Thalys : la piste djihadiste se confirme

Soupçonné d'avoir voulu commettre un attentat dans un Thalys, vendredi 21, Ayoub El-Khazzani nie tout acte terroriste depuis le début de sa garde à vue. Mais les enquêteurs ont découvert qu’il avait regardé un site djihadiste avant de monter dans le train.

L’enquête progresse. Afin d’y voir plus clair sur les intentions réelles d’Ayoub El-Khazzani, l’auteur présumé de l’attentat du Thalys vendredi 21, les enquêteurs ont tenté de faire parler les deux téléphones portables retrouvés sur lui au moment de son interpellation. Et les recherches se sont avérées fructueuses. Selon une source proche du dossier, le suspect aurait consulté une vidéo de chants djihadistes sur son mobile juste avant de monter dans le train. "Il a regardé cette vidéo entre le moment où il a acheté son billet et l’instant où il est entré dans le train", quelques heures plus tard, a expliqué cette source.

Après une quatrième journée de garde à vue, qui s’est achevée ce mardi en début d’après-midi, Ayoub El-Khazzani, dont le parcours présente de nombreuses zones d'ombre, devrait être déféré ce mardi soir devant un magistrat du parquet antiterroriste de Paris pour être présenté à la justice. Fiché pour son profil d’islamiste radical par les services de renseignement de quatre pays (Espagne, France, Allemagne, Belgique), le suspect continue de réfuter le caractère terroriste de son action. Depuis le début de sa garde à vue il y a trois jours, il n’a pas changé de version.

Le suspect assure toujours avoir trouvé la kalachnikov, avec laquelle il a tiré, dans une valise dans un jardin public près de la gare de Bruxelle-Midi, là où il avait l’habitude de dormir en tant que SDF. C’est à ce moment-là qu’il aurait eu l’idée de menacer les voyageurs avec pour les dépouiller. S’il tient bon dans son explication, les enquêteurs ne croient pas en son histoire. Car outre le fusil d’assaut, il avait également en sa possession neuf chargeurs, un pistolet Luger et un cutter. De plus, son profil et son parcours inquiètent les enquêteurs, qui ont la conviction qu’il a bénéficié d’aide extérieure pour planifier l’attentat.

Né le 3 septembre 1989, Ayoub El-Khazzani est originaire de Tétouan (nord du Maroc). Il aurait vécu en Espagne à partir de 2007. D'abord à Madrid puis à Algesiras, ville du Sud proche du détroit de Gibraltar, important lieu de transit pour la drogue venue d'Afrique du Nord. Selon le quotidien espagnol El Pais, il aurait connu trois fois la détention provisoire pour trafic de drogue.

A Algesiras, il aurait fréquenté une mosquée salafiste, attirant l'attention des services de renseignement espagnols qui ont alerté leurs homologues français en février 2014. Dès lors, Ayoub El-Khazzani a fait l'objet d'une fiche "S" (Sûreté de l'Etat). De février à avril 2014, il a travaillé en région parisienne pour le compte d'une entreprise de téléphonie, Lycamobile, mais son contrat n'aurait pas été prolongé, faute de papiers en règle.

Après cette date, les zones d’ombre sont nombreuses. Un an plus tard, le 10 mai 2015, le suspect aurait été repéré, à Berlin d’où il s’est envolé pour la Turquie. Une destination qui pourrait laisser croire à un éventuel passage en Syrie où il aurait pu se radicaliser. Mais d’après son avocate qui l’a assisté aux premières heures de sa garde à vue, il a raconté s’être déplacé les six derniers mois en Belgique, en Allemagne, en Autriche, en France et en Andorre.

Alors que des perquisitions sont actuellement menées en Belgique dans l’entourage du suspect, le procureur de la République de Paris, François Molins, tiendra une conférence de presse ce mardi à 17h, a annoncé le parquet, qui devrait ouvrir une information judiciaire, préalable à une possible mise en examen.