Retraites : le flou persiste, suite du feuilleton en janvier
Un nouveau calendrier, avec une présentation repoussée en début d'année, mais toujours un grand flou sur le contenu comme sur la méthode: l'exécutif s'est offert une nouvelle semaine de confusion sur le dossier des retraites, véritable feuilleton de la présidence Macron.
Un proche de Stéphane Séjourné, le secrétaire général du parti présidentiel Renaissance, l'expliquait le 8 décembre, au lendemain d'un dîner au sommet à l’Élysée censé avoir établi la feuille de route: "il faut qu'on mette une méthode claire sur la table, pour que les Français y voient clair. Et qu'on ne soit pas sur une bataille sur l'âge avec l'un qui dit 65 ans, l'autre 64. C'est pas bon pour le débat et ça cristallise les tensions autour de la mesure d'âge qui n'est pas la seule mesure de la réforme".
A l'issue de ces agapes, le plan était arrêté. Élisabeth Borne devait présenter la réforme jeudi. Un 20 heures était dans les tuyaux. Et le report de l'âge de départ à 65 ans, mesure originelle du programme présidentiel, semblait tenir fermement la corde.
Lundi, surprise, Emmanuel Macron décale l'annonce au 10 janvier, en ouverture d'une séance du Conseil national de la refondation, outil créé pour imaginer les grandes réformes du pays, mais dont les retraites ne font pas partie.
Stupéfaction dans les rangs. L'argument du président - laisser du temps aux nouveaux dirigeants de LR Éric Ciotti et EELV Marine Tondelier - fait sourire au sein de sa majorité.
Celui d'une nouvelle main tendue vers les syndicats est pris avec plus de sérieux, mais autant de scepticisme au vu de la position de la CFDT, opposée à toute mesure d'âge à l'unisson de l'intersyndicale.
Depuis, chacun se renvoie le mistigri: un report obtenu par Élisabeth Borne, selon plusieurs sources. Une reprise en main par la Première ministre de concertations "pas abouties" du ministre du Travail, selon une autre, ce que l'entourage d'Olivier Dussopt dément. Une copie inachevée et renvoyée aux deux expéditeurs par le président, croit pouvoir synthétiser un participant.
En attendant, la présentation prévue jeudi s'est transformée en un "point d'étape" par Olivier Dussopt, d'où il ressort, pour le principal, que les deux grandes options restent sur la table.
- Qui veut du "point" ? -
"Tout ceci laisse une impression de grande confusion", se lamente un responsable de la majorité, sévère sur le "manque d'expérience" du gouvernement, tandis que pour un habitué des négociations sociales, c'est simplement "la trouille qui parle".
Emmanuel Macron semble déterminé à ouvrir les hostilités avec un âge de départ à 65 ans, mesure-phare de la campagne présidentielle qu'il avait pourtant atténuée entre les deux tours. Le 26 octobre, il se disait "ouvert" aux 64 ans couplés à un allongement de la durée de cotisation, solution votée chaque année par la droite au Sénat.
"Ce qu'a choisi le président, c'est: ne donnons pas le point avant d'entrer dans le stade", résume un connaisseur du dossier.
M. Macron "sait très bien où il veut aller. La question c'est: quel chemin on prend", abonde une source gouvernementale, pour qui une majorité au Parlement est atteignable avec les 64 ans.
Alors, à qui "donner le point", et quand ? Aux partenaires sociaux, et d'emblée ? Mais "les syndicats n'en veulent pas", souligne un ministre. Au Sénat, qui examinera le texte après l'Assemblée ? Avec les prochaines élections sénatoriales, "ce serait curieux", relève une source au sein de la majorité, pour qui cette stratégie relève du "baroque".
En outre, plusieurs opposants - Fabien Roussel pour le PCF, Cyrielle Chatelain pour EELV - mettent d'ores et déjà en garde contre l'emploi du 49.3, alors qu'Elisabeth Borne les enchaîne sur les textes budgétaires dans une indifférence quasi générale.
En sera-t-il de même sur les retraites ? Bertrand Pancher, le président du groupe centriste Liot à l'Assemblée, a averti qu'il voterait la censure si le gouvernement maintenait les 65 ans. Menace également brandie par quelques députés LR.
Interrogée sur le recours au 49.3 dans un entretien à l'AFP, la présidente (Renaissance) de l'Assemblée Yaël Braun-Pivet a estimé qu'il fallait "tout faire pour l'éviter".
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