L’avortement sans condition jusqu’à neuf mois préconisé par l’OMS

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FranceSoir
Publié le 29 mars 2022 - 21:03
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Alicia Petresc / Unsplash
Femme enceinte
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L'Organisation mondiale de la santé (OMS) appelle les gouvernements à supprimer la limite de temps légale pour l'avortement, même après 24 semaines, comme le rapporte le Daily Mail. Elle déclare que les lois qui visent à empêcher l'interruption de grossesse à tout moment risquent de violer les droits des "femmes, des jeunes filles ou des autres personnes enceintes". L'OMS propose donc l’avortement sans limitation de temps et sans obligation de justification médicale.

La pression de l’OMS en faveur de l’avortement sans condition

C’est un document de 210 pages que l’OMS publie. Il détaille de nouvelles consignes sur la prise en charge de l’avortement. Parmi la multitude de recommandations faites aux gouvernements, on peut notamment lire qu’elle préconise :

- d’autoriser l'avortement en toutes circonstances — en excluant les lois interdisant les interruptions de grossesse parce que le fœtus est du "mauvais" sexe.
- de cesser d'exiger que les femmes aient besoin de l'approbation d'un médecin ou d'une infirmière pour avoir une interruption de grossesse.
- d'établir des systèmes de "pilules par la poste" afin que les femmes puissent recevoir des médicaments abortifs après un appel téléphonique.
- de limiter le droit des professionnels de santé à refuser de participer à des avortements pour des raisons de conscience. 

L’avis des Nations unies

Les Nations unies, qui supervisent l'OMS, se sont félicitées de la suppression suggérée de ce qu'elles ont appelé "des obstacles politiques inutiles à l'avortement sans risque", notamment "des limites quant au moment où un avortement peut avoir lieu".

Le débat éthique sur la question de l'acception morale liée à suppression du fœtus après 22-24 semaines - alors qu’à partir de ce temps de gestation, le fœtus a de bonnes chances de survie s’il naît prématurément grâce aux progrès de la médecine - n'est pas posé dans ce document qui présente le seul point de vue de la femme enceinte. Le "droit de l'enfant à naitre" n'est pas évoqué.

Des recommandations destinées à favoriser un accès plus sûr aux femmes

Dans de nombreuses régions du monde, encore aujourd’hui, des obstacles peuvent entraîner des retards importants dans l’accès au traitement et exposer les femmes à un risque accru d’avortement dangereux, de stigmatisation et de complication de santé.

Encore aujourd’hui, plus de trois quarts des pays prévoient des sanctions légales contre l’avortement, qui peuvent aller jusqu’à de lourdes amendes pour les personnes qui le pratiquent. Une situation qui engendre de multiples avortements clandestins très risqués pour la santé des femmes.

Cette situation clandestine, la France l’a connue jusqu’à ce que la loi de Simone Veil y mette un terme. Le texte de loi du 17 janvier 1975 relatif à l’interruption volontaire de grossesse répondait à une situation d’urgence sanitaire, à savoir les 300 000 avortements clandestins pratiqués sur le territoire français. 

Des avortements qui, la plupart du temps, étaient réalisés dans un cadre non médical avec des méthodes moyenâgeuses, comme l’utilisation de plantes, la prise de grosses quantités de médicaments comme l’aspirine ou certains antibiotiques, ou encore le percement de l’œuf par aiguilles à tricoter. Des pratiques risquées qui entraînaient régulièrement des complications graves comme des infections, septicémies, hémorragies utérines, ou déchirures des parois de l’utérus pouvant conduire au décès de la femme. 

Encadrant la dépénalisation de l’avortement en France, le texte proposé par Simone Veil autorisait l’interruption volontaire de grossesse (IVG) jusqu’à 10 semaines dans un cadre hospitalier.

Depuis son vote, cette loi n’a cessé d’être modifiée. En 2001, sous le gouvernement de Lionel Jospin, le délai a été prolongé à 12 semaines et le 2 mars 2022, un texte porté par la députée Albane Gaillot a prolongé ce délai à 14 semaines.

Parallèlement à l’IVG, une loi du 6 août 2021 relative à la bioéthique prévoit un autre type d’avortement : l’interruption médicalisée de grossesse (IMG), aussi appelée avortement thérapeutique. Cette intervention ne peut être pratiquée seulement lorsqu’il existe un risque pour la santé de la femme enceinte ou "si la probabilité est forte que l’enfant à naître soit atteint d’une affection d’une particulière gravité reconnue comme incurable au moment du diagnostic".

Aspect philosophique, aspect biologique et aspect juridique de l’avortement

Depuis des millénaires, l’homme s’est posé la question de la nature et du statut de l’embryon humain. De ces questions toujours en débat découlent des lois, des autorisations et des conditions à l’avortement.

Ceux qui se prononcent contre cette pratique défendent l’idée, qu’à n’importe quel stade de la grossesse, l’embryon est une personne humaine et que la vie doit être respectée dès la conception. À l’opposé de cette position, le fœtus serait un matériel biologique jusqu’à la naissance. Entre ces deux extrêmes, entre ceux que l'on appelle les "pro-vie" et les "pro-choix", il existe une diversité de positions nuancées.

Au cours des dernières années, les progrès scientifiques ont conduit à tenter d’identifier le moment où le fœtus deviendrait une personne. Pour certains, le début de l’activité cérébrale serait ce moment. Pour d’autres, il s’agirait de la viabilité (entre 22 et 24 semaines). Enfin, certaines personnes pensent qu'il est impossible de déterminer scientifiquement le moment exact où le fœtus devient une personne.

À partir de ces différentes attitudes, on comprend qu’il ne soit pas toujours aisé d’arbitrer et que les décisions varient en fonction des cultures, des religions ou de l’éthique.

En France, le débat autour de l'avortement hors délai avait déjà suscité une forte polémique au moment du projet de loi bioéthique. Un amendement adopté en août 2020 par l'Assemblée prévoyait qu'une interruption médicale de grossesse pouvait être réalisée jusqu'au terme dans les situations de détresse psychosociale. À cette occasion, Michel Onfray, qui s'intéresse à l'évolution nerveuse du fœtus, "pour pouvoir définir une distinction entre le vivant et l'humain, entre un être potentiel et un être réel", se demande ce qu'est cette notion de détresse psychosociale. Estimation complexe qui recouvre de multiples réalités allant selon lui de la perte d'un travail, à la rupture avec son compagnon ou un changement sur le désir d'enfant, des situations qui ne justifient pas que l'on commette un tel acte. 

Penser toutes ces notions permet au philosophe de concevoir l'avortement comme une possibilité. En revanche, il insiste sur la nécessité d'en fixer les limites, au-delà desquelles cet acte deviendrait un infanticide.

Or, il semble que les nouvelles propositions de l’OMS oublient le fœtus, puisqu’il n’existe plus aucune limitation de temps ni d’obligation de justification médicale pour pratiquer un acte qui tend de plus en plus à être banalisé.

"Je le dis avec toute ma conviction : l’avortement doit rester l’exception, l’ultime recours pour des situations sans issue." déclarait Simone Veil en présentant la loi relative à l'interruption volontaire de grossesse. 

Poursuivant son discours, elle ajoutait : "Mais comment le tolérer sans qu’il perde ce caractère d’exception, sans que la société paraisse l’encourager ? Je voudrais tout d’abord vous faire partager une conviction de femme – je m’excuse de le faire partager une conviction de femme - je m’excuse de la faire devant cette assemblée presque exclusivement d’hommes : aucune femme ne recourt de gaité de cœur à l’avortement. Il suffit d’écouter les femmes". 

En France, qu’il s’agisse d’une IVG ou d’une IMG, les projets restent encadrés. Reste à savoir pour combien de temps.

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