De Londres à Varsovie, Macron tente de soigner son image européenne
Londres, Bruxelles, bientôt Hanovre et Varsovie... Le ministre de l'Economie Emmanuel Macron multiplie depuis quelques jours les déplacements en Europe.
L'occasion de faire entendre sa voix sur l'avenir de l'UE et de soigner son image de ministre "transgressif". "Il y avait un espace laissé vacant, il s'en est saisi": pour Philippe Braud, chercheur associé au Cevipof, c'est une véritable "séquence européenne" qu'a engagée le locataire de Bercy avec cette série de déplacements. "Il imprime sa marque", en prenant position sur des sujets globalement "peu abordés" par l'exécutif, ajoute le sociologue.
Cette "mini-tournée" entamée la semaine dernière à Londres, où le ministre a inauguré un centre de start-up françaises, l'a menée lundi en Belgique, où il a parlé crise de l'acier et réforme des institutions européennes.
Elle le conduira vendredi à Varsovie, où il participera avec ses homologues européens à une réunion sur la politique industrielle de l'UE. Avant d'aller visiter mardi le salon de l'industrie de Hanovre, en Allemagne.
Hasard du calendrier ou programme préparé avec soin? "Qu'un ministre de l'Economie se rende à l'étranger, c'est normal. Mais ça fait beaucoup de déplacements européens en peu de temps", juge Frédéric Dabi, de l'institut Ifop, pour qui cela s'inscrit "dans une stratégie de distinction".
Au cabinet de M. Macron, on reconnaît qu'au-delà des impératifs liés à l'agenda européen, le ministre a eu la volonté de "tenir un discours de projets communs (...) dans une période de fortes turbulences". "Il y avait l'idée que c'était le bon moment pour faire avancer ces sujets", concède-t-on.
Référendum sur le Brexit, crise des migrants, situation en Grèce... Plusieurs dossiers assombrissent l'avenir de l'UE. "Si on ne parle pas du projet européen, si on ne pose pas de jalons", on risque de laisser le champ libre à "des initiatives de désintégration", justifie-t-on.
Lors d'un discours lundi à Bruges, le ministre de l'Economie a appelé de ses voeux "un traité refondateur de l'Union européenne" pour continuer à faire vivre "le rêve européen", quitte à ce que cela ne concerne que "quelques-uns" des Etats membres.
"Nous ne pouvons plus continuer à gérer l'Europe cahin-caha", a-t-il insisté, évoquant "un plan de bataille à préparer dans les 18-24 mois" qui inclurait une plus forte convergence, y compris en matière sociale (retraites, salaire minimum...).
Un propos qui n'a "rien de révolutionnaire", selon Philippe Braud, mais qui "participe du discours transgressif" du ministre. "L'idée d'un nouveau traité, ça a l'avantage de dynamiser le débat, même si ça n'a aucune chance d'aboutir", estime le sociologue, pour qui "la question de la réforme de l'UE fait peur".
"Par petites touches, Emmanuel Macron continue à se construire l'image d'un homme politique différent des autres", abonde Frédéric Dabi. "Parler d'Europe lui permet de sortir du cadre hexagonal, de se donner une stature internationale. Il cherche à élargir les murs", ajoute-t-il.
Dans une interview au quotidien belge Le Soir, le ministre se présente d'ailleurs d'emblée comme "l'Européen". "Je pense et je le dis depuis longtemps, nous avons un rôle fondamental à jouer sur l'Europe", insiste-t-il. Un positionnement rendu possible par l'absence de discours de l'exécutif -- du moins audible -- sur la réforme de l'UE.
"François Hollande a pourtant beaucoup agi au niveau européen. Mais il n'en a jamais fait récit. Logiquement, l'espace laissé vacant est occupé", souligne Stéphane Rozès, patron de la société Cap (Conseils, analyses et perspectives), pour qui "la politique a horreur du vide".
Le ministre a reçu cette semaine un soutien inattendu: celui de l'ex-ministre des Finances grec Yanis Varoufakis. "Je l'aime beaucoup, personnellement (...) On partage la même vision des profonds défauts de la zone euro", a déclaré l'ancien compagnon de route d'Alexis Tsipras. Qui reconnaît, quand même, des "désaccords en matière de réformes microéconomiques ou sur la libéralisation du marché du travail".
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