donald Trump a parié sur l’hydroxychloroquine. Mais tout le monde doit prouver, tout le temps, que Trump a tort. Plus de 180 000 Américains sont morts.

Trump a insisté à plusieurs reprises. Si la « confirmation scientifique » intervient avant les élections, Trump surfera sur tous ses adversaires et sera facilement réélu. Sa position est simple : il dira que l’opposition a décidé de laisser les gens mourir au lieu de reconnaître qu’il avait raison de parier.

S’il ne « prouve » pas sa position, Trump sera le pire leader mondial dans la gestion de la pandémie et il ne sera pas réélu.

La confirmation scientifique et la réélection de Trump sont dans un tiroir du NEJM, mais les très mauvais services de renseignement américain ne le savent pas

Pour les scientifiques fondamentalistes, la valeur maximale correspond aujourd’hui aux études randomisées, contrôlées, évaluées par des pairs et publiées dans des revues médicales prestigieuses.

Partager le lien de l’étude de David Boulware de l’Université du Minnesota, publiée dans le New England Journal of Medicine, est la dernière preuve définitive en date pour toute personne désirant soutenir la thèse de l’inefficacité de l’hydroxychloroquine. Les gens ignorent les diverses études observationnelles positives et affirment que l’étude Boulware présente un niveau de preuves plus élevé.

C’est l’argument sans appel des anti-hydroxychloroquine.

L’étude Boulware est très mauvaise, mais elle a servi le récit attendu. Elle est déficiente au niveau des tests d’identification du coronavirus, le traitement a été envoyé par la poste, à des personnes dont on n’est pas sûre qu’elles avaient contracté le virus, et la communication avec ces patients s’est faite sur Internet.

Oui. Une enquête réalisée sur Internet est devenue une référence dans le monde pour estimer si un médicament fonctionne ou non.

Même avec un résultat positif, ce n’était pas statistiquement significatif. L’étude menée par 22 auteurs conclut que le médicament est inutile.

Il était question de prophylaxie post-exposition : une personne en contact avec une personne infectée commence à prendre de l’hydroxychloroquine pour se protéger de la maladie.

Certains ont pris le médicament le lendemain de l’exposition. D’autres le deuxième, le troisième ou le quatrième jour. Boulware a réuni tout le monde, calculé et conclu que cela ne fonctionne pas.

Ce qui est intéressant dans les travaux scientifiques, c’est que les chercheurs ont l’obligation de donner accès à toutes leurs données. Avec celles de Boulware, Marcio Watanabe, professeur de statistiques à l’Universidade Federal Fluminense à Rio de Janeiro, a pu refaire les calculs et produire une étude qui est une bombe incendiaire pour la politique américaine.

Celui qui a pris le médicament le premier jour après l’exposition a statistiquement eu un résultat très positif. C’est une confirmation par « le plus haut niveau de preuves scientifiques ».

Watanabe a envoyé son étude au New England Journal of Medicine il y a plus d’un mois. Il s’agit d’une révision qui modifie le résultat de l’étude Boulware. Elle est perdue là-bas. Visiblement, au NEJM, confortablement aligné avec le récit officiel, on n’y a prêté aucune attention.

Personne ne veut faire d’études randomisées. Dans les rares qui existent, un changement de résultat signifie un changement complet du récit en faveur du médicament.

Le fait qu’encore une étude « hautement crédible » publiée par le NEJM ait dû être modifiée en raison de ses fausses conclusions signifie une réélection facile pour Donald Trump. Après tout, il avait raison dans son pari. La précédente publiée dans le NEJM a dû être supprimée tant c’était une honte.

Comment les adversaires de Trump pourront-ils dire que l’étude négative sans appel n’a désormais plus de valeur avec d’autres résultats ?

Vont-ils critiquer l’étude et essayer de dire qu’elle n’était pas bonne ? Le récit explose comme une bombe.

La pression publique exercée par Trump oblige le NEJM à répondre et changer le résultat de l’étude. Il n’y a aucun risque pour Trump ; ce sont juste des mathématiques. L’appel des scientifiques en faveur de la révision a jusqu’à présent été ignoré. C’est un « changement de donne ».

Trump ramène ainsi le récit à lui, et finalement au monde entier, dans un effet en cascade ; le médicament est confirmé, sauvant des vies.

Les bons Allemands

Lors des élections au Brésil en 2018, avec Bolsonaro, ses tendances fascistes à l’oeuvre, certaines voix ont alerté. L’Allemand Oliver Stuenkel, professeur d’université en relations internationales, a écrit un mémorable article dans l’édition brésilienne du journal espagnol El Pais : « Pourquoi nous avons voté pour Hitler ». Il y explique toutes les erreurs commises par le peuple allemand dans les années 1930.

Les Allemands se considèrent à juste titre comme ayant l’obligation morale d’enseigner au monde les erreurs, les dangers et les omissions qu’ils ont subi dans le passé. Comme l’a expliqué l’immortel Bertold Brecht, le fascisme est « une chienne qui est toujours en chaleur ».

Comme les médecins et les scientifiques censurés sur Twitter, YouTube et Facebook, j’ai subi la censure. Mon article « Hydroxychloroquine : l’histoire que ça ne fonctionne pas est le plus grand canular de l’histoire humaine récente » a été censuré sur Medium.com.

C’est un long texte. Il faut une heure pour le lire. J’y montrais les faits et expliquais, de façon chronologique, ce que j’ai observé et pensé des faits. Je l’ai publié en portugais et en anglais.

Les premiers jours, mon article a été peu lu. Puis il est rapidement devenu viral. 55 000 vues pour la version anglaise et 25 000 pour la version portugaise. Il a été lu par des personnes importantes.

Mon grand-père a été arrêté au Brésil pendant la dictature, en place de 1964 à 1985. Armés de mitraillette, des militaires l’ont emmené dans une voiture. Il a été accusé d’être un rebel.

Hollywood fait plusieurs films où il tente de me convaincre que les États-Unis sont la terre de la liberté. Mon pays a une histoire de dictatures. Les États-Unis non. (Peut-être parce qu’il n’y a pas d’ambassade des États-Unis aux États-Unis).

Malgré tout, au Brésil, je n’ai jamais subi la censure. J’ai été censuré sur un outil numérique américain.

Stuenkel a expliqué ce à quoi les régimes autoritaires pourraient mener. La censure n’est qu’un début. Les livres sont d’abord brûlés, les gens suivent.

Allemand aussi, Leonid Schneider, du célèbre site « Pour une meilleure science », incapable de répondre de manière logique à mon article, et voyant que j’avais été censuré, a préféré se réjouir et satisfaire son ego. Un Allemand qui ne résiste pas à la censure ! Avec calme, je réponds : si une « science meilleure » préoccupait Leonid, celui-ci exigerait une réponse du NEJM à l’étude de Marcio Watanabe.  Ce n’est pas le cas.

Peu de temps après avoir été censuré, un Américain d’Atlanta, irrité par la censure exercée par Medium, a créé un site web pour publier mon article. Il avait déjà prévu qu’il serait censuré et en avait fait une copie.

Un ami m’a appelé en me disant que mon article était au sommet de l’industrie pharmaceutique. « ll va bientôt exploser », me prévint-il.

La censure subie m’a rappelé un mauvais souvenir historique. Je me suis sentie violé. Ironiquement, j’ai été sauvé par un journal qui est né en évitant la censure.

FranceSoir a publié mon article en Français. Le journal n’est plus le même qu’à son apogée. Aujourd’hui, il est numérique et peu de gens y travaillent. « Mais nous avons le même esprit de résistance », a déclaré Xavier Azalbert, son directeur de publication.

Ce fut néanmoins un petit plaisir de voir l’un de mes articles publié dans un journal où Jean Paul Sartre, Robert Salmon, Pierre Lazareff et Philippe Viannay ont écrit.

Une fois la censure révolue, une question demeure : Donald Trump veut-il être réélu ?

Mon premier article sur l’hydroxychloroquine :
en anglais,
en français,
en portugais.

 [AC1]De l’hydroxychloroquine, la censure, la résistance française, la réélection de Trump et les bons Allemands

 

 

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