Uncle Ben’s, tête-de-nègre, …, emblèmes ou victimes d’une évolution profonde de la communication ?
Les manifestations mondiales contre le racisme de cette année 2020 ont conduit de nombreuses entreprises à revoir en profondeur leur stratégie de communication. Et la bataille ne fait que commencer.
La firme américaine Mars Inc. a officialisé, en ce mois de septembre, le changement de nom de sa célèbre marque de riz Uncle Ben’s, qui deviendra dans les mois à venir, Ben’s Original. L’entreprise avait annoncé en juin dernier réfléchir à ce changement, suite à la multiplication des manifestations antiracistes organisées après la mort de George Floyd.
Faire disparaitre les stéréotypes raciaux, un enjeu essentiel pour les marques
Uncle Ben’s était comme bien d’autres critiqué sur les réseaux sociaux, en raison des stéréotypes raciaux véhiculés par ce majordome noir. L’emblème de la marque renvoyait à cette image de la servitude et de l’esclavage, et toute évocation de l’injustice sociale et raciale est désormais jugée intolérable par les consommateurs.
La marque n’est pas la première à se voir imposer un changement d’image. Aux Etats-Unis, dans la foulée des Black Lives Matter, la société Quaker Oats avait déjà annoncé abandonner sa « Tante Jemina », qui figurait sur les emballages de ses sirops d’érable depuis plus de 130 ans. L’Oréal a pris la décision, en juin dernier, de supprimer toute référence à « blanc / blanchissant » « clair/clarifiant » de ses cosmétiques.
Une évolution structurelle des codes de la communication
La société impose ces changements de communication bien au-delà des seuls emblèmes commerciaux des grandes marques, à l’instar des 10 petits nègres d’Agatha Christie devenus « Ils étaient 10 ». Mais cette évolution n’est pas nouvelle et souligne qu’après la prise de conscience, les consommateurs veulent prendre le pouvoir de la communication. La célèbre tête-de-nègre est depuis longtemps devenue une tête chocolat pour ne plus heurter la sensibilité des consommateurs.
De la prise de conscience à la prise de pouvoir
Au début des années 1970, la marque Banania avait abandonné son slogan « Y’a bon Banania » et son emblème, le tirailleur sénégalais. La pression s’accentue aujourd’hui, et les réseaux sociaux permettent aux consommateurs de se mobiliser rapidement et facilement pour imposer leur point de vue à ces marques.
En revanche, ces mêmes marques dénoncent elles-aussi les dérives d’untel système, accusant notamment ces réseaux sociaux d’être les grands supports d’un racisme indécent. En juin 2020, Coca-Cola dénonçait ainsi le racisme sur ces réseaux, en suspendant toute communication publicitaire pendant 30 jours. Le président de la compagnie, James Quincey, expliquait sobrement alors :
Il n'y a pas de place pour le racisme dans le monde et il n'y a pas de place pour le racisme sur les réseaux sociaux.
La pression populaire est telle, qu’entre service Marketing et Consommateurs, une guerre invisible fait rage, devant permettre à chacune des parties de réussir à imposer son point de vue. Les stéréotypes raciaux sont clairement un des principaux enjeux de cette lutte, avec l’égalité homme – femme.
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