Vaccinés mais résolument anti-pass : une nouvelle espèce d’irréductibles
TRIBUNE - Que ce soit sur les réseaux sociaux ou aux terrasses des cafés, on entend de plus en plus souvent des personnes qui, vaccinées de la première heure par conviction personnelle, expriment désormais leur horreur d’avoir entendu les 12 juillet sonner le glas de la liberté, de l’égalité et de la fraternité dans notre pays.
Certains d’entre eux ont même fait serment de se refuser le droit d’entrer dans les lieux de l’espace public qui seront le théâtre d’une ségrégation si la loi était votée. Ils le déclarent, et pour beaucoup, je suis convaincue qu’ils le feront. Pas vraiment par solidarité envers de futurs « citoyens de seconde zone », mais parce qu’ils éprouvent un violent dégoût qui les pousse à agir.
Car pour celui qui avait choisi librement le vaccin et qui réalise aujourd’hui que dans la société « pass » il n’existera bientôt plus aucun garde-fou, aucune protection contre les abus de pouvoir, ni pour lui ni pour sa famille, c’est se sentir violé dans sa conscience comme dans son corps. Eux qui avaient consenti à l’injection par devoir ou par confiance dans leur gouvernement, se voient aujourd’hui mettre en liberté conditionnelle comme tout le monde (car la loi, comme ses modifications utérieures, s’appliquera à tous), et ils perçoivent maintenant le danger qui plane au-dessus de toutes les têtes.
En effet, à quoi de plus un vacciné devra-t-il encore se soumettre pour pouvoir prendre un café au bar, dans six mois, dans un an, s’il accepte le principe de l’apartheid aujourd’hui ? Devra-t-il passer par la case « rappel » encore et encore, sans savoir s’il pourra un jour vivre sans se faire revacciner tous les mois ? Devra-t-il livrer son propre enfant, dont le système immunitaire est en pleine construction, à l’injection qui le perturbera d’une manière absolument impossible à prévoir ? Sera-t-il forcé de dénoncer les membres de sa famille rétifs à l’aiguille ? Risquera-t-il lui-même un jour d’être dénoncé pour avoir posé une question qui fâche ?
Face à ce sentiment d’avoir été abusés, d’avoir participé sans le vouloir à un dangereux glissement du sens du mot liberté, certains ont pris la décision de ne pas faire usage des droits que leur octroient leur pass. Ils marchent ainsi dans les pas de l’aventurière et philosophe Alexandra David-Néel, qui quand elle était enfant, avait décidé toute seule de se priver des petits plaisirs que ses parents lui accordaient « si elle était bien sage », pour leur prouver (ainsi qu’à elle-même) qu’elle était libre et qu’ils n’avaient aucun moyen de pression sur elle.
En refusant de prendre part à un apartheid dont ils comprennent que tous nos concitoyens sans exception seront tôt ou tard les victimes (consentantes ou non), ils affichent la puissance de leur volonté. Pour beaucoup, dire non à l’utilisation de leur « pass » pour obtenir des gratifications, constitue un acte de résistance jouissif et libérateur, comparable aux pieds-de-nez discrets mais quotidiens, qu’avaient faits leurs grands-parents à l’occupant nazi… ne serait-ce qu’en crachant derrière le comptoir dans une tasse de café avant de la servir à un Sturmbannführer plein d’arrogance. Acte dérisoire ? Pas tant que ça, si on y réfléchit.
Le jusqu’auboutisme et l’autoritarisme ont parfois des conséquences inattendues et belles, très belles en vérité. Les déclarations du 12 juillet donnent l’occasion à de plus en plus d’hommes et de femmes vaccinés de faire montre de leur détermination à rester libres et à agir conformément à ce qu’exigent d’eux les voix conjuguées de leur raison et de leur conscience. A eux tous, je dis : respect.
Marilis Valo est écrivain.
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