Tony Blair : de Bagdad à Davos, du caniche de Bush à un ersatz de Schwab
PORTRAIT CRACHE - Après avoir traîné son flair politique façon caniche de Bush sur les champs de bataille irakiens, Tony Blair, l'avocat devenu Premier ministre a su transformer le Parti travailliste en fer de lance du néolibéralisme, et est maintenant présenté comme le successeur idéal de Klaus Schwab à la tête du Forum économique mondial (WEF). L'homme qui n'a jamais hésité à sacrifier ses principes pour des profits, semble prêt à embrasser la mission de Davos : gouverner le monde tout en contrôle numérique sur fonds de privatisations à grande échelle, tout en continuant à ignorer les critiques sur ses antécédents de guerres et corruptions. Qui aurait cru que ce réformateur du Labour finirait par prêcher les doctrines de l'élite mondiale depuis les hauteurs alpines de la gouvernance globale ?
Après des études de droit au St John's College à Oxford, Anthony Charles Lynton Blair entame une carrière d’avocat. Il rejoint, par la même occasion, le Parti travailliste (Labour Party) mais son ascension est poussive. Il participe une première fois à des élections parlementaires en 1982 faisant bien pâle figure. Il obtient à peine 10% des voix. L’année suivante, il réussit à décrocher un siège de la circonscription de Sedgefield, située près de sa ville natale, Durham.
Un loup néolibéral dans la bergerie travailliste
Tony Blair commence à gravir les échelons. Il est d’abord un parlementaire d’arrière-ban, un membre du Parlement qui n'est ni secrétaire d'État ni membre du cabinet fantôme, n’occupant aucune autre fonction comme celles de whip ou de président d'un caucus. Militant du courant réformateur des travaillistes, il est alors nommé secrétaire à l’Energie puis à l’Emploi dans le “cabinet fantôme”, un comité de l’opposition officielle alternatif à celui du gouvernement, dont chaque membre est chargé de surveiller un ministère. En tant que secrétaire fantôme à l’Emploi, Tony Blair se voit confier la mission de scruter les activités du ministère officiel.
En 1992, Blair devient donc secrétaire d'État fantôme sous John Smith, le chef des travaillistes. A ce moment-là, il est le leader de la faction réformatrice. L’ancien avocat estime que le Labour Party s’est enfermé dans sa vision traditionnelle et sa base ouvrière, ignorant la classe moyenne qui s’est élargie suite à la croissance socio-économique du pays.
John Smith meurt subitement deux ans plus tard d’une crise cardiaque. En tant que secrétaire d’État fantôme, Tony Blair est en pôle position dans les sondages. Il bat ses deux adversaires lors des élections du Labour et devient le chef de l’opposition. A cet effet, il devient également conseiller privé de la couronne.
En attendant les législatives de 1997, il s’attèle à réformer le Labour Party en appliquant sa doctrine, le “New Labour”. La première marche consiste alors à revoir la constitution ou le Règlement intérieur de la formation politique. L’article IV, datant de 1918 et énonçant l’engagement des travaillistes pour la propriété commune des moyens de production, est amendé. Le parti est désormais “socialiste démocrate” et abandonne la nationalisation au profit de la privatisation.
La manœuvre est risquée puisque de nombreux militants de l’aile gauche du Labour Party s’opposent à cette réforme mais le “New Labour” survit. Tony Blair tire profit de la popularité ascendante des travaillistes sur les conservateurs, fragilisés par des crises économiques. En 1997, il met fin à leur 18 ans de règne et devient à 43 ans le plus jeune Premier ministre du Royaume-Uni après Lord Liverpool (42 ans) en 1812.
La “doctrine Blair” le baratinage sur fond de servitude
Son premier mandat est celui des réformes et des changements. Sur le plan constitutionnel, il fait adopter la loi sur les droits de l’Homme, établit le Parlement écossais ainsi que l’assemblée du pays de Galles. Tony Blair retire la majorité des Lords qui ont hérité de leurs titres à la Chambre des Lords et instaure le poste de maire de Londres. Il instaure un salaire minimum, crée de nouveaux emplois dans le public et poursuit le désengagement de l’État ainsi que les privatisations. Celles-ci se traduisent par une reprise des réformes lancées par ses prédécesseurs, comme l’initiative pour le financement privé.
Son mandat est surtout marqué par la signature de l’accord de Belfast en 1998, favorisant le retour de la paix en Irlande du Nord. Son collaborateur de longue date, Gordon Brown, chancelier de l’Echiquier, accorde à la Banque d’Angleterre son indépendance.
Crédits : ARA
Sur la scène internationale, dans un monde unipolaire dominé par les États-Unis suite à la chute de l’URSS, Tony Blair se veut le prêcheur d’une “doctrine de la communauté internationale”. Une doctrine basée “sur la défense de valeurs et de principes” au détriment de l’intérêt national, la priorité pour les conservateurs.
Si l’accord de Belfast est un succès, la “doctrine Blair” est un désastre, tant les “valeurs” et “principes” que le Premier ministre entend défendre sont ambivalents. Il engage son pays dans cinq conflits en 6 ans. Après l’opération Desert Fox de 1998 en Irak, aux côtés de Washington, Londres mène encore la danse transatlantique en Bosnie ainsi qu’au Kosovo contre le serbe Slobodan Milosevic. Il déploie les troupes britanniques à Pristina pour soutenir Hashim Thaçi, actuel président kosovar, accusé d’être un chef de la mafia, un meurtrier et un trafiquant d’organes humains, et membre à l’époque de l'Armée de libération du Kosovo (UCK), tout en ayant accusé les massacres.
Après une visite dans la Russie de Vladimir Poutine en 2000 en pleine guerre de Tchétchénie, une intervention en Sierra Leone, ancienne colonie britannique, en 2000 puis l’Afghanistan en 2001 dans la guerre contre les talibans, Tony Blair, que l’on affuble du surnom de “caniche de Bush”, colle aux bottes du président américain pour envahir l’Irak en 2003. Londres le fait dans un remarquable excès de zèle qui va au-delà de l’envoi de troupes à Bagdad. Le Royaume-Uni sous Blair, porte-parole de l’Oncle Sam en Europe, est aussi actif sur scène qu’en backstage dans l’élaboration du mensonge.
Son argumentaire se base sur l’obligation de mettre fin aux programmes d’armes de destruction massive de l’Irak. Le cabinet du Premier ministre participera même à la rédaction du discours de Colin Powell devant le Conseil de sécurité des Nations unies, où le secrétaire d’État américain présentera au monde entier des échantillons supposés être des preuves de l’existence de ces armes en Irak. On reconnaît cette même année à Londres quelques “gaffes”. Pourtant, le gouvernement Blair s’entête et publie même un dossier de la CIA comme preuve supplémentaire, confirmant la véracité des faits face aux critiques répétées.
Malgré une politique étrangère décriée ainsi qu’une vaine tentative d’impeachment, Tony Blair, déjà réélu en 2001 pour un deuxième mandat, devient le Premier ministre travailliste à la plus grande longévité dans le poste et son parti remporte deux élections de suite. En 2005, il est réélu pour un troisième mandat et le Labour Party obtient, pour la première fois dans l’histoire du pays, la majorité absolue à la Chambre des communes. L’hégémonie ne va pas durer longtemps.
Le “New Labour”, des senteurs de dessous de bras du WEF
Le troisième mandat débute avec les attentats de Londres et de nombreux Britanniques associent ces événements tragiques à l’invasion de l’Irak. Ce n’est pourtant pas ce qui mettra fin au mandat de Tony Blair. Le scandale de corruption Cash for Honors éclate et révèle que plusieurs personnes ayant fait des dons importants au Parti travailliste auraient été proposées pour des titres de noblesse ou des sièges à la Chambre des Lords. Les conséquences sont lourdes puisque le Labour Party perd vite en popularité et Tony Blair, qui n’est pas inculpé, finit tout de même par annoncer sa démission, vite remplacé par Gordon Brown, son chancelier de l’Echiquier.
Que reste-t-il de la vie politique de Tony Blair ? Des enquêtes qui s’amassent à partir de 2010 pour faire la lumière sur les circonstances autour de l’invasion de l’Irak. Il est alors accusé d’avoir “menti” et d’avoir essayé “d'induire en erreur les députés, et le public”. Il nie, une autre commission, Chilcot, est alors mise sur pied. En 2015, il présente des excuses arguant “que les informations qu’il avait reçues étaient fausses”. Il reconnaît la responsabilité de Londres dans la hausse du terrorisme.
Pourtant, des années auparavant, lorsqu’une certaine Jacinda Ardern, une autre young global leader du WEF passée par le cabinet de Blair, lui demande ce qu’il “aurait fait différemment”, sachant que la vérité au sujet de l’Irak était désormais connue de tous, il rétorqua : “je me serais préparé à y rester plus longtemps”.
En 2016, le rapport Chilcot est encore plus accablant. Tony Blair a ignoré les avertissements des services de sécurité sur les risques qu’un tel projet expose le Royaume-Uni à des attentats sur son propre sol. Le va-t-en guerre a également priorisé la guerre sans tenter des approches diplomatiques ni préparer son armée.
Quant à sa reconversion elle sera très lucrative. Tirant profit de son réseau, il crée des sociétés de conseil et ses revenus se chiffrent en dizaines de millions de dollars. Il conseille JP Morgan ou encore LVMH. L’ancien premier Ministre interventionniste, financé par la Fondation Bill-et-Melinda-Gates, murmure même aux chefs de gouvernements africains les lignes néolibérales à suivre pour attirer les investissements. Quid de la “doctrine de la communauté internationale”, des “principes et des valeurs” ? Cette fois, ce sont plutôt les intérêts financiers qui prévalent. Business is business, que les clients soient des dictateurs ou des dirigeants peu soucieux des droits de l’Homme.
Quoique critiqué, Tony Blair est tout de même sollicité pour intervenir sur des questions d’actualités. Et sa tribune favorite est sans doute le Forum économique mondial (WEF). Quoi de mieux que Davos pour étoffer son portefeuille client et promouvoir les “idées neo-mondialistes de schwab” sur la gouvernance mondiale... sans oublier le contrôle des populations.
Fervent défenseur des campagnes de vaccination durant la pandémie de COVID et de l’usage des nouvelles technologies dans la lutte contre le virus et sa propagation, il appelait dès juin 2020 à la création “d'identifiants numériques” pour suivre “l'état” de la contamination des individus. Tony Blair traitait les personnes qui refusaient le “vaccin" controversé “d’idiots”, appelant, depuis Davos, sommet auquel il est tant habitué, à l’exploitation, pour les prochaines pandémies, d'une “infrastructure digitale adaptée” pour tracer “ceux qui ont été vaccinés ou pas”.
Tellement habitué au WEF, que depuis l’annonce par l’organisation du départ de son fondateur, Klaus Schwab, les spéculations vont bon train. L’envahisseur de l’Irak, celui qui prêche le néolibéralisme à travers le monde, est présenté comme le candidat idéal. Est-il prêt ? Sommes-nous prêt ?
Comme on disait par le passé dans le milieu du rugby, toujours fort illustré : un bon Anglais est un Anglais sur lequel on essuie ses crampons.
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