Démantèlement de la "jungle" de Calais : des migrants se cousent la bouche pour protester

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 03 mars 2016 - 20:50
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Des migrants se sont cousus la bouche pour protester contre le démantèlement de la jungle de Calais.
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©Philippe Huguen/AFP
A Calais, des migrants se sont cousus la bouche pour protester contre le démantèlement du camp.
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Pour protester contre le démantèlement d'une partie de la "jungle" de Calais, plusieurs migrants iraniens se sont cousus les lèvres ce jeudi avec des aiguilles et du fil. Cette démarche, lancée la veille par un autre groupe de migrants de la même origine, vise à interpeller les autorités sur leur sort.

Un groupe de réfugiés iraniens de la "jungle" de Calais se sont fait coudre la bouche ce jeudi 3, dans un geste spectaculaire de protestation contre l'évacuation du bidonville, qui s'est poursuivie dans un calme précaire, marqué par quelques incendies de cabanes.

La scène, qui a duré une dizaine de minutes, s'est passée sur le "balcon" d'une cabane, juste en face de l'abri de Médecins sans frontières, dans la zone sud du camp vouée à être évacuée. Neuf Iraniens avaient la bouche cousue, avec des aiguilles et du fil, sans que l'on sache si parmi eux certains s'étaient déjà fait coudre la bouche la veille. Ce groupe était constitué uniquement d'hommes, qui avaient presque tous le visage masqué par des écharpes trouées au niveau des yeux. L'un d'eux, âgé d'une quarantaine d'années, poussait des gémissements. Sur une pancarte, on pouvait lire "Will you listen now?" ("Est-ce que vous allez nous écouter, désormais?"). Un autre écriteau affirmait qu'ils étaient en grève de la faim. Ils ont ensuite défilé dix minutes, avant de se disperser devant les CRS.

La veille, huit Iraniens, selon deux associations d'aide aux migrants, deux selon la préfecture, s'étaient déjà fait coudre la bouche. Ils avaient agi ainsi "parce que leur cabane venait d'être détruite", avait expliqué François Guennoc, de l'association L'Auberge des migrants. "De tels faits ne peuvent que susciter une profonde émotion", avait réagi la préfecture dans un communiqué. Mais "rien ne justifie de telles extrémités alors même que l’Etat met tout en œuvre pour sortir les migrants des conditions indignes dans lesquelles ils survivent dans la zone sud". Ces migrants répétaient un geste commis en novembre dernier à Idomeni, à la frontière gréco-macédonienne, par cinq de leurs compatriotes voulant ainsi protester contre le refus de la Macédoine de les laisser passer.

Cette crise doit être abordée vendredi à l'Elysée par François Hollande qui, en présence du ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve, recevra la maire de Calais Natacha Bouchard et le président de région Xavier Bertrand et deux élus PS du Pas-de-Calais. En outre, des socio-professionnels du Calaisis, dont l'activité est "durement" affectée par le problème migratoire, vont défiler lundi 7 à Paris devant plusieurs ministères et l'Elysée pour "alerter" les pouvoirs publics, selon un porte-parole. Environ 500 personnes feront le déplacement en bus.

Sur le terrain, par un vent glacial, les travaux des ouvriers et des pelleteuses ont démarré peu avant 9h pour se terminer vers 16h30, pour la quatrième journée d'évacuation de ce secteur, où vivent de 800 à 1.000 migrants selon la préfecture, mais 3.450 selon les associations. Deux hectares environ, sur une surface de quelque 7,5 hectares, ont été évacués depuis lundi, selon la préfecture. L'évacuation s'est déroulée dans un calme relatif, avec quelques incendies de cabanes dans la journée, semble-t-il déclenchés par des migrants dépités. Chaque fois, des associatifs ou indépendants ont aidé à éteindre le feu et à déplacer les cabanes voisines, mais dans quelques cas, des migrants ont tiré, de loin, des pierres sur ces cabanes.

Sur un terrain boueux, les ouvriers de l'entreprise de BTP Sogéa et les équipes de services de l'Etat chargés de convaincre les migrants d'accepter une solution d'hébergement ailleurs que dans le bidonville, encadrés par les CRS, ont arpenté et déblayé le terrain d'un secteur où est implanté un important "lieu de vie" de la "jungle": "l'ashram kitchen", pour le moment toujours préservée. Cette grande tente soutenue par une structure métallique fait office de centre de distribution de repas. On y sert en permanence sandwiches et thé. "C'est un endroit très couru, où sont servis environ 1.000 repas par jour", a expliqué l'une des bénévoles. A ses côtés, dans le bruit des pelleteuses, Wadou, un Erythréen, confirme: "j'aimerais pouvoir continuer à venir tous les jours. Je n'ai rien pour cuisiner dans mon abri. Ca me rend triste."

C'est dans ce contexte tendu que se tenait à Amiens le sommet franco-britannique, où la question migratoire a figuré au centre des débats. Le président François Hollande a demandé au Premier ministre britannique David Cameron que les mineurs isolés de Calais rejoignent "vite" le Royaume-Uni s'ils y ont de la famille.

De son côté, Londres va apporter 22 millions d'euros supplémentaires notamment à la sécurisation de Calais, selon la France. François Hollande a averti qu'une sortie de la Grande-Bretagne de l'UE aurait "des conséquences sur la manière de gérer les situations en matière de migration".

 

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