Tarifs de Trump : chaos global ou justice locale ?


Navarro l’avait prédit, les tarifs pour sauver le peuple
Donald Trump a relancé en avril 2025 une politique de tarifs douaniers ambitieuse : 10 % sur toutes les importations aux États-Unis, avec des taux pouvant atteindre 49 % pour des pays comme la Thaïlande ou le Vietnam. Cette approche, visant à réduire le déficit commercial, rapatrier des industries et financer des baisses d’impôts, s’inscrit dans une vision protectionniste portée par Peter Navarro, son conseiller économique de longue date. Navarro, auteur de The Coming China Wars (2006) et Death by China (2011), défend depuis des décennies l’idée que la mondialisation, dominée par des pratiques déloyales (subventions chinoises, dumping), désavantage les États-Unis et leurs travailleurs. Pour lui, les tarifs ne sont pas une improvisation, mais une réponse mûrie à un système déséquilibré.
Au-delà de l’« America First », Navarro et Trump placent le « peuple en premier », dénonçant un capitalisme mondialisé qui ignore la souffrance des classes populaires. Cette stratégie s’attaque aussi à l’hégémonie du dollar, fragilisée par les BRICS. Un exemple concret : depuis 2022, la Russie vend du pétrole à l’Inde en roubles et roupies, contournant le dollar, une tendance amplifiée par les sanctions occidentales. Pour Navarro, les tarifs visent à ralentir cette érosion en réduisant la dépendance aux importations, renforçant ainsi l’autonomie économique face à un ordre mondial en mutation.
Ricardo pleure, les économistes s’affolent - le libre-échange en péril ?
Les économistes mainstream critiquent cette politique en s’appuyant sur David Ricardo et sa théorie des avantages comparatifs, qui prône le libre-échange pour maximiser la prospérité globale via la spécialisation. Maurice Obstfeld, du Peterson Institute, avertit : « Les tarifs ont déjà été imposés, leur effet de menace est épuisé, et ils risquent de provoquer une récession mondiale sans atteindre les objectifs de Trump. » Freya Beamish, de TS Lombard, ajoute : « Ces mesures pourraient fragiliser la position du dollar comme monnaie de réserve, un résultat que peu anticipent faute d’alternative viable. » Tandis que Takahide Kiuchi, de Nomura Research Institute, renchérit : « Les tarifs risquent de détruire l’ordre du libre-échange mondial instauré par les États-Unis depuis la Seconde Guerre mondiale. »
Ces critiques soulignent les risques inflationnistes, la perturbation des chaînes d’approvisionnement et l’incapacité à relocaliser massivement dans un contexte de quasi-plein emploi. Pour beaucoup, Trump agit irrationnellement, défiant les lois économiques. « Qui se croit-il pour défier un système qui a créé la prospérité mondiale ? » s’interrogent les cercles politiques et académiques.
Pourtant, une lecture alternative permet de voir dans ces tarifs une arme contre une gouvernance mondiale déconnectée.
Tarifs, l’arme fatale pour faire plier l’ordre mondial
Les tarifs pourraient être une réponse géopolitique au retard dans les négociations de paix en Ukraine, où certains blâment les Européens – Macron et von der Leyen – pour avoir alimenté le conflit par une posture atlantiste, prolongeant les tensions avec Poutine.
Emmanuel Macron a qualifié les tarifs de « brutaux et infondés », et von der Leyen a averti que « l’incertitude va spirale et déclencher davantage de protectionnisme ».
Mais, Trump semble prêt à sacrifier la stabilité économique pour imposer sa vision, utilisant le « bouton rouge » du commerce comme une « arme fatale » pour forcer un réexamen des priorités mondiales.
Apple délocalise, le peuple trinque, le vrai prix du capital apparait
Cette politique remet en cause un système financier dopé par une dette globale estimée à 318 trillions de dollars et des arbitrages favorisant les élites. Le coût du capital se décompose en : coût de l’argent (taux d’intérêt, financement bon marché via la dette), coût du travail (salaires, conditions), et coûts logistiques (transport, taxes). Ces couts que l’on invoque à tout bout de champ pour justifier les diverses décisions des politiques économiques, ainsi que les choix environnementaux sur le narratif climatique.
Les grandes entreprises ont exploité ces écarts. Prenons Apple : via Foxconn en Chine, elle assemble ses iPhones avec un coût du travail de 2-3 dollars/heure contre 15-20 dollars aux États-Unis, profitant de salaires bas et de conditions précaires. Cet arbitrage réduit les coûts, mais vide les États-Unis, et d’autres pays de l’OCDE, d’emplois industriels, profitant aux grands groupes capables de délocaliser, au détriment des petits commerçants locaux concurrencés par des produits importés à bas prix. Les tarifs de Trump seraient une réponse en cherchant à inverser cela, valorisant le travail local et rééquilibrant le pouvoir entre multinationales et citoyens.
Marchés en chute, peuples en attente - un réalignement forcé ou récession ?
La réaction des marchés fut immédiate : les bourses mondiales, dont le S&P 500 ont chuté le 3 avril 2025, toutes dans le rouge et à l’ouverture des marchés asiatiques aujourd’hui la même tendance est à l’affiche. Pour les critiques, c’est le prélude à une récession.
JUST IN - European stock markets crash at open. pic.twitter.com/qr2Iw3VBGx
— Disclose.tv (@disclosetv) April 7, 2025
Mais, une vision minoritaire y voit un réalignement avec l’économie réelle : des marchés survalorisés par la dette et la spéculation pourraient se recentrer sur la production tangible. Barry Eichengreen, de Berkeley, note : « Si Trump s’impatiente face à l’échec des tarifs à réduire le déficit commercial, il pourrait tenter des idées encore plus audacieuses. » Ce choc pourrait aussi limiter les degrés de liberté des gouvernements européens, souvent accusés d’ignorer leurs peuples (ZFE, référendums bafoués).
Contraints par des budgets sous pression, ils pourraient devoir revoir leurs priorités, notamment sur l’Ukraine, où leur soutien sans limites – coûteux en argent et en crédibilité – deviendrait intenable face à des populations exigeant plus d’attention aux besoins locaux. Ce réalignement forcé pourrait paradoxalement restaurer une souveraineté populaire par la contrainte économique.
Vert pour les riches, rouge pour le réel - l’hypocrisie dévoilée
Les marchés financiers reposent sur une hypocrisie bien ancrée : le vert (la hausse) est perçu comme le bien, symbole de prospérité et de confiance, tandis que le rouge (la baisse) est vu comme le mal, signe de chaos et d’échec. Cette dichotomie simpliste masque une réalité : les acteurs financiers avaient anticipé ce risque. Les idées de Navarro, connues depuis des années, étaient valorisés (« pricées » en anglais) par les acteurs de marché et les traders – le risque d’une baisse était dans leurs modèles, au même titre que l’étaient les estimations de décès excessifs anticipés par Ferguson en 2020 pour pousser les gouvernements aux confinements.
Depuis l’élection de Trump en novembre 2024, les marchés avaient grimpé, portés par l’optimisme spéculatif, mais dans une décorrélation croissante avec l’économie réelle, au détriment du peuple. Si les traders perdent leurs cheveux et leur sang-froid face à cette chute, les économistes mainstream s’accordent à dire que ce réalignement ne profitera pas aux citoyens, prédisant inflation et pertes d’emploi.
Mais une autre lecture est possible : et si cette correction ramenait les marchés à une échelle plus humaine, moins dépendante des bulles financées par la dette, redonnant au peuple une économie moins virtuelle et plus tangible ? Cette vision, bien que minoritaire, conteste l’idée que seule la hausse profite à tous.
Moins d’iPhones, plus de liberté : la fin de la drogue consumériste
L’augmentation des prix due aux tarifs (ex. : un iPhone plus cher) pourrait encourager une consommation plus saine aux États-Unis, loin de la « drogue » de la surconsommation.
Comme je l’écrivais en 2020 dans « De global à local, le tour du globe en 80 trimestres – une génération », ce retour au local répond à une mondialisation insoutenable. Et j’ajoutais : « dans le monde de l’entreprise, quand les processus deviennent obsolètes, on lance un projet de "Core Process Redesign" profond ou tout est permis. Nous ne parlons pas de régression sociale, mais de progression sociétale vers un monde ou les droits de chacun respectent notre devise nationale de liberté, égalité et fraternité. »
Moins consommer ne serait pas une perte, mais une liberté retrouvée, privilégiant des biens durables et locaux sur le « toujours plus » financé par la dette.
Revenir en arrière, c’est avancer. La leçon de Coca-Cola
Coca-Cola illustre ce principe. En 1985, New Coke fut un fiasco ; en trois mois, l’entreprise revint à Coca-Cola Classic, écoutant ses consommateurs. Cette réversion était du bon sens, pas un échec. Et si le progrès social – consumérisme, financiarisation – était allé trop loin ?
Revenir en arrière, relocaliser, réduire la dépendance aux importations, serait un vrai progrès : un chemin équilibré pour la majorité, contre la discrimination élitiste. Olaf Scholz, chancelier allemand, appelle à « montrer nos muscles » pour négocier avec Trump, est-ce vraiment le bon sens ? Une voix perçue comme minoritaire par les dirigeants, mais bien réelle parmi les citoyens, voit en cette confrontation une véritable chance de réveiller les peuples.
Contre les élites, pour le peuple, les tarifs comme cri de justice ?
Les tarifs de Trump, bien qu’estimés comme risqués par les économistes et politiques élitistes, pourraient briser une gouvernance mondiale défaillante, creusant les inégalités via la dette et l’exploitation (Chine, BRICS). Ils défient Ricardo pour rééquilibrer le pouvoir entre citoyens et élites, valorisant le travail local face aux arbitrages des multinationales.
La chute des marchés, perçue comme un mal par l’hypocrisie financière, l’augmentation des prix et une réversion stratégique pourraient recentrer l’économie sur le réel, redonnant aux peuples une voix face à des gouvernements endettés et déconnectés – notamment en Europe, où le soutien inconditionnel à l’Ukraine pourrait céder la place à des priorités plus proches des citoyens. Reste à savoir si ce pari audacieux mènera au chaos ou au renouveau.
Le chaos des uns, l’ordre des autres. Proudhon rit des globalistes
En définitive, l’ordre n’est qu’un arrangement, une convention. Les globalistes ont poussé leur « nouvel ordre mondial », un système sans frontières où les seules métriques sont le coût du capital et le profit, reléguant l’humain au second plan. Ils ont rêvé de l’avènement de l’IA au détriment de l’homme, utilisant les médias pour vanter leur stratégie et défendre leurs positions. Ce que ces élites appellent « chaos » – les tarifs, la chute des marchés – n’est qu’un autre arrangement, établi sur une fonction objective qui ne leur convient pas.
Dans les faits, l’époque semble donner raison à Pierre-Joseph Proudhon, penseur anarchiste du XIXe siècle. Il écrivait dans Qu’est-ce que la propriété ? (1840) : « La propriété, c’est le vol », dénonçant l’accaparement des richesses par une minorité. Dans Système des contradictions économiques (1846), il ajoutait : « L’économie politique est la science du désordre », critiquant un système qui sacrifie l’équité au profit.
Les tarifs de Trump, en défiant cet ordre artificiel, pourraient paradoxalement réhabiliter une justice sociale que Proudhon appelait de ses vœux, rendant à l’humain sa primauté sur le capital, une construction fictive. Si l’humain est supérieur, n’est-ce pas par sa capacité à revendiquer une justice, un contrat social, que la matière – profits, marchés – ne peut offrir ?
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