Allianz met en garde les entreprises quant à l'ampleur des révoltes à travers le monde
L’héritage laissé par la crise du Covid-19 et la guerre en Ukraine risque de faire mal. L’inflation galopante, la pénurie alimentaire et la crise énergétique sont autant de facteurs qui poussent les peuples à se révolter. Publié en juin 2022, un communiqué de la compagnie d’assurance mondiale Allianz appelle les entreprises à être vigilantes face aux protestations et émeutes civiles croissantes en raison des répercussions économiques à l'échelle internationale.
Les lourdes conséquences économiques
Après deux ans de crise sanitaire, suivis de la guerre russo-ukrainienne, le bilan économique est accablant. Un communiqué de l'assureur européen Allianz met en garde les entreprises contre un mouvement contestataire mondial qui monte crescendo.
Selon Kristalina Georgieva, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI), "nous sommes confrontés à une crise au-dessus d’une autre crise", en raison des effets combinés de la crise Covid et de la guerre en Ukraine. D’après elle, la hausse de l’inflation constitue un "danger imminent" qui doit faire l’objet de mesures immédiates tant la sécurité alimentaire est, elle aussi, menacée. "L'alternative est terrible : plus de faim, plus de pauvreté et plus de troubles sociaux - en particulier pour les pays qui ont lutté pour échapper à la fragilité et aux conflits pendant de nombreuses années", a-t-elle détaillé.
Le communiqué rappelle que l’Organisation des Nations-Unies (ONU) avait déjà alerté sur la flambée des prix des denrées alimentaires et sur les chaînes d’approvisionnement ralenties par la guerre. Le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres a déclaré que : "Tout cela frappe les plus pauvres et sème les graines de l'instabilité politique et des troubles dans le monde entier".
Selon Verisk Maplecroft, société mondiale de conseil en risques et en stratégie, l’agitation civile est ici "inévitable", principalement dans les économies émergentes. Mais aussi dans les pays plus riches, dont la protection sociale semble chancelante.
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Les conséquences de deux ans de confinements, de couvre-feux et de restrictions économiques ont fait naître la colère des populations à l'international.
Des manifestations grandissantes au temps des restrictions coercitives
Au plus fort de la crise sanitaire, des manifestations contre la mise en place des restrictions ont eu lieu régulièrement partout dans le monde. Selon Allianz, celles-ci sont "une réponse à une série d'événements sans précédent". Pourtant, elle ajoute que "les protestations se sont déroulées dans un contexte de troubles civils croissants à l'échelle mondiale". En effet, selon l’Indice mondial de la paix, "les manifestations, grèves et émeutes ont bondi de 244 % entre 2011 et 2019", cumulé à une polarisation politique après la crise économique de 2008.
Ces manifestations, blocages et émeutes se sont intensifiés depuis l’instauration de mesures coercitives établies pour freiner l’épidémie. Le communiqué énonce les évènements survenus l’année dernière, parmi lesquels les convois de la liberté, qui visaient à protester contre les restrictions sanitaires imposées par les gouvernements, notamment au Canada.
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Allianz déplore que les pertes économiques des entreprises aient été aussi importantes. Protestant contre la hausse du carburant en soulignant les difficultés économiques en France, le mouvement des Gilets jaunes de 2018 a fait perdre près de "1,1 milliard de dollars aux détaillants français de recettes en quelques semaines seulement". D’autre part, au Chili, d’importantes manifestations ont eu lieu du fait de l’augmentation des prix du métro, "entraînant des pertes assurées de 3 milliards de dollars". Peu après, la mort de Georges Floyd aux États-Unis a amené à des manifestations dans tout le pays, entraînant "plus de deux milliards de dollars de pertes assurées". Enfin, le communiqué retrace les émeutes de 2021 qui ont surgi en Afrique du Sud, ayant causé des pertes "d’une valeur de 1,7 milliard de dollars".
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Si la contestation sociale mondiale a gagné du terrain depuis ces deux dernières années, Allianz blâme les réseaux sociaux, dont la désinformation aurait "poussé aux révoltes civiles".
Des révoltes poussées par les "réseaux sociaux et la désinformation" ?
D'ici à la fin de l’année 2022, la société de conseil Verisk prévoit une augmentation des protestations civiles dans près de 75 pays. D’après le communiqué, ceci s’explique par "la nature largement non réglementée des réseaux sociaux" qui "a permis à la désinformation de se répandre sans contrôle, offrant une plateforme aux théoriciens du complot". Ceux-ci se sont "centrés sur trois axes principaux : un sentiment anti-vaccination et pour les libertés civiles, une méfiance à l’égard du gouvernement et des difficultés économiques".
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Allant plus loin dans ses propos, le communiqué rapporte que le baromètre de confiance Edelman de 2022 "a révélé que l'inquiétude liée à l'utilisation des fake news comme une arme avait atteint 76 % des personnes interrogées dans le monde". Aussi, Allianz déplore que des individus puissants tels que Donald Trump, l’ex-président des États-Unis, ou Jair Bolsonaro, l’actuel dirigeant du Brésil, "ayant minimisé la gravité de la pandémie", ont pu utiliser les réseaux sociaux "en toute impunité et sans conséquences juridiques" — pendant un temps, en tout cas. Mais le communiqué ne s’arrête pas là : si la pandémie a frappé "de manière disproportionnée certaines industries et certains groupes ethniques plus durement que d'autres, la possibilité de radicalisation s'est également ouverte".
Radicalisation ou liberté d’expression ? Quoi qu’il en soit, un sentiment de colère envers les décisions gouvernementales s’est propagé à travers le monde. Un sentiment angoissant pour Allianz, puisque les troubles civils peuvent impacter les entreprises.
Gestion des risques et assurance
Allianz prévient donc les entreprises que "l’influence des réseaux sociaux est susceptible de jouer un rôle dans l'alimentation des troubles civils dans un avenir prévisible". La société d'assurance considère que ces troubles civils pourraient amener à une "détérioration des bâtiments, d’interruption des activités, de refus d’accès ou de perte d’attractivité des investisseurs". Elle ajoute que les premiers ciblés sont les "bâtiments gouvernementaux, les infrastructures de transport, les chaînes d'approvisionnement, les locaux de vente au détail, les entreprises à capitaux étrangers, les stations-service, les centres de distribution de biens essentiels et les entreprises de tourisme ou d'hôtellerie".
Pour Allianz, les entreprises "doivent revoir leurs politiques d'assurance en cas d'augmentation de l'activité locale, et mettre à jour leurs plans d'urgence si nécessaire, en tenant compte des vulnérabilités de leur chaîne d'approvisionnement". Aussi, "les politiques d'assurance de biens peuvent couvrir les réclamations dans certains cas, mais les assureurs proposent une couverture spécialisée pour atténuer l'impact des grèves, des émeutes et des mouvements populaires".
D'autres acteurs de la société civile s'inquiètent de l'évolution de ces mouvements : "Les troubles civils représentent de plus en plus une exposition plus critique pour les entreprises que le terrorisme", a déclaré Srdjan Todorovic, artiste serbe. Et d'ajouter : "La nature de la menace évolue, car certaines démocraties deviennent instables, et certaines autocraties répriment lourdement les dissidents. Les troubles peuvent se produire simultanément en de multiples endroits, car les médias sociaux facilitent désormais la mobilisation rapide des manifestants. Cela signifie que les grandes chaînes de vente au détail, par exemple, pourraient subir de multiples pertes en un seul événement." Inquiet, il conclut en assurant que "dans l'état actuel des choses, je ne m'attends pas à ce que les troubles sociaux s'apaisent de sitôt".
D'aucuns repenseraient au fameux dicton populaire : "Qui sème le vent récolte la tempête". Si l'orage social gronde au plan international, il met en péril l'avenir des entreprises et des gouvernements. Face à l'absence de prise de conscience des chefs d'État et aux conséquences que cela pourrait induire, en France, le sénateur de la Côte-d'Or (LR) Alain Houpert ne craint pas moins qu'une "guerre civile froide".
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