Aux Etats-Unis, des voix dissidentes sur l'Ukraine dans le camp conservateur

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Teresita Dussart, pour FranceSoir
Publié le 18 mars 2022 - 20:12
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Candace Owens et Rand Paul
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Candace Owens et Rand Paul
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CHRONIQUE  Si aux États-Unis, le consensus sur la poursuite d’une politique farouchement hostile à toute lecture critique du conflit Russie-Ukraine demeure tout aussi dominant qu’en France, il se dégage toutefois quelques voix dissidentes. Pour être peu nombreuses, elles n’en ont que plus de panache. L'une des plus constantes, celle de Rand Paul, qui fait figure de vestige de ce que fut le parti républicain, alors sanctuaire des garanties constitutionnelles et de la défiance par défaut de l’État.

Paul s’est fait connaître par sa capacité à nager à contre-courant si besoin. Son inlassable combat contre les mesures sanitaires dystopiques en est une preuve. Ses tweets et apparitions dans les médias épinglent particulièrement le CDC [Center for Disease Control and Prevention]. Cette communication de bataille a permis de marquer une inflexion à l’état de l’opinion publique en ce qui concerne le puissant conseiller scientifique du président, Anthony Fauci, que Rand Paul n'évoque d’ailleurs qu'en tant que « Dictateur en Chef ».

Voir aussi : Le sénateur américain Rand Paul charge le Dr Fauci: “il est une menace pour les Américains“

Sa brasse à contre-courant le porte vers le dossier du jour : l’Ukraine. Dans une tribune pour The American Conservative, du 14 mars, le sénateur note : « Je n’ai aucune sympathie pour les nations qui agressent, qui envahissent et pillent des nations voisines. Aucune. Cependant, dans le cadre d’une politique de contention, il est possible d’argumenter, simultanément, que c’est follement provocateur d’admettre l’Ukraine dans l’Otan et que l’agression de la Russie est injustifiée et finira par être destructice pour la Russie et pour l’Ukraine tout à la fois ». En temps normal, ce sens de la nuance ne devrait pas surprendre.

Toujours du côté du "Grand Old Party", Madison Cawthorn, représentant du 11ème district de Caroline du Nord, frappe fort dans ses réseaux sociaux. Sur le conflit Ukraine-Russie, il lâche : « Où est Fauci ? Où est Hunter ? ». Voire « L’Amérique a besoin de plus de journalistes réels et moins de militants ». Il définit Joe Biden comme un président "Weak and Woke". Il rhabille le président ukrainien pour l’hiver, mais cette fois il le fait dans le contexte confidentiel d’un rassemblement de campagne. Les propos sont enregistrés par une vidéo amateur et repris par les principaux médias. Cawthorn devient alors un autre "agent du Kremlin". Qu’a-t-il dit ou que n’a-t-il pas dit ? « Rappelez-vous que Zelensky est un escroc et que son gouvernement est incroyablement corrompu, incroyablement mauvais. » Quelques jours plus tard, le 10 mars, il en rajoute une couche, "La propagande est en train de pousser l’Amérique dans une autre guerre. Je ne veux pas que les 1méricains meurent parce que les émotions nous ont poussés dans un conflit." "Les actions de Poutine sont dégoûtantes, mais les leaders, en incluant Zelensky ne doivent PAS (sic) pousser la désinformation en Amérique. Je prie pour l’Ukraine et le peuple ukrainien. Je prie aussi pour que nous ne soyons pas acculés dans le conflit du fait de la désinformation de leaders étrangers." Que du bon sens. Ce fil a ensuite disparu.

Avec Candace Owens, arrivent les plats fort en épices. La jeune femme est l’auteur de l’acronyme le plus révolutionnaire du moment, au regard de la culture woke qui mutile son pays : Blexit soit, « Black people don’t have to be Democrats » (ndlr : les personnes noires n’ont pas à être Démocrates). Son compte Twitter compte plus de trois millions de followers, c’est pour cela que lorsqu’elle dit de Zelensky que c'est "un très mauvais acteur qui travaille pour les globalistes, contre les intérêts de son propre peuple" , cela devient presque une affaire d'État. Pour déjouer la cancel culture par avance, elle précise : « Je ne bougerai pas un doigt de cette déclaration, quel que que soit le florilège [d’insultes] des médias ».

Ce faisant, elle exprime un sentiment né subrepticement, immédiatement après l'opération de collecte de fonds de Zelensky, face au Congrès américain, et l’épisode du chèque de 800 millions de dollars signé par Joe Biden deux heures après. Une part importante de l’opinion américaine aurait ressenti comme une diffuse sensation de manipulation. Que Zelensky en faisait trop. Less is more, après tout. L'effort d’incitation à l’internationalisation de la guerre, face à une Amérique qui sort d’une guerre étrangère pour entrer dans une autre depuis trente ans a pu paraître indécent.

Mais Candace Owens ne s’arrête pas en si bon chemin. Face au récit d’une Ukraine occidentale, totalement étrangère à la Russie et son ethos slave, la journaliste affirme dans une vidéo que l’Ukraine avant 1991 « n’était rien ». Derrière la formule quelque peu brute de décoffrage apparaît une analyse plus fine. « Nos médias, notre département d’État, notre gouvernement jouent un jeu très dangereux. Dont les conséquences peuvent être sévères ». Elle pose les bonnes questions : « pourquoi est-ce que personne ne questionne le rôle de l’Otan ? ». Elle s’attaque à la propagande des médias occidentaux. « En 2014, le New York Times faisait des reportages sur les bombardements ukrainiens dans des villages à prédominance russe, maintenant on ne peut plus en parler ». Elle évoque aussi les sujets des milices nazies et de la corruption ukrainienne qui ont été totalement éradiqués de la couverture d’un pays, qui pourtant monopolise quasiment toute l’actualité. Sur son compte Instagram, elle a courageusement publié un live sur le rôle du Secrétariat d’État, au sujet des laboratoires d’armes biologiques développés en Ukraine. Elle a récemment pris position contre la russophobie. Une attitude qui peut conduire n’importe qui à être traité d’agent du Kremlin.

Tomi Lahren, pour sa part, fait partie d’une minorité de journalistes qui a compris la portée de la diversion ukrainienne. Dans ce Fox news qui ressemble de plus en plus à Cnn, elle déplore que l’exécrable diplomatie woke ait favorisé un rapprochement entre la Chine et la Russie, aux conséquences imprévisibles pour notre manière de vivre. Il y donc encore de l’espace pour la profondeur de champ analytique. Et de la place pour l’ironie. Michael Knowles dans son show du même nom constate : « Le Pentagone maintenant affirme que les même pathogènes qui ne sont pas des armes biologiques lorsqu’elles sont dans les mains des américains ou des ukrainiens deviendront des armes dans les mains des russes. Il se peut que nos militaires woke, les évoquent comme « arme fluide » ou « trans-tactique ».

Voir aussi : "Qui est stupide maintenant ?": suite à l’étude Hopkins, Tomi Lahren atomise les "enfermistes"

Quelques irréductibles conservent leur libre arbitre, malgré les menaces de mort sociale. Leur dénominateur commun est qu’ils proviennent de cette droite qui n’a jamais sacrifié son attachement à la liberté et la vérité. Une famille politique qui place les arguments au-dessus des slogans, et pour qui l’humour fait office de résistance. Ils sont la voix d’une minorité qui entend résister à la corruption de la démocratie, dans un contexte institutionnel où ce qui gouverne de facto, sont des organes hors cadre de représentativité populaire. Cette posture de réalisme scientifique, de sanctuarisation des garanties constitutionnelles, de rappel de la primauté du peuple par-delà la caste politique, est ce qui les définit le mieux.

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