Jean-Marie Pédron, cueilleur d'algues qui amène du vivant dans l'assiette

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Par Olga NEDBAEVA - AFP
Publié le 21 septembre 2023 - 08:40
Cet article provient directement de l'AFP (Agence France Presse)
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TP Nature et Environnement
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F. Froger / Z9, pour FranceSoir
F. Froger / Z9, pour FranceSoir

DÉPÊCHE — Une bouffée d'air marin dans l'assiette : les algues fraîches de Jean-Marie Pédron apportent une nouvelle dimension aux tables gastronomiques et séduisent le public qui vient cueillir et cuisiner avec lui cet aliment riche en minéraux et protéines encore peu consommé en France.

Il est invité jeudi à Monaco au sommet international de la gastronomie durable, organisé par la Fondation Prince Albert II, sur une idée d'Alain Ducasse, le chef le plus étoilé au monde et l'un de ses célèbres clients.

À la tête de la ferme marine "les Jardins de la Mer" au Croisic (Loire-Atlantique), qu'il gère avec son épouse Valérie, il propose depuis 2012 aux grands chefs des algues "vivantes" sauvages qui "n'ont pas été en chambre froide, ni mises en saumure".

Un métier "extrêmement manuel et artisanal" qui fonctionne très bien : "aujourd'hui, on a plus de demande que ce qu'on peut fournir" de la part des restaurants, dont 80% d'étoilés, raconte à l'AFP Jean-Marie Pédron, 62 ans.

Diplômé en droit, il a troqué le costume-cravate contre les bottes en caoutchouc pour revenir à la ferme de ses parents, qui furent pionniers de l'aquaculture, après avoir été responsable pédagogique de l'aquarium de Saint-Malo, puis directeur de celui de Lyon.

"Cette culture n'a aucun impact sur l'environnement — pas d'engrais, pas de pesticides —" et peut présenter une alternative intéressante à la viande dont il faut réduire la consommation pour la planète, explique-t-il.

L'ajout d'algues dans les légumineuses, autre source de protéines végétales, accélère la cuisson et les rend plus digestes et, culturellement, les algues sont plus acceptables que les insectes, détaille-t-il.

Dégustation en pleine mer

Quelques jours avant le sommet de Monaco, un groupe muni de seaux, de couteaux et de ciseaux suit Valérie Pédron en dégustant des laitues de mer fraîchement coupées.

"C'est ce que je mange entre 12 et 14 heures. Ici, il n'y a pas de distributeur de sandwichs !", plaisante-t-elle.

Aucune des algues n'est toxique, ce qui permet de refaire la cueillette en solo.

La dégustation se poursuit dans la ferme avec "le caviar d'algues" fraîches, produit phare de la maison, avant un atelier de cuisine animé par le couple.

"On accueille du public. Pour nous, c'est essentiel de transmettre cette importance de consommer des végétaux" et "démythifier" les algues, souligne Jean-Marie Pédron.

"Il y a un côté ludique quand on les cuisine soi-même. Ce n'est pas si difficile", poursuit-il. On fait des flans comme les grand-mères bretonnes qui envoyaient leurs enfants chercher au bord de la mer des piokas, algues rouges gélifiantes.

Les algues sont aussi source de créativité : "Quand on envoie la même algue à dix chefs différents, il n'y en a pas un seul qui va l'utiliser de la même manière", souligne Jean-Marie Pédron.

"J'ai intégré les algues dans ma cuisine parce que Jean-Marie fait ce travail que personne ne fait en France. Cela a complètement enrichi ma cuisine", confie à l'AFP Manon Fleury, qui fait des tomates aux algues.

"On est devenus amis en travaillant ensemble", déroule cette cheffe engagée, qui a fait plusieurs résidences remarquées à Paris avec sa cuisine essentiellement végétale et s'apprête à ouvrir son restaurant, Datil.

Même son de cloche chez Giuliano Sperandio, chef italien du Taillevent, institution de la cuisine traditionnelle française (2 étoiles Michelin), qui n'utilisait pas d'algues avant de découvrir celles de Jean-Marie Pédron.

"Il y met du cœur. Je suis sûr à 100% du résultat avec un tel produit", insiste le chef, qui accompagne des poissons avec du beurre au curcuma et aux algues, ainsi que des herbes marines.

Stéphanie Le Quellec sert, elle, du chou avec un ragout de coquillages et d'algues dans son restaurant parisien doublement étoilé, la Scène.

"J'avais envie que, quand on met ce plat à table, mes convives prennent une bouffée d'embruns marins et qu'ils aient l'impression d'être pieds nus sur la plage quand la marée est descendante, avec cette odeur si particulière d'algues gorgées d'eau de mer et de soleil", dit-elle à l'AFP.

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