Pas de SDF au SDF - Les maraudes de France-Soir épisode 011
Oui. Pire encore qu'à l'accoutumée, le vendredi 26 juillet 2024 a été une triste journée pour les SDF (sans domicile fixe). Non, en cette Saint-Jacques, « les pauvres », n'auront pas été à la Fête. Indésirables aux abords du Stade de France (SDF), les rares qui s’y sont risqués à « braver l'interdit », c'est logique, ont goûté au plat « de résistance » : les coups de matraque, la spécialité des forces de l'ordre. L'ordre républicain si cher aux élus de tous bords, gavés à outrance qu'ils sont par les impôts et taxes. Gavés à tel point que je les verrais bien chanter cette reprise de « Et on fait tourner les serviettes » (de Patrick Sébastien) qu'a écrite Frédérique, l'amie qui m'a accompagné durant la maraude, objet de ce numéro, à laquelle nous avons participé, justement, vendredi, en Seine-Saint-Denis, sur les bords de Seine et aux abords du Stade de France :
« Nous on dépense les pépettes. Des travailleurs des gens honnêtes.
Les taxes, les impôts les retraites, c'est chouette, c'est chouette.
Mais mon dieu qu'ils sont bêtes ! »
Par « les pauvres », j'entends également les riverains dont le domicile fixe se trouve sur le parcours que la flamme olympique a emprunté, vendredi 26 juillet 2024, jour de la cérémonie d'ouverture.
Les gueux sous la pluie, le gratin à l'abri, telle fut la configuration décidée par les organisateurs.
Quant aux Parisiens habitant aux abords des endroits concernés, qui n'avaient pas les 1.600 euros (tarif le plus bas) exigés pour pouvoir assister à cette daube en tant que spectateurs « privilégiés » (dénomination officielle utilisée pour justifier les tarifs ahurissants), ils ont été interdits d'en profiter depuis leurs balcons. Si-si ! Interdiction de se mettre à leurs fenêtres, sous peine d'une amende forfaitaire de 135 euros, sécurité de l'événement oblige, alors que seules les fenêtres offrant un poste de tir sur la tribune présidentielle eussent pu être l'objet de cette interdiction légitimement.
Voici, à ce sujet, un petit florilège des témoignages recueillis, vendredi soir tard et samedi matin tôt, auprès de personnes qui ont été privées, interdites ou exclues de ce qu'Emmanuel Macron et Cie nous ont pourtant vendu comme étant « une grande fête populaire. » Une vente forcée imposée, elle, à l'inverse, à absolument tous les Français. Les 68 millions de contribuables que nous sommes, qui, sans qu'on nous ait demandé notre avis ni encore moins notre accord, avons dû payer les onze milliards d'euros que coûte ces jeux olympiques « Paris 2024 » (soit 161 euros par personne, nourrissons et centenaires compris), plus le coût faramineux de la sécurité : environ deux milliards, dont plus des ¾ sont alloués à la protection des chefs d'État et chefs de gouvernement.
Jean-Louis (1), SDF, « le petit Gibus » (2) de la soirée : « Si j'aurais su, j'aurais pris les 10 euros. » La somme qui lui avait été proposée la veille, pour aller s'installer ailleurs, par le patron de l'agence de voyages proche du Champ de Mars devant laquelle il s'était installé l'avant-veille. Vu la présence annoncée de beaucoup de touristes aux abords de l'endroit, Jean-Louis espérait bénéficier d'oboles très importantes en nombre et en substantialité. Or, résultats des courses, s'il n'avait pas battu là, sans doute, un record de vitesse en course à pied, lorsque les policiers décidés à le faire déguerpir ont sonné le départ, cette fois, c'est certain, il aurait battu le record du jour en coups de pied au cul et autres douceurs du genre (caresses appuyées, matraquages affectueux, accolades viriles, etc.), généreusement administrées aux administrés récalcitrants par les forces de l'ordre. À quelles fins ? Bin pour que, justement, l'ordre règne. Non parce que, il ne faut pas déconner. Si on fait les choses dans le désordre, tout de suite c'est le grand n'importe quoi.
Incarnation vivante du « mettre la charrue avant les bœufs », en politique, et du « en même temps » (tant qu'on y est) mettre le cocher derrière ; président de la République qui a sept ans d'expérience dans ce domaine, et qui lui a préféré témoigner sous couvert d'anonymat ; Emmanuel X. confirme.
Jeanine (1), gérante d'une boulangerie sise avenue Bosquet : « C'est la cata ! Le pire mois de juillet qu'on n'a jamais eu. Mais vous avez vu ça ? Des barrières devant ma vitrine ! Pas étonnant avec ça que personne ne s'arrête : les clients ne peuvent pas entrer. Et moi qui habite au-dessus du magasin, il faut que je présente un QR code, qu'en prime je dois avoir imprimé. Parce que le logiciel utilisé par ces messieurs et dames de la police pour vérifier les QR codes, est défaillant. Tenez-vous bien : il n'arrive pas à les lire, à cause de la luminosité. De jour comme de nuit. Non mais faut arrêter ! »
La pauvre... J'espère qu'elle ne fait pas partie des commerçants parisiens qui se sont réjouis quand, en 2017, l'organisation des Jeux olympiques 2024 a été attribuée à la ville de Paris. Je n'ai pas osé lui poser la question. Son désarroi était bien trop grand : je ne pouvais pas prendre un tel risque. Pour elle, le risque de lui donner des envies de suicide, pour moi le risque qu'elle me colle une tarte. Pardi ! À quatre euros cinquante la part de tarte en vitrine, j'étais « grave » hors budget.
Blague à part, Amélie (1), patronne du primeur non loin de là, elle aussi en avait gros sur la patate. Mais, bizarrement, elle, c'était plus envers les personnes présentes, qu'envers des clients absents, que sa colère était dirigée. En l'occurrence les gens qui se rendaient au spectacle : « Regardez-moi tous ces couillons. Ils se plaignent que tout est cher, et ils courent dépenser des milles et des cents pour assister à ce truc. Et vous allez voir qu'en plus, à coup sûr ça va être de la merde. Un machin LGBT « plus-plus », comme ils disent à la télé. Comme si ça avait quelque chose à voir, tout ça, avec les jeux olympiques. Non mais sérieusement ? Moi je vous le dis : le pays part en couilles. »
C'est le cas de le dire. On l'a constaté, hélas, avec le contenu du « spectacle » qui a été « offert » vendredi. Et je pense qu'on n'a pas fini d'en parler. Et pas uniquement en bien. Plutôt le contraire. Notamment chez les méchants anti-progrès que sont les opposants à l'hégémonie woke.
Donc finalement, oui : l'interdiction faite aux SDF d'être présents aux abords des sites olympiques est une bonne chose, une excellente initiative qui a été prise là par la préfecture de police de Paris.
Pour une fois, ce ne sont pas eux qui sont l'objet des excès de zèle dont les policiers sont coutumiers à leur endroit, ce sont les « honnêtes » citoyens. Les gentils « mougeons » (contraction de moutons et de pigeons) qui acceptent docilement de se faire à la fois gruger et plumer. De se plier aux ordres stupides sans réfléchir, et qui en outre sont les éternels dindons de la farce. Pourquoi ? Parce que policiers, CRS, gendarmes, les exécutants des basses besognes en lesquelles consistent les mesures de coercition attachées à ces ordres stupides, les « gardiens de la paix » de jadis qui sont devenus « les forces de l'ordre », sont payés avec l'argent du contribuable.
1) les prénoms ont été changés.
2) le gamin qui dit la réplique culte du film « La Guerre des Boutons » d'Yves Robert sorti en 1962 : « Si j'aurais su, j'aurais pas venu. » (à la fin de bande-annonce)
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