Un mois après les révélations des Pandora Papers, la liste des noms s’agrandit

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FranceSoir
Publié le 04 novembre 2021 - 10:45
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Plus de 600 Français sont accusés d'évasion fiscale dans les "Pandora Papers".
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Quel est le point commun entre Dominique Strauss-Kahn, la chanteuse Shakira, et le criminel membre de la mafia sicilienne Raffaele Amato ? Ils font partie des milliers de personnes accusées d'évasion fiscale dans l’affaire des Pandora Papers. Plus de 600 journalistes du Consortium international des journalistes d'investigation (organisation non lucrative basée aux États-Unis), en partenariat avec 150 médias internationaux, ont épluché des milliers de documents confidentiels ayant fuité cet automne. Ces dossiers diffusés par des sources anonymes ont révélé les montages financiers permettant l’évasion fiscale de 11 300 milliards de dollars.

Parmi les accusés : plus de 1300 milliardaires, hommes d’affaires, banquiers, mais également des entreprises comme Apple, Nike ou le cabinet d'avocats Baker & McKenzie. Après les "Paradise papers" et les "Panama papers", les fraudeurs n’ont pas l’air à court de ressources et ont continué à faire fortune en contournant les lois nationales. Ces accusés viennent de plus de 90 pays.

Des chefs d’États sont aussi cités dans ces papiers, certains ont fini leurs mandats comme l’ancien premier ministre Tony Blair, le dirigeant hong-kongais, Leun Chun-Yin, ou l’ancien roi d’Espagne, Juan Carlos 1er qui avait abdiqué en 2014, face à la crise économique après presque 40 ans de règne, au cours duquel il avait déjà été accusé d’avoir détourné des millions d’euros, depuis le début des années 2000.

 

Cette affaire a exposé les méfaits de plus d’une quinzaine de dirigeants actuellement en poste à travers le monde, sous des latitudes variées : ivoirien, monténégrin, kényan, équatorien, chilien, congolais, gabonais, libanais. En France, l’ancien favori à l’élection présidentielle de 2012, Dominique Strauss-Kahn, est nommé : ses affaires prospèrent actuellement au Maroc où il exerce en qualité de conseiller pour chef d’État en Afrique et en Europe de l’Est. Ses conférences lui rapportent toujours de fortes rémunérations et selon la "cellule investigation" de Radio France, l’économiste s’est versé plus de sept millions d’euros de dividendes et salaires : « grâce à la loi marocaine, sa société est exonérée d’impôts jusqu’en 2018 ». À partir de cette même année, Strauss-Kahn part s’installer dans la zone des Émirats arabes unis, où les entreprises ne sont pas soumises à l'imôt.

Au sein de ce pays, émerge le nom de Mohammed Ben Rachid Al Maktoum, figurant sur la liste des suspects. Le dirigeant du parti révolutionnaire dominicain, Luis Abinader, élu président de la République dominicaine est également accusé d’avoir profité de ces montages financiers. En Ukraine, on trouve aussi le nom de l’humoriste et acteur devenu président après avoir joué un président à la télévision dans une série, Volodymyr Zlensky. Connu pour de multiples affaires de corruption, Silvio Berlusconi est également sur la liste.

Ces montages financiers n’auraient pas profité qu’aux hommes d’affaires, d’État, et aux entreprises : des artistes et sportifs se retrouvent associés aux noms de criminels et de dirigeant de services de renseignements. Parmi ces personnalités connues de l'industrie du divertissement, on retrouve la chanteuse Shakira, les chanteurs Julio Iglesias et Elton John. Ringo Starr, le batteur des Beatles, fait partie de la liste, tout comme Claudia Schiffer, ancienne gloire du mannequinat, et hors Occident, Jackie Shroff, acteur à Bollywood.

Dans le sport, des noms bien connus en France comme l’entraîneur français de tennis Guy Forget, l’entraîneur phare du football moderne, Pep Guardiola, ou encore Angel Di Maria, le joueur argentin du Paris Saint-Germain.

 

Le niveau de complexité de ces montages financiers est tel qu’il est souvent impossible selon le journal 24 heures de remonter jusqu’à la source du fond initial. Un problème notamment pour les accusés au pouvoir dans leur pays respectif actuellement. Des enquêtes sont ouvertes contre certains dirigeants.

Edward Snowden, l’ancien agent des services de renseignement américain ayant révélé les affaires d’espionnage de la CIA, soulève une question plus vaste selon le quotidien anglais Dailymail, celle des absents de cette liste : « les ultrariches paient si peu d’impôts [en Amérique] qu’ils n’ont pas besoin de paradis fiscaux ». Il fait ainsi référence notamment aux milliardaires Jeff Bezos, Warren Buffett, Bill Gates, entre autres.

Le Guardian montre de son côté que le problème est parfois plus complexe. Certains pourraient ne pas avoir fraudé, mais profité de possibilités que la loi du pays en question n'a pas prévues. Le journal britannique prend l'exemple de Tony Blair et sa femme Cherie : « l’opération n’est pas illégale et il n’est pas prouvé que les Blair aient délibérément cherché à éviter de payer la taxe foncière, mais le montage financier met en évidence l'échappatoire qui permet aux riches propriétaires d’échapper à une taxe dont s’acquittent les Britanniques ordinaires ».

Comment les artistes se retrouvent liés dans ces affaires ? La chanteuse Shakira avait déjà été convoqué en 2019 par la justice espagnole suite aux "Panama Papers" qui avaient révélé ses actes de contournement du fisc. Elle se serait servie d’une résidence fictive aux Bahamas pour éviter de payer des taxes jusqu’à 2014. Elle devait alors jusqu’à 14,5 millions d’euros, selon LCI.

En attendant les décisions des tribunaux, il faut respecter la présomption d’innocence, et certains se défendent en expliquant qu’ils ont été pris malgré eux dans ces montages financiers. Le député LREM et chef d’entreprise, Sylvain Maillard dont le nom est sorti dans ces « Pandora Papers », a porté plainte contre le journal Le Monde pour diffamation. Le quotidien français rapportait que le parlementaire avait été l’associé « à hauteur de 25 % d’une société écran seychelloise pour la vente en ligne de toupie Beyblade », explique le Figaro.

Le président équatorien Guillermo Lasso, contre qui une enquête est ouverte depuis la publication des Pandora Papers, dénonce « un complot international », rapporte le Monde.

À Denver, le musée d’art se retrouve également mis en cause et annonce dans la presse qu’il va rendre quatre vestiges khmers au Cambodge. Douglas Latchford, trafiquant d’art anglais, avait fait l’intermédiaire pour que le Denver Art Muséum obtienne ces œuvres.

Quelle sera la prochaine affaire de cette ampleur ? Peut-on durablement échapper à la justice fiscale ? Pour le journal le Temps, la fuite des Pandora Papers, dont le nom fait allusion à la boîte de Pandore, montre que si l’évasion fiscale bat encore son plein, ces montages ne sont pas sûrs et finissent par être exposés au grand jour.

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