"A Ciambra" : les 400 coups à l'italienne (VIDÉO)
En Calabre, à la pointe de la botte de l'Italie, les communautés roms et les immigrés africains survivent comme ils le peuvent. L'enfance et l'adolescence y sont souvent difficiles mais les caractères se forgent vite, comme le montre le film italien A Ciambra, qui sort ce mercredi 20 sur les écrans.
Au sein de sa famille de Roms, Pio a 14 ans et veut grandir vite. Comme son grand frère Cosimo, il boit, fume et apprend l’art des petites arnaques de la rue. Mais quand Cosimo est arrêté par les carabiniers et mis en prison après un cambriolage, Pio se sent obligé de prendre sa place pour veiller sur la famille et lui assurer ses moyens de subsistance.
Pio va dérober une valise dans un train arrêté à la gare, Pio va conduire une voiture volée pour la rendre à son propriétaire, Pio va apporter un poste de télé aux immigrés africains dans leur campement, Pio va tenter de cambrioler la villa d'un gitan d'un clan rival. Tout cela pour quelques dizaines d'euros.
Dans son nouveau rôle, parfois trop grand pour lui, l'adolescent reçoit les conseils et la protection d'un adulte, un immigré burkinabé, qui tente de lui enseigner d'autres valeurs: l'honnêteté, la fierté, l'estime de soi. Pas facile, surtout que les Roms et les Africains ne s'aiment guère…
(Voir ci-dessous la bande-annonce du film):
Le film, qui a été présenté à la Quinzaine des réalisateurs au dernier Festival de Cannes, est joué par des comédiens non-professionnels, qui interprètent leur propre rôle, notamment Pio Amato et sa famille. "J’ai rencontré la famille Amato pour la première fois en 2011. Le jour où ma Fiat Panda, dans laquelle se trouvait tout mon matériel de tournage, a été volée", raconte le réalisateur. "C’était à Gioia Tauro où nous tournions A Chjàna (le court-métrage qui a inspiré plus tard Mediterranea). Dans cette ville, quand une voiture disparaît, la première chose à faire est +d’aller voir les gitans+. Et c’est ainsi que j’ai découvert la Ciambra. Je suis immédiatement tombé amoureux de cet endroit, de son énergie".
Filmé caméra à l'épaule, avec parfois des gros plans qui donnent le tournis (certains critiques ont parlé de "Dardenne à l'italienne"), le film attire l'attention à la fois par son côté fiction (il y a un certain suspense dans les petits délits de Pio et sa bande) et son côté documentaire: décharges et bidonvilles, petite délinquance, vols de voitures, femmes qui boivent comme les hommes au dîner (sauf la mamma), gitans qui insultent les immigrés africains, nuits où l'on danse dans des hangars désaffectés avec la musique à fond, enfants livrés à eux-mêmes, gamins de 5 ans qui fument et disent à leur grande sœur "Je te pisse dans la bouche"…
Le film porte sur ces personnages réels un regard quasi documentaire, presque froid, sans discours moralisateur ou misérabilisme politiquement correct. Mais le réalisateur ne s'interdit pas une empathie certaine pour le jeune Pio Amato, presque de toutes les scènes, qui crève l'écran avec un naturel étonnant. Dans le film, explique le réalisateur, "il est certes question de relations entre les communautés, de pauvreté, de déterminisme et de stéréotypes, d’illégalité, etc. Mais surtout de Pio, de qui il est et de qui il pourrait devenir".
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