Avec la "Semaine Verte", l'Allemagne fête la "pureté" de sa bière

Auteur(s)
La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 21 janvier 2016 - 19:52
Image
Bière semaine verte Allemagne
Crédits
©Tobias Schwarz/AFP
La "Semaine verte" a démarré le 15 janvier à Berlin.
©Tobias Schwarz/AFP
Du 15 au 24 janvier se tient la "Semaine verte" en Allemagne où le pays fête le "décret de pureté" qui régit la composition de ses bières. Décret vieux de 500 ans que certains aimeraient pouvoir assouplir un peu pour essayer de nouvelles choses.

Orge, houblon, eau, et rien d'autre. Un "décret de pureté" régit la composition des bières allemandes, un impératif dont l'Allemagne fête cette année avec fierté les 500 ans mais que certains aimeraient assouplir pour permettre plus de créativité.

Le salon de l'Agriculture de Berlin, la "Semaine Verte" (15 au 24 janvier), marque l'ouverture des festivités, qui vont s’égrainer tout au long de l'année, culminant le 23 avril, date exacte de l'édiction du décret en 1516.

"Nous voulons qu'à partir de maintenant, dans nos villes, nos marchés et nos campagnes, à aucune bière ne soient ajoutés d'autres éléments qu'orge, houblon et eau", décrétait alors le duc Guillaume IV de Bavière à Ingolstadt.

En édictant ce qui est considéré comme l'une des plus vieilles lois alimentaires au monde, il avait à cœur la santé publique, à une époque où fleurs, copeaux de bois ou encore goudron pouvaient se retrouver dans le breuvage, lui-même partie intégrante du régime alimentaire au quotidien. Avec pour conséquence au mieux des troubles digestifs, au pire des empoisonnements mortels.

Circonscrit à la Bavière, le décret s'est étendu à mesure que cet Etat a grossi, puis a été adopté par les Etats et duchés voisins. En 1907, une loi est venue généraliser le principe à toute l'Allemagne.

Entre temps la levure avait fait son entrée dans la liste des ingrédients, mais aujourd'hui encore, "contrairement aux confrères à l'étranger, les brasseurs allemands n'utilisent ni arômes artificiels, ni enzymes ni conservateurs", se félicite Hans-Georg Eils, président de la Fédération allemande des brasseurs. Les produits qui y dérogent ne peuvent pas s'appeler bière, mais "mélange à base de bière".

"Le décret de pureté avait aussi une fonction protectionniste", relève Frank-Jürgen Methner, spécialiste du sujet à l'Institut alimentaire de l'Université Technique de Berlin.

La disposition a en effet opportunément servi de barrière à l'entrée pour les bières étrangères - alors que la pureté des bières allemandes était, en revanche, un argument de vente à l'export.

Dans les années 1990, une plainte devant la justice européenne a forcé l'Allemagne à ouvrir son marché aux bières venues d'ailleurs. Aujourd'hui les marques étrangères revendiquent quelque 8% de la consommation annuelle du pays. Mais celle-ci est en constant déclin: elle est tombée à 107 litres par personne et par an, contre 150 dans les années 70.

"Les bières munichoises sont tellement bonnes, je crois vraiment qu'il n'y a pas mieux". Comme Nick Zanic, croisé dans un bar en Bavière, beaucoup d'Allemands cultivent un certain chauvinisme en matière de consommation de leur breuvage national.

Le décret de pureté est une composante essentielle de ce succès, assure Lothar Ebbertz, directeur de la Fédération bavaroise des brasseurs. "Je pense que nous sommes bien avisés de nous y tenir", assène-t-il. Selon un sondage réalisé pour le compte de la fédération nationale, 85% des Allemands sont du même avis.

Malgré tout, le décret a aussi ses détracteurs, qui considèrent que, trop restrictif, il représente un frein à la créativité.

"Il y a des petites brasseries et des producteurs de bière artisanale (craft beer) qui voudraient expérimenter, se lancer dans des créations plus osées", confirme le porte-parole de la grande brasserie munichoise Hofbräu München, Stefan Hempl.

"Qu'est-ce-qu'on peut objecter à un coing bio ou de la coriandre? Qu'est-ce-qui n'est pas pur dans ces ingrédients?", s'interroge Simon Rossmann, directeur technique de Giesinger Bräu, une autre brasserie munichoise. Il voudrait donner "des goûts différents" à ses bières avec de tels ingrédients.

A ces envies de sortir des sentiers battus, les tenants de la tradition rétorquent que les ingrédients permis offrent déjà toute une palette de possibilités.

Le houblon permet d'expérimenter, selon Lothar Ebbertz, qui assure que "de nouvelles cultures donnent à la bière des notes fruitées, qui vont vers la mangue, ou la pêche", sans avoir à ajouter de fruits.

Frank-Jürgen Methner voit lui aussi suffisamment de déclinaisons possibles en jouant en outre sur la levure, sans toucher au décret de pureté, arguant qu'"en ces temps de forte attention portée à ce que l'on mange, la demande pour la bière fabriquée selon l'impératif de pureté augmente".

 

À LIRE AUSSI

Image
Armelle et Dominique Sialelli.
Brasserie Pietra : la bière Made in Corse
Créée à partir de rien, la Brasserie Pietra est aujourd’hui devenue un des fers de lance de l’économie corse. Une réussite qui doit tout au flair des époux Armelle et ...
05 novembre 2014 - 12:17
Société
Image
Bière de Noël ambrée et salade de langoustine.
Bière de Noël, l’invitée surprise du réveillon
Boisson populaire par excellence, la bière a du mal à se faire une place durant les fêtes, entre saumon et champagne. Pourtant les "bières de Noël", remises au goût du...
16 décembre 2014 - 16:10
Lifestyle
Image
Des verres de bière.
On boit sa bière plus vite dans un verre arrondi, affirme une étude
La forme du verre dans laquelle on boit sa bière aurait un effet sur la vitesse de consommation, selon une étude britannique publiée début mai. Et pas qu'un peu: un co...
12 mai 2015 - 16:58
Lifestyle

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Les dessins d'ARA

Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.