Du pain et des jeux : les nouvelles émissions culinaires visent les jeunes
"Un chef à l'oreille" (France 2), "Ma mère cuisine mieux que la tienne" (M6) ou encore "Chéri(e) c'est moi le chef" (France 2) : une nouvelle vague d'émissions culinaires vise un public plus jeune qu'elle veut avant tout amuser.
Dans ces trois programmes, les participants sont invités à travailler en binôme, que ce soit avec un chef connu, un membre de leur famille ou bien un conjoint : l’un explique la recette que l’autre doit exécuter sous ses ordres. Au programme : gros ratés et fous rires.
Depuis janvier, "ce qui revient, c’est la cuisine à plusieurs et la présence de l’oreillette pour ajouter un peu d’émotion et faire du spectacle", analyse Olivier Roger, auteur de "La cuisine en spectacle" (INA éditions).
Depuis "Top Chef" en 2010, et son équivalent "Masterchef" sur TF1, le succès est au rendez-vous pour les émissions de cuisine : le concours de M6 réalise en cette huitième saison son meilleur lancement, avec 3,7 millions de téléspectateurs.
"Un dîner presque parfait" (M6), "Dans la peau d’un chef" (France 2), "Norbert commis d'office" (M6) : les émissions ont fleuri sur toutes les chaînes et connaissent "une diversification et une massification très nette de leur public", selon Olivier Roger.
Elles touchent "beaucoup plus les jeunes", alors qu’elles étaient auparavant l’apanage des retraités ou femmes au foyer.
- "Téléréalité culinaire" -
Sous influence anglo-saxonne, le modèle français a bien évolué depuis la toute première émission de cuisine en 1953, "Les recettes de Monsieur X" (R.T.F.).
"Des années 50 au début des années 2000, il n'y avait que des émissions de cuisine avec un chef qui présentait des recettes", a constaté le chercheur.
On pense à "Art et magie cuisine", la deuxième émission culinaire française présentée par Raymond Oliver (1954-1966) mais aussi aux émissions plus populaires de Maïté.
Sous l'influence britannique, les années 2000 ont au contraire vu "l'irruption de tous les divertissements qui parlent de cuisine, où la recette n'est plus forcément au centre".
En 2003, France 2 a lancé le mouvement en reprenant une émission de la BBC : dans "A vos marques, prêts, cuisinez" deux chefs s'affrontaient et devaient cuisiner à partir d'un panier garni choisi par le public.
C'est le début de la "téléréalité culinaire" avec des émissions importées de concepts anglo-saxons, comme "Cauchemar en cuisine" sur M6 (2004).
Tous les types de concours ont alors envahi les chaînes : "Top Chef" sur M6, "MasterChef" sur TF1, puis leurs déclinaisons pâtisserie, boulangerie.
Selon Virginies Spies, auteur de "Cuisine et télévision, une relation presque parfaite", si les émissions de cuisine plaisent tant, c'est parce que "ça touche tout le monde, puisqu'on mange tous ! La cuisine et l’amour sont les deux trucs qui marchent à la télé".
Mais l'engouement plus récent est surtout dû au côté ludique de certaines nouvelles émissions : dans les "jeux télévisés culinaires", la cuisine n'est plus qu'un prétexte.
"On va jouer sur la pression contre le temps, on va beaucoup rire des gens qui ne savent pas faire", selon Olivier Roger. Résultat : ce public ne s'intéresse pas forcément à la cuisine.
- La demande flambe en école de cuisine -
Mais ces émissions suscitent aussi des vocations. Depuis quelques années, les écoles de cuisine sont prises d'assaut et elles sont nombreuses à évoquer un "effet Top Chef".
"Qui sera le prochain grand pâtissier ?" (France 2) ou encore "Le meilleur pâtissier de France" (M6) ont alimenté une "demande très accentuée en pâtisserie", souligne l'école parisienne Ferrandi. De l'ordre de cinq demandes pour une place en pâtisserie contre "seulement" trois pour une en cuisine.
Parallèlement, face à la concurrence d'Internet avec ses nombreux tutos et youtubers cuisine, les chaînes cherchent la recette inédite pour augmenter leurs audiences.
M6 lancera bientôt "Toque Show", un nouveau format de talk-show culinaire où l'on verra le public mettre au défi une brigade de chefs dirigée par le très médiatique Norbert Tarayre.
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