Les politiques se disputent l'héritage du général de Gaulle avant la présidentielle
Embouteillage à Colombey-les-deux-Eglises: de nombreux candidats à la présidentielle, de droite comme de gauche, ont honoré mardi en Haute-Marne la mémoire du général de Gaulle, 51 ans après sa mort, en contestant à l'extrême droite sa tentative de réappropriation de l'héritage gaulliste.
Signe que l'exécutif n'entend pas délaisser le terrain politique, Jean Castex, ancien membre de LR et "gaulliste social" revendiqué, a été dépêché sur place pour déposer une gerbe sur la tombe de l'homme du 18 juin, alors que se déroulait dans le même temps un Conseil de défense sanitaire.
"Tout le monde quelque part est un peu gaulliste, après il faut l'incarner dans son comportement au quotidien", a souligné le Premier ministre, qui s'est ensuite recueilli devant la Croix de Lorraine.
Ce pèlerinage du 9 novembre est un grand classique de la vie politique, plus encore à l'approche de la présidentielle. Il prend cette année des allures de bataille culturelle, les prétendants ciblant particulièrement le possible candidat Eric Zemmour.
En pleine compétition interne à droite, au lendemain de leur premier débat télévisé, les cinq candidats à l'investiture LR - Michel Barnier, Xavier Bertrand, Eric Ciotti, Philippe Juvin et Valérie Pécresse - ont déposé ensemble une gerbe, autour du président du parti Christian Jacob qui en a conclu: "la famille de la droite et du centre avance ensemble".
"Quand j'entends des personnes qui légitiment l'action de Pétain en disant qu'il a sauvé des juifs, ils ne peuvent pas se dire gaulliste", a souligné Mme Pécresse, en visant les sulfureuses sorties médiatiques de M. Zemmour. "On ne se laissera pas voler cet héritage par certains qui préfèrent Pétain à De Gaulle", a abondé le patron des députés LR Damien Abad.
"Ce n'est pas un moment de campagne, mais de recueillement, de fidélité", à celui qui était "le contraire d'un politicien", a souligné de son côté Michel Barnier, quand Xavier Bertrand a estimé que "la pensée gaullienne nous inspire et nous oblige".
A gauche, la candidate socialiste Anne Hidalgo fait du général un symbole dans la lutte contre l'"appropriation" de l'histoire par Eric Zemmour, absent à Colombey, contrairement à des rumeurs initiales, démenties par son entourage.
- Le Pen à Bayeux -
Mme Hidalgo s'est définie sur place comme "gaulliste du 18 juin", en louant le "courage immense", la "vision" du général qui "a pris des décisions impressionnantes" pour porter "l'honneur" de la France.
"Zemmour, c'est un polémiste, quand il parle de Pétain, je ne peux pas cautionner", affirmait au mémorial une spectatrice représentant la ville de Meximieux (Ain), Élisabeth Laroche, en déplorant la "récupération actuelle" autour du gaullisme.
"Tout le monde s'en revendique mais pas toujours à raison" ajoutait Claudine, 69 ans, pour qui "l'image de droiture et de simplicité du Général de Gaulle ne pourra pas s'effacer".
Arrivé sur la tombe du Général à la tête d'une imposante délégation de son mouvement Debout la France, le candidat souverainiste Nicolas Dupont-Aignan a estimé que "mettre sur un même plan Pétain et De Gaulle, c'est insupportable", dénonçant aussi ceux qui "détruisent l'indépendance de la France" et "viennent parader ici".
L'ex-Front national Florian Philippot, lui aussi candidat à l'Elysée, a également déposé une gerbe sur la tombe du général, disant croiser des politiques "qu'on ne voit jamais" d'habitude.
Eric Zemmour a ironisé à distance. "Aujourd'hui, pensant que j'allais annoncer ma candidature, toute la classe politique se déguise en Général De Gaulle (...) Je vous propose d'en rire: c'est ce qu'aurait fait le Général", a-t-il écrit sur Twitter.
La candidate du RN Marine Le Pen était, elle, à Bayeux (Calvados), où le général s'est exprimé en juin 1944 et juin 1946. Mardi matin, elle a déposé une gerbe devant la Croix de Lorraine, à Courseulles-sur-mer, saluant l'héritage du général, malgré l'histoire de son parti qui l'a longtemps combattu.
"Je choisis, comme (de Gaulle), le courage de l'action et m'inscris dans son legs politique pour voir renaître une France souveraine, indépendante et fière", a déclaré la candidate du Rassemblement national sur la place de Gaulle à Bayeux, là même où le général s'était exprimé en juin 1944 après le débarquement puis en juin 1946 sur la future Constitution.
Son discours devant une centaine de militants a été accompagné par les sirènes d'une vingtaine de manifestants, notamment de la CGT, dont certains criaient "dehors les fachos".
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.