L'Afrique du Sud a payé très cher ses doses de vaccins anti-Covid
Un communiqué de presse de l'ONG "Health Justice Initiative", publié le 5 septembre dernier, rapporte que l'Afrique du Sud a déboursé beaucoup plus que les autres pour avoir ses vaccins anti-Covid.
Le mois dernier, Health Justice Initiative (HJI) a gagné grâce à un procès l'accès à tous les contrats que le gouvernement sud-africain a passés avec Big Pharma au cours de la crise sanitaire. Ce qui en ressort, selon l'ONG, ce sont "des conditions immorales qui favorisent l'industrie pharmaceutique."
En 2021, pendant que les organisations internationales promettaient des vaccins pour tout le monde et que les fabricants assuraient pouvoir vendre à prix coûtant aux pays les plus pauvres, l'Afrique du Sud a payé des montants "excessifs" pour ses vaccins — notamment à Johnson & Johnson (J&J) et au Serum Institute of India (SII).
15% de plus que l'Union européenne
Selon le communiqué, J&J a facturé à l'Afrique du Sud 10$/dose, soit 15% de plus que le prix facturé par la société à l'Union européenne (UE) et environ 25% de plus que le prix coûtant promis initialement (7.50$). En plus de cela, la société pharmaceutique aurait demandé "un acompte non remboursable de 27,5 millions de dollars". Contactée par TheBMJ, J&J nie et assure que le gouvernement sud-africain a payé 7.50$/dose comme les autres.
Toujours selon HJI, Pfizer aurait aussi facturé à l'Afrique du Sud 10$/dose, soit 32,5% de plus que le "prix de revient" de 6,75 dollars qu'elle aurait facturé à l'Union africaine. Dans ce cas, c'est tout de même moins que le prix qu'a payé l'UE, qui a varié de 15.50€/dose à 19.50€/dose. Là, Pfizer aurait demandé un acompte de 40 millions de dollars, dont la moitié seulement aurait été remboursable, même si aucun vaccin n'avait été livré.
Enfin, le SII — qui distribuait le vaccin Oxford/AstraZeneca — a facturé à l'Afrique du Sud 5,35$/dose, soit 2,5 fois plus qu'à l'UE, pour 1,5 million de doses.
"Les termes et conditions de ces contrats sont tellement unilatéraux et tellement favorables aux multinationales qu'ils dépassent l'entendement", a déclaré Fatima Hassan, directrice de l'HJI.
"Une décision difficile"
Mais l'Afrique du Sud a été contrainte de se tourner vers les compagnies privées, notamment parce que le GAVI (Global Alliance for Vaccines and Immunization) n'a pas rempli ses promesses. "Gavi avait promis, ou du moins projeté, |...] de fournir 20 millions de doses avant la fin de 2021, et ce n'est pas du tout ce qui a été fait.", rapporte Brook Baker, professeur à la faculté de droit de l'université de Northeastern et analyste politique principal au Health Global Access Project. De son côté, le GAVI assure avoir livré neuf millions de doses de COVAX à l'Afrique du Sud, dont huit gratuitement.
Le gouvernement sud-africain a aussi réagi, expliquant avoir dû "prendre une décision difficile" pour donner "la priorité à la sauvegarde de la vie des citoyens".
Les contrats continuent d'être étudiés, cependant que J&J fait l'objet d'une enquête en Afrique du Sud. À la mi-septembre, la Commission de la concurrence du pays a ouvert une enquête contre le géant pharmaceutique pour "pratiques d'exclusion et tarification excessive" de la bédaquiline (un médicament contre la tuberculose). Comme le rapporte abcNEWS, la commission "a refusé de donner plus de détails sur son enquête, mais les groupes de défense de la santé en Afrique du Sud affirment que la bédaquiline est facturée plus de deux fois plus cher que dans d'autres pays à faible ou moyen revenu."
En guise de conclusion, rappelons que Pfizer et J&J ont respectivement enregistré un chiffre d'affaires record de 100,3 milliards de dollars et 94,9 milliards de dollars en 2022.
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