Schengen : Le gouvernement Scholz instaure le contrôle à toutes les frontières allemandes et suscite la colère de ses voisins

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France-Soir
Publié le 17 septembre 2024 - 10:30
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Schengen : Le gouvernement Scholz instaure le contrôle à toutes les frontières allemandes et suscite la colère de ses voisins
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Par cette décision, le gouvernement Scholz démontre aussi bien les tensions internes à l’Allemagne que les difficultés de la Commission européenne à imposer une gestion collective de la question migratoire. Le 9 septembre dernier, Berlin a annoncé l’instauration des contrôles sur l’ensemble de ses frontières pour lutter contre l’immigration illégale. La décision, qui se justifie par un attentat au couteau à Solingen qui a coûté la vie à trois personnes, témoigne de la pression grandissante des partis AfD et CDU sur la coalition au pouvoir à propos de l’immigration, poussant l’Allemagne à se mettre à dos de nombreux pays européens tout en contredisant les accords européens de Schengen ainsi que le tout récent pacte européen sur la migration.  

La mesure a pris effet hier, lundi 16 septembre 2024 pour une durée de six mois. Le contrôle était déjà en vigueur à l’est et au sud de l’Allemagne, c’est-à-dire depuis la Pologne, la République tchèque, la Suisse ou encore l’Autriche. Le voici désormais étendu à l’ouest, depuis la France, le Luxembourg, la Belgique, le Danemark ou encore les Pays-Bas, sur 3 900 kilomètres de frontières. “Nous continuons d’appliquer notre ligne dure contre l’immigration irrégulière”, avait alors déclaré la ministre de l’Intérieur Nancy Faeser. 

Scholz veut reprendre en main la question migratoire 

Le gouvernement Scholz justifie cette décision “exceptionnelle” de “nécessaire” pour “protéger la sécurité intérieure contre les menaces du terrorisme islamistes et de la criminalité transfrontalière”. A cela s’ajoute sa décision de supprimer les aides aux demandeurs d’asile entrés en Allemagne en provenance d’un autre pays de l’Union Européenne (UE).  

Ces mesures font écho à l'attentat au couteau à Solingen qui a eu lieu le 23 août 2024, lors du "festival de la Diversité" organisé dans le cadre des festivités célébrant le 650e anniversaire de cette ville allemande. Cet événement a recentré la question migratoire au cœur des priorités du gouvernement d’Olaf Scholz, qui cherche à récupérer le débat et prendre l’initiative en pleine campagne électorale dominée par ses adversaires, à leur tête l’AfD et la droite conservatrice de la CDU (Union chrétienne-démocrate). 

Après ses succès en Thuringe et en Saxe (plus de 30 % des voix), le parti AfD est déclaré favori pour ce 22 septembre à l’occasion des élections régionales du Brandebourg, un Land dirigé par le parti social-démocrate (SPD) de Scholz. La CDU, déclarée quant à elle favorite pour les élections nationales de 2025, critique sans relâche la coalition au pouvoir (SPD, Verts, libéraux) sur la question de l’immigration, la poussant à prendre des mesures drastiques comme le renvoi de migrants vers les pays européens de provenance sans leur permettre de déposer des demandes d’asile en Allemagne. La pression est tout aussi bien exercée par le parti de gauche BSW, qui réclame justement un contrôle renforcé des flux migratoires. 

L’instauration de ce contrôle a fait réagir Bruxelles ainsi que de nombreux pays européens, qui ont critiqué Berlin, l’accusant de faire cavalier seul. L’Allemagne dit avoir notifié la Commission européenne de sa décision mais cette institution a rappelé que “le rétablissement des contrôles”, quoi qu’étant une possibilité, “doit être nécessairement proportionné et exceptionnel”.  

Berlin tourne le dos à Schengen et au pacte européen sur la migration  

Le Premier ministre polonais, Donald Tusk, a qualifié ces nouveaux contrôles d’”inacceptables”. Pour son ministre de l’Intérieur, Tomasz Siemoniak, cette mesure met en péril l’espace Schengen. Vienne prévient qu’elle n’accepterait pas les personnes refoulées d’Allemagne”. Quant à la Grèce, son Premier ministre Kyriakos Mitsotakis estime que la réponse de Berlin “ne pouvait pas être la suppression unilatérale de Schengen”.  

Par cette manœuvre, l’Allemagne tourne effectivement le dos aux accords européens de Schengen de 1985, conclus à son initiative, ainsi qu’à celle de la France et du Benelux. Le régime de libre circulation des personnes et la suppression des contrôles sont compromis, et l’efficacité d’une telle mesure est discutable puisque la majorité des migrants n'empruntent pas nécessairement les points de passage officiels.  

L’on craint également à la CE que l’instauration de ces contrôles ne crée un précédent et n’entrave la circulation des personnes et des marchandises. A ce propos, Nancy Faeser promet qu’il n'y aura pas de longs embouteillages, mais des contrôles intelligents, en fonction de la situation".  

Berlin remet aussi en cause le Pacte européen sur la migration et l’asile, tout récemment réformé et péniblement adopté en mai dernier, qui prévoit de traiter une partie des demandes d’asile aux frontières extérieures de l’Union et un “mécanisme de solidarité” entre États en cas d’arrivées massives. Mécanisme très contesté dans plusieurs pays, dont la Hongrie, même s’il prévoit pour ces États la possibilité de remplacer l’accueil par des compensations financières. L’Allemagne va non seulement à l’encontre de cette approche collective mais remet en question son efficacité. 

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