Tourner la dernière page et soupirer de bonheur. Trinity de Louisa Hall
LIVRE : Il est des livres qui vous marquent par leur toute-puissance évocatrice et Trinity, de Louisa Hall, en fait partie.
Ce roman est le portrait en creux de Robert Oppenheimer, Oppie, le responsable du projet atomique américain, Manhattan. Toute en verve, la narration y est chorale : sept témoignages de personnages différents, sept moments de vie qui sont autant d’instantanés pour nous raconter une des multiples facettes d’un personnage d’exception, insaisissable, scientifique à l’intelligence hors-norme, le père de la bombe atomique, devenu plus tard un des pourfendeurs de la prolifération des armes nucléaires.
Ce sont aussi sept vignettes en forme de mini-nouvelles, qui, toutes, nourrissent le récit de leur propre histoire. La puissance évocatrice de la narration s’épanouit dans le non-dit : elle nous évoque autant, voire beaucoup plus, par ses blancs, ses vides, justement ce qu’elle ne nous raconte pas, que par ce qui y est exprimé :
Il y avait donc des manques dans le récit, et ce sont eux qui me parlaient le plus et piquaient ma curiosité, eux auxquels j’ai repensé plus tard, qui me revenait sans arrêt à l’esprit. Mais pour le moment, Robert continuait. Il voulait tout dire. (…) Sans comprendre qu’une histoire comporte toujours des trous desquels elle tire sa force, des trous dans lesquels les gens tombent et disparaissent à jamais en entraînant avec eux les êtres et les choses qu’ils aiment.
Entamée suite à une déception sentimentale, l’écriture de ce roman était teintée, pour Louisa Hall, d’une quête toute personnelle : raconter par la fiction Oppie (et montrer ainsi ce qu’une biographie n’exprimera jamais) et tenter, par cet exercice de comprendre une autre personne.
Son constat est universel : il est naturellement impossible de comprendre autrui et, plus on croit s’approcher de cette compréhension, plus, en réalité, l’autre nous échappe, tel une anguille qui glisse entre les mains de notre quête de savoir.
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