Elections US entre Trump et Harris : Le Washington Post ne soutient aucun candidat, une première depuis 40 ans

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France-Soir
Publié le 28 octobre 2024 - 10:44
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Baradat / AFP
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Pour la première fois depuis une quarantaine d’années, le Washington Post ne soutiendra aucun candidat lors des élections présidentielles américaines. Elections qui se tiendront dans une semaine et qui opposeront la démocrate Kamala Harris au républicain Donald Trump. Le papier soutenant la vice-présidente était prêt mais la décision est tombée, annoncée vendredi par le directeur général, William Lewis et attribuée, malgré le démenti de ce dernier, au propriétaire du journal, à savoir le fondateur d’Amazon, Jeff Bezos. L’annonce a été très mal accueillie, aussi bien par le personnel du journal que par certains contributeurs et éditorialistes, dont Robert Kagan qui a déposé sa démission. 

Depuis l'élection présidentielle de 1988 entre le républicain George H. W. Bush et le démocrate Michael Dukakis, pendant laquelle le “WaPo” a refusé de prendre position, le quotidien américain s’est toujours prononcé en faveur de l’un des candidats, souvent démocrate comme cela été le cas avec Jimmy Carter en 1976, Barack Obama en 2008, Hillary Clinton en 2016 et Joe Biden en 2020.  

“Revenir à nos racines” 

Cette année encore, le soutien du Washington Post était encore prévu pour la candidate démocrate, Kamala Harris, qui a remplacé Joe Biden fin juillet après son abandon face à des appels incessants à se retirer. Deux membres du conseil d’administration, Charles Lane et Stephen W. Stromberg ont travaillé sur des ébauches d’un projet de soutien à l’actuelle vice-présidente. “Normalement, nous aurions eu une réunion, examiné un brouillon, fait des suggestions, et édité le texte”, a témoigné un membre du personnel au Columbia Journalism Review, expliquant que “le processus s’est enrayé il y a environ une semaine”.  

“Nous pensions que nous étions en train de chipoter sur les formulations – et non pas sur la question de savoir s’il y aurait un endossement”. Ajouta-t-il. La décision annoncée vendredi confirme leurs craintes. "Le Washington Post ne soutiendra aucun candidat à la présidentielle lors de cette élection, ni lors d'aucune autre élection présidentielle à venir", a fait savoir Will Lewis, le directeur général du journal, dans un communiqué. “Nous revenons à nos racines qui consistent à ne pas soutenir de candidats à la présidentielle." 

Pour justifier ses dires, il rappelle le contenu d’un éditorial en 1960 dans lequel il est écrit que le WaPo “n’a soutenu aucun des candidats dans la campagne présidentielle [de 1960, Kennedy contre Nixon]. Cela fait partie de notre tradition et concorde avec notre position dans cinq des six dernières élections”. Des “endorsements, comme celui de 1952 en faveur du général Eisenhower ou celui de 1976 avec Jimmy Carter sont alors justifiés, par William Lewis, comme des “circonstances exceptionnelles” ou “compréhensibles”.  

Le quotidien fait à son tour un article sur l’annonce de son directeur général, en dévoilant plus de détails en coulisse. L’auteur de cet article fait savoir que cette décision, “annoncée 11 jours avant une élection que la plupart des sondages considèrent comme trop serrée pour être prédite, a suscité une condamnation immédiate et virulente d'une large part des abonnés, des personnalités politiques et des commentateurs des médias”.  

Un éditorialiste de longue date, Robert Kagan, a vite démissionné en signe de protestation. Un groupe de 11 chroniqueurs du Washington Post a cosigné un article condamnant la décision. “Des lecteurs et des sources en colère ont inondé les boîtes mail de nombreux membres du personnel avec leurs plaintes”, ajoute-t-on. Le journal Semafor a révélé qu’au cours des 24 heures suivant l’annonce du DG du WaPo, environ 2 000 abonnés ont annulé leurs abonnements. 

Le “respect de l’État de droit” et de “la liberté"  

Les deux journalistes, Bob Woodward et Carl Bernstein, qui ont révélé le scandale Watergate ayant mené à la démission de Richard Nixon en 1974, ont réagi dans une déclaration commune, qui cible directement le candidat républicain et ancien président. “Nous respectons l’indépendance traditionnelle de la page éditoriale, mais cette décision, à 12 jours de l’élection présidentielle de 2024, ignore les preuves écrasantes fournies par le Washington Post dans ses reportages sur la menace que représente Donald Trump pour la démocratie”.  

Le Washington Post attribue aussi la décision de ne plus publier de soutiens présidentiels à son propriétaire Jeff Bezos, selon quatre personnes informées de cette décision. William Lewis a vite démenti cette information. “Les informations concernant le rôle du propriétaire du WP dans la décision de ne pas publier d’endossement présidentiel sont inexactes. Il n’a pas reçu, lu, ni donné d’avis sur aucun projet de texte. En tant que rédacteur en chef, je ne crois pas aux soutiens présidentiels. Nous sommes un journal indépendant et devons soutenir la capacité de nos lecteurs à se faire leur propre opinion”, a-t-il affirmé. 

Anticipant les réactions “inévitables”, il a rappelé “les valeurs que le Post a toujours défendues et que nous espérons voir chez un dirigeant : le caractère et le courage au service de l’éthique américaine, la vénération de l'État de droit et le respect de la liberté humaine dans tous ses aspects”. 

De l’autre côté de l’Amérique, à Los Angeles, une pareille décision suscite aussi l’indignation. Il s’agit de Patrick Soon-Shiong, milliardaire propriétaire du Los Angeles Times, qui a également bloqué la publication d’un éditorial en soutien à Kamala Harris, de “peur d’ajouter à la division”. En réaction, plusieurs figures du journal ont démissionné. 

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