SMSGate, QatarGate, soupçons de corruption... : face aux affaires, Ursula von der Leyen peut-elle se maintenir à la présidence de la Commission européenne ?

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Xavier Azalbert, France-Soir
Publié le 08 juin 2023 - 10:25
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Baldan et Protat
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F. Froger / Z9, pour FranceSoir
Le lobbyiste Frédéric Balban et son avocate, Me Diane Protat, sur le plateau de France-Soir.
F. Froger / Z9, pour FranceSoir

L'ENTRETIEN ESSENTIEL - Après avoir déposé une plainte pénale visant la présidente de la Commission Européenne le 6 avril 2023, le lobbyiste Frédéric Baldan récidive. Son avocate, Me Diane Protat (1), a déposé une action en référé devant la Cours de Justice de l’Union européenne (CJUE), à l'encontre des commissaires européens. La requête est simple : demander la suspension des commissaires, tant qu'une action juridique pénale les concernant potentiellement est en cours, afin de garantir les droits fondamentaux, notamment vis-à-vis de la bonne conduite d’un dossier pénal et de son enquête.

Reçu par Xavier Azalbert, directeur de la publication et de la rédaction de France-Soir pour cet entretien, Frédéric Baldan exprime en premier lieu sa surprise quant au silence des médias français à propos du dépôt de sa première plainte, nonobstant une grande couverture médiatique internationale.


Un "oubli" de la part des médias dits "mainstream" qui pose de nombreuses questions déontologiques, notamment au sujet du rôle de l'Agence France Presse (AFP). Les citoyens n'ont-ils pas le droit d'être informés d'une démarche ayant trait à la vérification d'une bonne gestion de la chose publique ? La liberté de la presse, qui donne des droits, mais aussi des devoirs aux journalistes, ne peut-elle plus s'exercer véritablement en France ?

"Aucun calendrier n'a été fixé"

Jointe par téléphone, Amanda Nouvel, collaboratrice du service presse et médias de la CJUE, confirme qu'une plainte pénale a bien été enregistrée au nom de M. Frédéric Baldan, en date du 6 avril 2023.

Elle nous informe que "l’enquête suit son cours" et qu'"aucun calendrier n’a été fixé. La partie adverse a deux mois pour répondre à compter de la signification. Le délai court". Elle indique ne pas avoir plus d’information, étant donné la nature pénale de l’enquête et le secret de l’instruction.

Pas d'urgence donc, malgré une plainte pénale qui vise la présidente de la Commission européenne elle-même, et concerne des faits présumés d'une grande gravité. Pour une plainte de douze pages qui "peut être lue par un lecteur moyen en 30 minutes. Le Parquet européen ne semble pas pressé de se positionner puisqu’il en dispose depuis deux mois. L’enjeu est pourtant de taille : tant qu’il ne prend pas position, aucune enquête judiciaire ne peut démarrer" écrivait David Leloup pour le Vif.

En effet, Ursula von der Leyen, non élue dans l’exercice de ses fonctions, est soupçonnée d'avoir négocié (et renégocié), en catimini, en dehors des prérogatives octroyées par son mandat, un "méga-contrat" d'achat de vaccins anti-Covid-19 auprès de l'industriel Pfizer. Des SMS ont été directement échangés entre la présidente de la Commission européenne et le PDG de Pfizer, Albert Bourla, autour de tractations commerciales.

Suite à la plainte déposée, le juge chargé de l'instruction en Belgique doit désormais avoir accès à ces messages, considérés comme des documents administratifs. Ne pas livrer ces documents constituerait une infraction pénale pour Ursula von der Leyen qui, en cas de destruction des messages, devrait s'en expliquer à la justice.

Au sujet de l’action en référé qui vient d’être introduite, Amanda Nouvel n’a pas plus d’informations à nous fournir. Elle précise, à propos du référé, qu'il "n’y a pas lieu nécessairement d’avoir une audience, c’est au président du tribunal de décider s’il y aura une audience ou pas".

Peut-on exercer un mandat public en étant visé par une procédure judiciaire ?

Comme le confirme un article publié le 7 juin 2023 par le média belge d'actualités Le Vif, "deux mois après son dépôt entre les mains d'un juge d'instruction à Liège, la plainte pénale d'un citoyen belge contre la présidente de la Commission européenne n'est toujours pas instruite." Cette plainte est "en cours d'analyse par le Parquet européen".

Au sein de l'Union européenne, une personne qui exerce un mandat, une fonction liée à l'autorité publique, visée dans le cadre d'une procédure judiciaire, peut-elle rester en place ? Le temps de l'enquête, telle personne ne devrait-elle pas être suspendue ? Les affaires se multiplient autour de la présidente de la Commission européenne : de nouvelles perquisition ont eu lieu mardi dernier à propos du QatarGate, impliquant l'euro-députée Eva Kaili, 

En France, Emmanuel Macron avait, dans ses promesses de campagne, déclaré qu’un membre de son gouvernement mis en examen devrait être suspendu en telle situation. Ceci, afin de garantir non seulement la transparence, mais aussi de maintenir la confiance en l’action publique. Cette promesse a été oubliée depuis longtemps, le porte-parole du gouvernement Véran ayant eu à ce propos une interprétation pour le moins différente en octobre 2022.

Note : 

(1) Me Protat est aussi l’avocate conseil de l’association BonSens.org, au sein de laquelle Xavier Azalbert directeur de la rédaction et de la publication de France-Soir, est administrateur.

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