Diego, l'enfant de coeur
Diego… Là comme ça, j’en pleure dans ma voiture…
Il y avait Diego… Et puis les autres, bien en-dessous pour moi.
Il ne pourra pas boire un coup avec Thatcher là-haut, car elle est sûrement en enfer, elle…
Alors que lui… Tout est pardonné… Pour le bonheur qu’il a apporté à des millions de gens…
1986... Comment pouvait-il faire mieux, pour venger son pays, après cette terrible guerre des Malouines, où les Argentins s’étaient sentis expropriés, humiliés… Quoi de mieux qu’une vengeance sans armes, et sans morts… Mais devant la planète entière ! Une vengeance par un but illégal, un but de la main, pour leur mettre le premier coup de couteau… Puis l’humiliation… En marquant le plus beau but de tous les temps, partant de son camp, et dribblant sept joueurs anglais (les Anglais préfèrent dire six - je dirai toujours sept car je compte aussi l'arrière droit, spectateur impuissant) pour les crucifier de la plus belle manière qui soit…
Diego est un héros. L’Argentine n’en aura plus un comme lui.
Il fut aussi le héraut de Naples, de l’Italie du Sud, ce Mezzogiorno qui avait adopté Diego. Délaissée, dénigrée, spoliée… et toujours vierge de Scudetto !
Il leur redonnait une raison de vivre, d’y croire, d’espérer, et surtout d’être fiers.
Et cette riche Italie du Nord, condescendante envers ses compatriotes méridionaux, qui récoltait toutes les richesses, et les titres… Et lui, le dernier héros romantique, qui réussit à décrocher la timbale, deux fois champion, avec cette petite équipe du Sud, au nez et à la barbe des deux géants milanais, des deux légendes turinoises… Ainsi que la coupe d’Europe… Il a remis Naples sur la carte du monde ! Naples et son volcan, au centre de toutes les attentions, chaque dimanche ! En surclassant avec un malin plaisir la Juve de Platini, le grand Milan de Baresi… Le petit Diego était le plus grand.
Il a dépassé le cadre du football, comme bien peu l’ont fait. C’était le héros des petits et des pauvres, contre les riches et les puissants. Insaisissable Robin des bois des stades, il incarnait, inconsciemment sans doute, une forme de revanche populaire, de fierté des gens modestes, des moins gâtés par la vie, des disgraciés, des laissés-pour-compte, qui retrouvaient le temps d’une course électrique, d’un contrôle magique, d’un crochet fulgurant, une joie sans nuage.
Au paradis, ils se feront une belote, avec Socrates et Garrincha. George Best fera le quatrième cette fois. Le docteur Socrates tentera encore une fois de leur expliquer le marxisme… Et Garrincha l’illettré aura caché des cartes dans sa manche… Et tous les quatre, ils referont leurs grands matches, et le monde… Et Diego sera interrompu par Dieu lui-même, qui lui révèlera enfin comment et pourquoi il lui avait prêté sa main, cette fraction de seconde d’un quart de finale de coupe du monde contre l’Angleterre en 1986, où il s’était élevé, pour un instant d’éternité… Est-il vraiment redescendu ?
Et le « Pibe de Oro » sera enfin pleinement réconcilié avec cette Italie ingrate, ce Naples qui s’est lavé les mains, et l’a laissé se faire attaquer par la fédé italienne, qui d’un coup ne fermait plus les yeux sur ses problèmes d’addictions, hors-la-loi soudain, dans cette mafia qu’est le football italien…
Car Diego était un héros en Italie aussi… Jusqu’à ce qu’il élimine la Squadra Azzura de sa propre Coupe du monde en 1990, à… Naples. Ce qui fit de lui un traître, un pestiféré, un drogué, un dopé…
Ils avaient seulement oublié - ils reviendront très vite à la raison, que contrairement à Messi, Maradona était avant tout argentin, et chevalier de son pays, que rien ni personne n’aurait pu lui faire trahir, même si cela devait passer par rendre folle de douleur, de rage et de rancœur, sa ville d’adoption, de cœur, qui avait fait de lui son enfant chéri – à défaut d’être un enfant de chœur...
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