La vérité du milieu
TRIBUNE :En cette période de confinement généralisé, je me révèle être, comme bon nombre de mes semblables, ici, partout, ailleurs. Tantôt un compatriote souverainiste bien français revendiquant mon ringardisme patriotique historique, tantôt un européiste au protectionnisme libéral requinqué ! Vous vous y retrouvez ? Moi pas toujours ! A vouloir être presque pour tout et pour tous, nous en sommes devenus d’irréductibles expert-commentateurs, et des inquisiteurs décomplexés, incapables de penser la France, l’Europe, le monde avec justesse.
Comme bon nombre d’entre nous, je ne sais plus, je tâtonne, j’hésite, je cogite. J’ai ce privilège unique, inique, de penser et de critiquer le monde sans prendre le moindre risque, sans même sortir de chez moi ; et dans cette fourberie capitaliste dénoncée par les uns, à bas prix. Mais si nous pensons être redevenus des vigies éclairées et éclairantes pour notre monde post capitalistique à venir, rassurons-nous, il n’en est rien. Nous sommes aux génies des Lumières, ce qu’une vulgaire bande de LED auto-adhésive fabriquée en Chine, est à la révolution filamenteuse de 1878. Ne sont pas Swan et Edison qui veulent.
Pourtant bien chauffés, bien protégés, bien éclairés, nous demeurons derrière nos écrans LCD tactiles ultra-connectés, des comparses privilégiés globalisés totalement déconnectés de la dure réalité de notre monde! Comme nous toutes et tous, je lis, j’écoute, je visionne, j’apprends, je décrypte, je critique, je condamne, j’informe, je partage et je désinforme... Oui, oui… Je le sens, je le sais, je le reconnais, et je le déplore amicalement avec quelques happy-few surdiplômés. Sur des boucles d’échanges cryptées américaines, russes et chinoises évidemment… Des talk-shows de désinformations en continu aux pitreries hanounesques devenues sérieuses en passant par des tribunes parfois fortes intéressantes, tous nous contribuons à ce grand bazar désinformationnel ; à défaut de disposer de papiers en règle pour intégrer le cirque médiatique où les suspicions de la cathodique Afida Turner se confondent avec les réflexions scientifiques du Professeur Luc Montagnier.
Curieux et chanceux pourtant nous sommes. Généreuse et bienveillante est la République qui confine ses enfants à domicile, en leur conférant une immunité rémunérée contre une pandémie contemporaine inédite… Mais aussi contre la bêtise généralisée! C’est probablement l’un des sous-entendus les plus intéressants partagé par le Président Macron dans l’une de ses trop nombreuses interventions télévisuelles. Il aime lire, écrire, penser, réfléchir. Je le sais et il a fort raison. En incitant ses enfants (ceux de la République lol) à prendre le temps de la lecture et à réapprendre le goût de l’écriture, elle nous invite à un temps de méditation collective et d’introspection personnelle, devenu un luxe ultime, pour nos sociétés câblées sur les anges écervelés de la téléréalité.
L’immédiateté de nos vies et de nos modes de vies mais surtout les modèles consuméristes que nous avons depuis 60 ans magnifiés, nous ont quelque peu aveuglés, éloignés et perdus dans des raisonnements intellectuellement raccourcis, réducteurs et mentalement rabougris voire débiles. Evidemment je rassure immédiatement celles et ceux qui verraient dans ces quelques mots une rechute narcisso-élitiste de ma part. Non, non… Je n’échappe pas malheureusement à la règle. Il m’arrive aussi d’être à côté de la plaque.
Et pourtant tout est là, à portée de regards, de mains, de bibliothèques, de clics… Prolifique et prolixe est la littérature. Française entre autres. Une composante de notre patrimoine pleine de narrations humaines et sociales, fourmillante de références historiques et politiques, riche d’histoires réelles et imaginaires, féconde de mythes triviaux et philosophiques ! De Giono à Montesquieu, de Camus à Hugo, de Tournier à Duras ou encore de Labro à Werber, je n’aurai pas assez de 100 vies pour lire et relire tous ces chefs d’œuvres. Des balises qui pourraient à leur juste place nous éclairer dans cette parenthèse particulièrement douloureuse pour tous ceux qui ont été de près ou de moins près, touchés dans leur vie et dans leur chair par ce monstre invisible répondant au nom de code cinématographique de « COVID-19 ».
Bien qu’abondante et sensationnelle soit l’information vérifiée et vérifiable, apprenons à faire la part des choses, à ne pas travestir la réalité, à ne pas s’improviser prédicateurs ! Et surtout à ne pas polluer une atmosphère certes de moins en moins carbonnée mais devenue de plus en plus en plus irrespirable et anxiogène. Le temps est à la mobilisation de tous pour faire reculer le mal et soigner nos maux. La vérité sera en temps voulu, sue, connue et reconnue.
Alors confortablement installés dans nos bureaux délocalisés, touchons du doigt les vérités et notamment souvenons-nous de celle d’un proverbe ayant la même nationalité que le premier des pangolins covidés :
« Une route peut prendre mille directions, la vérité n'en connaît qu'une. »
Sébastien Ménard, est un ancien Conseiller ministériel actuellement Conseiller chargé de la stratégie au sein d’un moteur de recherche européen. Ses réflexions portent sur la place de la souveraineté technologique et culturelle française. Il travaille également sur les grandes mutations digitales. Il est l’auteur du Manifeste du collectif « Elles, les audacieuses ! »
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