Les Jeux "OlymBrics"
Le sport de haut niveau et ses grands rendez-vous sont éminemment politiques. Dernière matérialisation en date de cette évidence, les pays membres des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud) ont annoncé fin août 2023, à l'issue de leur réunion tenue en Afrique du Sud, l'organisation d'un événement sportif planétaire, les Jeux des BRICS, sortes de Jeux Olympiques des puissances émergentes.
Après une première annonce, en mai 2023, du président Vladimir Poutine, qui avait demandé à son gouvernement, et notamment son ministre des Sports, Oleg Matytsin, de lui soumettre des propositions pour l'organisation d'un événement sportif international, c'est bien la Russie qui organisera ces Jeux des Brics 2024, du 20 au 23 juin 2024 à Kazan, un mois avant les Jeux Olympiques 2024, qui auront lieu à Paris du 26 juillet au 11 août prochains.
Tant dans sa forme que dans son contenu, ce nouveau rendez-vous du calendrier sportif international peut être vu comme une réponse très politique des BRICS au fait qu'en raison de la guerre en Ukraine, la Russie s'est vue interdire de s'aligner aux Jeux Olympiques de 2024. Une fédération russe écartée des Jeux suite à son refus d'y participer sous drapeau neutre (la Biélorussie est dans la même situation), alors que l'Ukraine, elle, s'est vu autorisée à participer à l'événement sous ses couleurs.
L'esprit Coubertin mort et enterré ?
Ce ne sont pas seulement les cinq pays fondateurs des BRICS (en 2011) qui vont participer à ces Jeux "OlymBrics", mais tous ceux ayant manifesté leur désir de rejoindre l'organisation, soit environ une cinquantaine de nations et environ 4 500 athlètes, qui devraient s'affronter dans 25 disciplines.
Au sein du Comité International olympique (CIO), seuls 35 pays ont refusé la participation de la Fédération de Russie aux JO. Notons que 171 pays n'étaient pas contre et que 82 d'entre eux avaient même accepté le principe d'une participation de la Russie sous ses couleurs et avec son hymne national.
Il fut une époque, très lointaine (et finalement assez courte) où, imprégnés de la philosophie du baron Pierre de Coubertin, inlassable promoteur des Jeux modernes, les événements sportifs planétaires avaient un côté sacré et matérialisaient l'idée d'une trêve internationale s'imposant à l'humanité afin que la paix règne sur le monde le temps des épreuves.
Le baron Pierre de Coubertin, rénovateur des Jeux Olympiques (Crédit : Nicolas Jeanneau).
Rappelons-nous également de la Coupe du monde de football 1986 qui eut lieu au Mexique quatre ans après la guerre des Malouines, conflit armé qui avait opposé l'Angleterre à l'Argentine suite à l’invasion des îles Malouines par l’Argentine (cette guerre, qui débuta le 2 avril 1982, ne dura que 74 jours et se termina à la suite de la reddition argentine). Cette opposition armée n'avait pas empêché (bravo la FIFA) que l'Angleterre et l'Argentine participent à la compétition sous leurs couleurs et que leurs hymnes respectifs soient joués avant les rencontres.
Main de Dieu et "But du siècle"
Mieux, les deux sélections se retrouvèrent face-à-face le 22 juin 1986 en quart de finale de la compétition sans que l'on déplore le moindre incident diplomatique. La fameuse "main de Dieu"* aura certes fait couler beaucoup d'encre (elle en fait toujours couler d'ailleurs). Mais sportivement, l'événement demeure mémorable, magnifié par l'un des plus beaux buts de l'histoire du football, pour certains le "But du siècle", œuvre de ce diable génial que fut Diego Armando Maradona qui slaloma sur une cinquantaine mètres au milieu de la défense anglaise, dribblant cinq défenseurs, avant de s'en aller tromper le gardien Peter Shilton. But de la victoire qui lui était tout à fait régulier.
Comme le veut le protocole, juste avant la rencontre, les capitaines des deux sélections échangèrent les fanions et se serrèrent la main. Et même si la rencontre fut « disputée » (au stade Azteca de Mexico) sous un soleil de plomb, les joueurs n'en vinrent jamais aux mains (à l'exception des gardiens... et de Maradona !). La rencontre se déroula certes dans un climat très tendu, mais on ne déplora aucune violence tant sur le terrain que dans les tribunes et à l'extérieur du stade...
On ne va pas refaire l'histoire de ce match légendaire. Mais n'oublions pas que les Anglais ont, eux aussi, été sacrés champions du monde en 1966 (contre la République fédérale d'Allemagne du "Kaiser" Franz Beckenbauer) grâce à un but plus que litigieux de Geoff Hurst accordé par l'arbitre, alors que le ballon n'avait pas complètement franchi la ligne de but.
Comme le dit fort justement le proverbe : "Il n'y a pas pire aveugle que celui qui ne veut pas voir."
* Formule employée par Diego Maradona, le capitaine argentin après la victoire de son Albiceleste 2 à 1, pour expliquer le fait que son but fut accordé alors qu'il avait marqué de la main, ce que tout le monde avait fini par voir sauf l'arbitre. Il faut dire qu'à l'époque, le recours à la vidéo n'existait pas...
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.