Le saumon norvégien connaît une année noire en 2023 avec 63 millions de morts

Auteur(s)
S. Jouan
Publié le 02 mai 2024 - 13:40
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pisciculture
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Kantarci
Une vue aérienne prise le 5 février 2024 montre la ferme piscicole Oksebasen, exploitée par Mowi, le plus grand producteur mondial de saumon de l'Atlantique, à Giske, Norvège
Kantarci

Malgré des chiffres de vente record pour les poissons venus de Norvège, le revers de la médaille inquiète. Une importante augmentation de la mortalité, survenue chez le premier pays producteur de saumons d’élevage, serait l’indicateur de différentes problématiques qu’entretiendraient les éleveurs.  

L’année 2023 signe une augmentation de 16% du montant des ventes de saumon pour le pays norvégien, ce qui équivaut à 1,4 milliard d’euros supplémentaires, tout semble sourire à ces derniers. Pourtant, ce record en cache un deuxième, moins glorieux. En effet, 63 milliards de saumons d’élevage ont connu une mort prématurée dans les fermes piscicoles, soit près de 2 milliards d’euros de manque à gagner. Une augmentation inédite du taux de mortalité de 16,7%, contre 16,1% pour l’année 2022.  

Différentes explications sont alors données, qui ne sont pas pour plaire aux éleveurs. Tout d’abord, la méthode d’élevage intensif est de plus en plus pointée du doigt. Les grandes cages immergées dans lesquelles les poissons sont élevés provoquent un vivier pour les maladies telles celles atteignant le cœur, le pancréas ou encore les branchies. Autre problématique importante, les infestations de poux de mer. Ces parasites se nourrissent de la peau et du sang des poissons et leur occasionnent de nombreuses blessures. Les saumons sont alors défigurés, rongés par ces parasites qui se logent sur leur tête.   

Le président de l’organisme Naturvernforbundet, Truls Gulowsen, explique que cette mortalité est le résultat de cette « industrialisation » poussée à son paroxysme.  

« Nous avons génétiquement créé un poisson d'élevage qui a de mauvaises capacités de survie et qui meurt d'une combinaison de stress et de mauvais gènes parce qu'il a été sélectionné pour croître le plus vite possible et a subi un changement brutal de sa diète » explique-t-il.  

Par ailleurs, la vitesse anormalement rapide d’élevage des poissons est elle aussi pointée du doigt. En effet, la lumière et la température seraient manipulées de telle sorte que les saumons grandissent le plus vite possible.  

Trygve Poppe, spécialiste de la santé des poissons et ancien professeur de l'Ecole vétérinaire, explique l’importante réduction de ces délais et dénonce les « conditions animales terriblement mauvaises ».  

« Pendant la première phase en eau douce, on manipule la lumière et la température pour qu'il grandisse le plus vite possible : à l'état sauvage, cette phase prend de deux à six ans. En élevage, c'est entre six mois et un an » affirme-t-il.  

L’opacité du devenir des poissons morts pourrait être au cœur d’un scandale sanitaire. En effet, selon certains médias norvégiens, il se pourrait que ces poissons finissent tout compte fait dans les assiettes, malgré le fait qu’ils soient malades. Une ancienne cheffe qualité dans un abattoir, Laila Sele Navikauskas, met le feu aux poudres en novembre en témoignant auprès de la chaîne NRK.  

« Je vois en vente du poisson que moi-même je ne mangerais pas » admet-elle.  

Edgar Brun, chef de la division santé et bien-être du poisson à l'Institut vétérinaire norvégien, tient cependant à rassurer les consommateurs en affirmant que « les agents pathogènes courants qui causent des maladies chez le saumon ne sont pas transmissibles aux humains ».  

Des solutions sont envisagées afin d’enrayer un tel phénomène, mais restent coûteuses. Parmi ces dernières, un espacement accru des fermes aquacoles serait de bon sens. Pour autant, de nouvelles technologies sont aussi envisagées afin de noyer le problème. Des installations fermées où l’eau serait alors filtrée sont mentionnées. Plus chère, elle permettrait de se débarrasser avant tout des poux de mer.  

Le gouvernement se veut quant à lui rassurant, tout en en profitant pour rappeler la responsabilité des éleveurs.  

« Tous les producteurs n'affichent pas le même taux de mortalité, il est possible de le faire baisser », affirme le secrétaire d'Etat au ministère de la Pêche, Even Tronstad Sagebakken.  

Par ailleurs, propre à l’action gouvernementale, deux textes sont en préparation afin de garantir le bien-être animal d’une part, et la juste exploitation des mers d’autre part. Pendant ce temps, l’Autorité de sécurité alimentaire affirme toujours recevoir des signalements indiquant la présence de saumon non réglementaire à l’export. 

avec AFP

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