"Nuit debout" : à gauche, un mélange d'envie et circonspection

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 06 avril 2016 - 22:40
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La place de la République investie par Nuit Debout.
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©Dominique Faget/AFP
La place de la République est occupée par le mouvement depuis six nuits.
©Dominique Faget/AFP
Près d'une semaine après la première veille place de la République, le mouvement "Nuit debout" continue de vivre et attire l'œil des politiques. Certains y voient les prémices d'une vraie action politique, mais ses membres préviennent qu'ils ne comptent pas être "récupérés".

Certains les regardent avec envie, d'autres avec circonspection : scrutés de près par la gauche, les manifestants de "Nuit Debout", qui ont reçu le soutien des Espagnols de Podemos, enthousiasment ou inquiètent des partis mal-aimés et soucieux de retrouver du souffle d'ici 2017.

Six nuits d'occupation place de la République à Paris, une extension dans différentes villes de province, un rendez-vous mercredi soir à Bruxelles... Le mouvement est en train de se structurer en accéléré, prenant de court tous ceux qui rêvent d'une recomposition à gauche.

Du coup, ils s'y pressent tous. Le porte-parole du Nouveau parti anticapitaliste Olivier Besancenot, et celui d'Europe Ecologie-Les Verts Julien Bayou y sont presque tous les soirs. Le secrétaire national du Parti communiste Pierre Laurent y a fait un tour le week-end dernier, de même que le candidat à la présidentielle Jean-Luc Mélenchon. Même le premier secrétaire du Parti socialiste Jean-Christophe Cambadélis est discrètement passé place de la République.

"Ils viennent humbles, en citoyens, ils sont curieux, c'est plutôt une qualité", commente Louise, institutrice de 38 ans, membre de la commission communication de "Nuit debout". "S'ils ont envie d'intégrer notre mouvement politique - qui n'existe pas aujourd'hui, soyons clair -, sans leader, ils seront les bienvenus mais il n'y a aucune récupération possible", explique-t-elle à l'AFP, en insistant sur le fait qu'elle parle en son nom propre. Elle ajoute: "c'est à eux de se transformer pour nous rejoindre".

Un credo semble-t-il bien compris par Jean-Luc Mélenchon qui a avoué dimanche qu'il serait "très fier que le mouvement (l)e récupère". "On aurait payé qu'on n'aurait pas rêvé mieux. Une jeunesse qui se mobilise pour défendre le code du travail, après des mois de débats à la noix, c'est formidable", s'est-il enthousiasmé.

"Les gens qui sont là sont des gens qui veulent en fait secouer la politique et ils ont mille fois raison", a renchéri mardi M. Laurent, qui "encourage" un mouvement selon lui en train de "changer les pratiques de la politique".

Créé à l'origine sur la contestation de la loi El Khomri sur le Travail, le mouvement la dépasse déjà largement: réfugiés, mal-logement, précarité, exercice de la démocratie... tous les sujets sont débattus.

"C'est surtout un lieu de discussion", confirme Olivier Besancenot, pour qui "c'est un mouvement qui a une défiance à l'égard des partis traditionnels mais qui ne se fait pas contre eux". "C'est un exercice de démocratie radicalisée en temps réel", abonde Julien Bayou, "tout le monde est jaloux de cette horizontalité, mais c'est le meilleur garant pour que tout ça se consolide".

Même au Parti socialiste, qui soutient la politique menée par François Hollande et combattue dans la rue, on affiche un certain entrain vis-à-vis de ce mouvement inédit. "Il y a une bonne nouvelle: (...) c'est le printemps de la re-politisation", a salué M. Cambadélis.

Il a néanmoins immédiatement relativisé, évoquant "plus Hyde Park que la Puerta del Sol dans le moment présent". Si le parc londonien est connu pour son vénérable "Speakers' Corner", espace de libre expression depuis 1872, l'occupation de la place Puerta del Sol en 2011 à Madrid a donné naissance au Mouvement des Indignés, avant de déboucher politiquement sur Podemos. "Il ne faut pas non plus surestimer ce qui est en train de se passer", a également douché Julien Dray, proche de François Hollande.

Le centriste François Bayrou assure entendre "ce que ces manifestations, ces mouvements veulent dire". Quant à Jean-Pierre Chevènement, il estime que "si on veut faire surgir des idées, ce n'est pas forcément à travers un attroupement place de la République, c'est peut-être qu'il faut aller à la bibliothèque".

"On avance tout doucement", analyse Louise, qui explique que l'urgence de la 6e nuit était de "trouver des règles de fonctionnement", de "poser un cadre sur lequel tout le monde est d'accord", et d'organiser le mouvement en "cercles, pas en pyramide".

Quant à Podemos, dont un élu est venu soutenir mardi soir les manifestants, il ne fait pas rêver Louise. "C'est devenu un parti traditionnel. Nous, à mon avis, on ne deviendra pas un parti politique traditionnel".

 

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