Critiqué et concurrencé, le JT reste une institution 70 ans après sa naissance

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Par Séverine ROUBY - Paris (AFP)
Publié le 11 juin 2019 - 10:23
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Le JT d'Anne-Sophie Lapix sur France 2 en septembre 2017
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© JACQUES DEMARTHON / AFP/Archives
Le JT d'Anne-Sophie Lapix sur France 2 en septembre 2017
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Malgré la concurrence du web et des chaînes d'info, il rassemble encore près de 17 millions de téléspectateurs en moyenne chaque soir sur les grandes chaînes: le journal télévisé, qui fête ses 70 ans ce mois-ci, reste une institution.

L'histoire commence avec des plans aériens de Paris, des images muettes et en noir et blanc où l'on suit le vol d'une montgolfière depuis les Invalides, jusqu'à ce qu'elle s'écrase et explose dans un champ. Ce premier sujet est diffusé le 29 juin 1949, et on y voit le journaliste Pierre Sabbagh, créateur du journal télévisé.

L'aventure de cette "équipe de doux dingues, de furieux de l'actu" à l'origine de l'"une des plus belles réussites de la télévision française" est racontée dans un documentaire produit par l'Ina (Institut national de l'audiovisuel) que France 2 diffusera jeudi soir à l’occasion d'une soirée événementielle.

L'émission dévoilera les résultats d'une consultation lancée avec l'Ina via le site 70ans-jt.ina.fr, où les internautes ont choisi les séquences d'actualité les plus marquantes de ces soixante-dix dernières années.

Le tout premier JT dure un quart d'heure et est diffusé vers 21 h.

A l'époque, moins de 1% des foyers français sont équipés de téléviseurs: "la fabrication est artisanale, le ton est goguenard, l'audience reste confidentielle", résume "Le dictionnaire de la télévision française", dirigé par Yannick Dehée, historien, et Agnès Chauveau actuellement directrice déléguée à la diffusion et à l'innovation à l'Ina.

"Pierre Sabbagh pressent que ce genre va être fondateur à la télévision mais tout est à inventer. A l'époque, les actualités sont diffusées au cinéma et ne sont pas assez fraîches, elles datent souvent de plusieurs semaines, voire un mois", raconte Agnès Chauveau à l'AFP.

Inspiré des Etats-Unis où deux JT se font déjà concurrence, le programme est une prouesse technique mais reste artisanal : "Sabbagh disait qu'il y avait plus de techniciens pour fabriquer le JT que de téléspectateurs. Vous inventez un média et vous ne savez pas s'il a un avenir. C'est un peu comme le web des débuts" décrit-elle.

- La guerre du 20H -

L'équipement en téléviseurs allant croissant, le JT gagne en popularité : en 1954, il passe à 20H et les présentateurs font leur apparition, s'invitant chaque soir à l'heure du repas. En 1958, avec la Ve république, la télévision devient la voix de la France et le JT un enjeu politique.

Dans les années 60, l'invention du prompteur permettra de regarder le téléspectateur dans les yeux, puis la libéralisation des chaînes crée une concurrence entre journaux : "à partir de 1974, le 20 heures devient la vitrine des chaînes qui vont rivaliser d'innovation pour avoir le JT le plus regardé, c'est la guerre du 20H qui dure jusqu'à aujourd'hui", observe Agnès Chauveau, soulignant que les chaînes continuent à espionner leurs JT respectifs.

Dans les années 80 et 90 vient le temps des critiques, de voyeurisme, avec notamment la lente agonie filmée d'une jeune Colombienne dans une coulée de boue en 1985, mais aussi de manque de recul, avec la couverture de la guerre du Golfe de 1991, contrôlée par l'armée.

En 2014, un ancien présentateur de JT d'Arte, William Irigoyen, s'interroge même "Réfléchir à 20 heures est-il possible ?" dans un essai au titre évocateur : "Jeter le JT".

"Cela fait un certain temps qu'on annonce sa mort mais je ne pense pas qu'on puisse aussi facilement enterrer le genre. C'est juste que son rôle a changé, avant il annonçait l'info, aujourd'hui il a un rôle de certificateur", estime Agnès Chauveau.

Malgré la montée en puissance des chaînes d'info, BFMTV en tête, et des réseaux sociaux, qui ont contribué à accélérer le rythme de l'info, les audiences restent élevées : plus de 5 millions de téléspectateurs devant le 13H de TF1 cette saison, 2,6 millions sur France 2 à la même heure et 1,4 million sur France 3.

Et à 20H00 ils étaient encore cette année 5,7 millions en moyenne sur TF1, 4,9 millions sur France 2, 2,9 millions sur France 3, 2,8 millions sur M6 et 585.000 sur Arte.

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