Les non-vaccinés selon Olivier Véran : "loin de tout", "méfiants" dans un "délire", ou "indifférents"

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FranceSoir
Publié le 30 décembre 2021 - 18:00
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Le ministre de la Santé Olivier Véran quitte le palais de l'Elysée après le conseil des ministres le 24 novembre 2021 à Paris
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© Thomas COEX / AFP
Olivier Véran : "Ce passe vaccinal, c'est pour forcer les plus ou moins indiférents"
© Thomas COEX / AFP

Ce mercredi 29 décembre, Olivier Véran, ministre de la Santé et des Solidarités, a pris le temps d'expliquer la stratégie gouvernementale lors de l’examen du projet de loi pour l'instauration du passe vaccinal, en commission à l’Assemblée nationale.

Lors de cette présentation, pendant laquelle il est revenu sur la contagiosité du Covid-19 et sur son variant Omicron, il a avoué que ce projet de loi visait surtout à atteindre les non-vaccinés « plus ou moins indifférents face à cette question ». Ceux qui se comporteraient selon lui, comme s’ils n’étaient pas concernés : « ceux qui ne sentent pas la menace. »

La typologie du ministre

Olivier Véran s'est livré à un exercice de typologie de la population non-vaccinée. Selon lui, « trois catégories se dégagent ». La première concerne des gens qui seraient « loin de tout », « loin de l’information ». « Ceux-là, nous irons les chercher », a-t-il lancé, bien qu'ils ne soient pas la cible première de ce passe vaccinal. La deuxième catégorie, ce sont ceux qu’il nomme « les méfiants » : « un magma de personnes qui se sont enkystées dans une forme de contestation pouvant parfois prendre les allures du délire, considérant qu'on leur veut du mal [...] Eux, ni un passe sanitaire, ni un passe vaccinal ne les fera changer d’avis », assurait-il.

En revanche, ceux pour qui le gouvernement entend « serrer la vis », ce sont les « plus ou moins indifférents ». Olivier Véran décrivait cette troisième catégorie ainsi : « Ce sont souvent des gens plutôt jeunes, qui connaissent quelqu’un dans leur famille qui a eu le Covid, qui a fait une grippe, peut-être parfois une forme grave, mais qui se disent "ce n’est pas pour moi". Ils se disent qu’ils n’ont pas le temps, qu’ils vivent leur vie, ou qu’ils n’ont que peu d’interactions sociales. "M’embêtez pas avec ça". Si on leur dit qu’il faut vraiment se faire vacciner, alors sur un coup de tête ils pourraient le faire sans problème. Ce passe vaccinal s’adresse à eux, ils doivent comprendre que maintenant ils ne peuvent plus considérer qu’ils sont en dehors de cette gestion de crise. »

Lire aussi : Le non-vacciné, cette espèce à abattre

Une caricature grossière

La population des non-vaccinés se réduirait-elle à un attelage d'Amish (c'est ainsi qu'Emmanuel Macron avait qualifié ceux qui s'inquiétaient du déploiement de la 5G), de complotistes paranoïaques et niant l'existence même du Covid, et de jeunes inconscients et égoïstes ?

Quid de tous les chercheurs, médecins, avocats, soignants, philosophes, artistes, qui s'opposent à la politique sanitaire actuelle ? Dans quelle catégorie entrent-ils ? Le simple fait de rappeler que la vaccination est un choix, doit le rester, que le ratio bénéfice/risque doit être estimé individuellement, en concertation avec son médecin, vous fait-il par exemple entrer dans la case infamante des « méfiants », égarés dans leur « délire » ?

Un argument sous-jacent retient l'attention : le caractère « altruiste » de la vaccination, pierre angulaire de la vaccination de masse et des éléments de langage de l'exécutif, contesté par certains depuis le début, est un mythe en péril - cette notion avait d'ailleurs disparu du propos du président de la République, lors de sa dernière allocution. Michaël Peyromaure, chef du service d'urologie de l'hôpital Cochin à Paris, qui n'entre certainement dans aucune des catégories répertoriées par Olivier Véran, rappelait la semaine dernière sur Europe 1 que la vaccination des enfants était « une hérésie », et que des millions de gens s'étaient fait vacciner « pour rien ». Serait-il, selon le ministre, victime de « délire » ?

Le constat de défiance

Après bientôt deux ans de crise sanitaire, de restrictions des libertés, de changements législatifs incessants, de protocoles, de conseils de défense, de mesures drastiques, le ministre de la Santé semble donc continuer de jouer la carte du mépris et de la caricature, en niant jusqu'à l'existence même de cette frange de la population qui, dûment informée, échaudée, de mensonges éhontés en annonces démenties quelques semaines plus tard, n'a pas ou plus confiance, et continue, « quoi qu'il en coûte », de vouloir exercer son consentement libre et éclairé.

Rappelons qu'Olivier Véran affirmait avant Noël que « le passe vaccinal est une forme déguisée d’obligation vaccinale ». Ainsi se dédisait-il du discours tenu de longs mois, en chœur avec Emmanuel Macron et le reste du gouvernement et de la majorité, qui avaient assuré qu’il n’y aurait jamais d’obligation vaccinale - elle n'existe pas en droit, mais de fait - ou que le passe sanitaire ne conditionnerait jamais la vie quotidienne des Français...

Des réactions indignées

En lui faisant un procès en ignorance ou en inconscience, en psychiatrisant une partie d'entre eux, Olivier Véran a cédé à une facilité dont se sont indignés ceux qui se sont sentis - injustement - visés.

Les réactions à ce discours outrancier ont fusé : certains s'inquiètent de cette dérive verbale du ministre de la Santé, et nombreux sont les sceptiques sur les injections anti-Covid qui ont exprimé à quel point ils ne se reconnaissent en rien dans cette nomenclature grossière, caricaturale et insultante.

Plusieurs internautes ne se sont pas fait prier pour noter que le succès grandissant de la pétition contre le passe vaccinal, qui devrait dépasser bientôt le million de signatures, indiquait que les réfractaires ne sont sans doute pas aussi marginaux que le dit Olivier Véran.

Voir aussi : Une pétition contre le passe vaccinal réunit plus de 700 000 signatures

Emmanuel Macron : « faire peser les contraintes sur les non-vaccinés »

On apprenait également dans « le Canard enchaîné » d'hier qu'Emmanuel Macron avait confié, peu avant le Conseil de défense sanitaire de lundi : « Il faut prendre des mesures proportionnées. Dès lors que nous prenons des mesures qui touchent les vaccinés, nous nous éloignons de notre stratégie et de la ligne qu’on suit depuis le début : faire peser les contraintes sur les non-vaccinés reste notre boussole absolue. » (Valeurs actuelles)

Une « boussole absolue » alliée à une telle typologie est assez « glaçante », confie un fidèle des manifestations. De la condamnation inavouée à la stigmatisation assumée : quelle sera la prochaine étape, la persécution proclamée ?

Voir aussi : Hésitation face aux vaccins : ne blâmez pas les gens

La vidéo complète de l'examen du projet de loi :

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