Les cocoricos de FranceSoir : Alpcontrol, le sur-mesure du ski ultraléger

Auteur(s)
Yan Labêche, journaliste pour FranceSoir
Publié le 01 juin 2021 - 18:29
Mis à jour le 03 juin 2021 - 11:42
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Alpcontrol a créé des chaussures et des skis révolutionnaires ultralégers conçus pour le ski de randonnée mais qui se révèle solides et performants aussi pour le ski alpin.
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Installée dans la Drôme, la société Alpcontrol révolutionne l’alpinisme. Plusieurs fois primée en tant que société innovante et soutenue par Oseo Innovation, elle a pu créer des chaussures et des skis révolutionnaires ultralégers conçus pour le ski de randonnée mais qui se révèle solides et performants aussi pour le ski alpin.

Alain Calmet, le fondateur d’Alpcontrol est un artisan. Ses inventions sont à mettre au rayon des petits bijoux d’innovation à la française. Il faut dire qu’Alain Calmet a toujours baigné dans un univers scientifique. Entre son père ingénieur à Radio France et sa mère, professeur de physique, il n’était pas rare de parler sciences à table. On réfléchit en mathématiques. Même les gestes du quotidien se calculent. « On passait notre temps à calculer, à compter et à prévoir, concède Alain Calmet. Même dans la vie de tous les jours, pour mettre en place un tuyau d’arrosage dans mon jardin, je fais appel à la physique pour savoir quel diamètre supporterait la charge et le meilleur débit. Je vois des algorithmes partout. (rires)»
 
Le quinquagénaire natif de Boulogne-Billancourt grandit en région parisienne, bien loin de l’univers de la montagne. Après son bac en 1987 et ses classes préparatoires, Alain Calmet enchaine avec une formation d’ingénieur des Arts et Métiers à Aix en Provence. « L’avantage de ce genre de formation est qu’on est moins dans le théorique. On apprend beaucoup de techniques, l’usinage, la soudure, le travail du bois, etc. On est en phase avec la réalité des matières et on peut considérer que nous avons un peu plus les mains dans le cambouis. »
 
Attiré par la mécanique et les matériaux, il finalise sa formation par un DEA de mécanique des matériaux hétérogènes à Paris. Une plongée dans l’univers du composite. « L’avantage, c’est sa légèreté, indique Alain Calmet. Avec les fibres contenues dans ces matériaux, on peut avoir une résistance orientée. On optimise ainsi le poids, que ce soit fait à base de carbone, de fer, etc…Le bois naturel est aussi un très bon matériau si on le prend dans le sens des fibres. »
 
Ce goût pour le terrain lui ouvre les portes d’une entreprise prestigieuse pour les ingénieurs : Gaz de France (devenue depuis Engie). Chef de projet à plus de 5000 euros nets par mois, il se charge de construction de pipelines, de tuyaux sous terre et même d’une rénovation d’un stockage souterrain mise en place par 400 personnes et pour un coût de 200 millions d’euros. Le mariage avec GDF durera 13 ans. Dégouté par la stratégie de l’ancien PDG, Jean-François Cirelli, son intérêt faiblit et les projets perdent de leur superbe. Souhaitant aussi quitter la région parisienne et se lancer dans l’innovation, il tourne la page et part s’installer près de Montélimar dans la Drôme pour créer sa propre affaire. Grâce à des économies amassées durant ses années dans le gaz, il arrive à rassembler 400 000 euros. Son objectif : travailler dans un premier temps sur des chaussures. En 2007, Alpcontrol voit le jour. « Je l’ai créé à Saussey. Au début, nous avons développé un appui tibia, sorte d’exosquelette pour pouvoir skier avec des chaussures d’alpinisme. Cela permet d’avoir des chaussures très souples et très légères à la montée. Ensuite, on dispose d’un bon appui pour pouvoir descendre avec les skis. »
 
Passionné d’informatique, il met en route un site internet. Tour à tour commercial, ingénieur et ouvrier, son procédé « Mountain Spring » voit le jour un an et demi après sa création. Tout de suite, les passionnés d’alpinisme et les spécialistes de la discipline font appel à lui.  « Mon produit n’avait pas vraiment de concurrence. Ces chaussures étaient un succès technique mais un flop commercial car il s’agissait d’un produit de niche, adressé à quelques dizaines de personnes par an. »
 
Pas découragé et bénéficiant d’une superbe image de marque, il se lance dans le prototype du « Black Powder ». Avec ses restes d’études de la matière, il arrive à développer un ski ultra léger qu’il garantit 10 ans. Dans ce marché ultra-concurrentiel, il se démarque par la structure du coût du ski. « Pour comprendre le marché du ski, il faut voir ce que comprend le prix. Il faut compter 80 euros de matière. L’usine qui le fabrique le vend à 150 euros à la marque. Celle-ci va faire appel à des distributeurs et à des détaillants. Le prix va passer à 350 puis 700 euros en magasin. Pour ma part, j’ai misé sur la matière en premier. Je vends en direct et peux me permettre de prendre une meilleure matière à 150 euros. Entre la main d’œuvre et la garantie de 10 ans, j’arrive à un prix de 800-900 euros. Internet m’a permis de maintenir mon activité. Avec le circuit classique, on serait à 1500 euros. J’ai perdu l’ambition d’avoir une grande entreprise. Je préfère le côté artisanal. »
 
Bon an, mal an, le chiffre d’affaires se maintient. L’épisode Covid a failli coûter la vie à l’entreprise. Toutefois, avec les remontées à l’arrêt, le ski de randonnée a la côte. Alain Calmet espère qu’à long terme, une proportion non négligeable de passionnés prolongera dans l’activité. 
 
Photographe amateur, le fondateur d’Alpcontrol est également contributeur à Wikipédia et à Linux. Il est persuadé que la révolution innovatrice passera par le collaboratif. « C’est devenu presque une philosophie de ce que l’humanité peut faire de mieux. La concurrence des hommes peut être contre-productive. Auparavant, j’étais dans la logique des brevets. J’ai cessé car j’ai mon savoir-faire. Bloquer tout avec des bouts de papier empêche l’humanité d’avancer. Les innovations de demain seront dans l’open source. En partageant, on multiplie les moyens d’arriver à un résultat. »

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