Passe sanitaire : des débats parlementaires à l'image de la société, confus et électriques

Auteur(s)
FranceSoir
Publié le 22 juillet 2021 - 20:20
Image
Bâtiment Assemblée Couleurs
Crédits
F. Froger / D6
Assemblée nationale
F. Froger / D6

Après avoir été revu en commission, le projet de loi sur la gestion de la crise sanitaire - qui prévoit entre autres choses l'extension du passe, a été remis entre les mains de l'Assemblée nationale hier à 15h. Au programme des débats : 1 146 amendements à passer au crible de la démocratie. Au grand dam du gouvernement qui prévoyait d'expédier le projet de loi en quatre jours, "urgence" oblige, les différentes oppositions ont fait montre de verve pour exprimer leurs inquiétudes. Résultats : hier soir à minuit, il restait 900 amendements à étudier.

L'objectif du gouvernement est clair : vacciner, vacciner, vacciner. D'un côté, légiférer l'obligation vaccinale des professions qui nécessitent un contact proche avec le public, de l'autre, inciter à la vaccination en étendant le passe sanitaire aux activités de la vie quotidienne.

Incompréhension générale

En miroir et porte-parole du peuple, l'ambiance à l'Assemblée était tendue, chacun y déplorant largement l'incohérence des mesures et la précipitation des prises de décisions, toutes deux induites par la confusion ambiante. Nous pouvions entendre certains députés s'exclamer : "C’est le degré maximum de l’absurde" Marc Le Fur ; "Aujourd’hui, les messages sont dévoyés et beaucoup n’y comprennent plus rien" Christophe Blanchet ; "Devant de telles tergiversations, comment voulez-vous que les Français fassent confiance aux pouvoirs publics ?" Lamia El Aaraje. Dans le même temps, des centaines de Français marchaient...

Beaucoup de temps mais peu d'avancées

Finalement, après neuf heures de débats, seuls deux amendements sur les quelques 250 étudiés, ont été adoptés. L'un d'eux, n°274 proposé par le groupe MoDem, "propose que cette obligation [flasher le QR Code à l'entrée des différents établissements] soit réaffirmée par la voie législative et d’ajouter à cette obligation une peine équivalente à celle de la mise en danger d’autrui." Ceci ayant pout objectif "d’alléger la responsabilité imposée aux établissements tout en faisant gagner du temps aux commerçants", qui risquent déjà la fermeture assortie de 45.000 € d'amende en cas de non respect du protocole.

Tous les autres amendements proposés ont été rejetés. Parmi eux, un amendement du groupe UDI voulait modifier la date de fin de l'état d'urgence du 31 décembre au 31 octobre 2021.

Une fois n'est pas coutume, Martine Wonner s'est levée pour mettre l'accent sur la question de l'accès au soin, qui sera lui aussi conditionné par le passe sanitaire. Réponse de la ministre chargée de l'autonomie Brigitte Bourguignon : "En cas de soins programmés à l’avance, la personne a le temps de faire un test pour protéger les autres si elle a des conditions non remplies pour être vaccinée. En cas d’urgence, il n’y a évidemment pas besoin de passe sanitaire !"

[NDLR] Autour de 16h ce jour, l'amendement 372 a été adopté, supprimant la neccessité du passe sanitaire pour l'entrée dans les hôpitaux ou autres établissements de santé.

Voir aussi : Les vraies questions avant les petits mouchoirs

Ces tergiversations, si elles ont fait monter la pression d'un cran, ont particulièrement su exaspérer le ministre de la Santé, Olivier Véran, qui s'est égosillé : "Gouverner c'est choisir, et parfois faire des choix qui ne nous plaisent pas, et c'est ça le courage en politique monsieur le député ! Ce n'est pas de faire durer les débats en nous disant que c'est à cause de nous qu'il y aurait de l'obstruction parlementaire."

Manifestement, Olivier Véran n'a pas le temps, et préférerait que la démocratie se fasse plus vite. Un tel dérapage de la part d'un Ministre, au coeur de l'enceinte démocratique des Français dans laquelle il s'exprime en invité, serait probablement désapprouvé par un Président qui avait pour projet de redorer la parole gouvernementale.

Toujours est-il que s'il y a autant d'amendements, c'est peut-être parce qu'il y a des choses à redire ou à revoir. D'ailleurs, les députés ne sont pas les seuls à le penser, car toutes les institutions (Conseil d'État, CNIL, Défenseure des droits) qui ont été saisies pour étudier le projet de loi s'accordent à dire que les atteintes à nos libertés sont importantes et qu'il y a de nombreuses barrières à poser dans le texte.

Voir aussi : La CNIL juge les atteintes aux libertés "particulièrement fortes"... mais ne s'y oppose pas

Lendemain difficile

Ce matin, c'est dans un climat légèrement plus détendu mais toujours électrique, et avec une assemblée moins nombreuse, que les débats ont repris. Les amendements continuent d'être épluchés, et les députés de faire valoir leur temps de parole. Parmi eux, c'est avec un ton léger que Jean-Luc Poudroux se permettra de rire un peu, soulignant par là même les incohérences de la politique sanitaire :

Il pose la question qui fâche, puis enchaîne en évoquant la troisième dose de vaccin, ainsi que les contrôles prévus pour les voyages internationaux : "Alors le virus ne circule pas dans le sens Réunion-Paris, mais dans le sens Paris-Réunion, il circule !" Un de ses collègues d'ajouter en rigolant : "Il est intelligent ce virus, en plus il boit des bières ! C'est le Ministre qui l'a dit."

Finalement, la navette parlementaire est largement freinée et le texte ne sera donc pas au Sénat ce jour, comme c'était prévu. En revanche, les manifestions qui anticipaient justement son arrivée, notamment celle du président de l'UPR François Asselineau, se tiendront.

Que ce soit au sein des hémicycles ou au milieu de la rue, la pression se fait sentir de jour en jour.

À LIRE AUSSI

Image
François Asselineau : l'entretien essentiel
François Asselineau manifeste devant le Sénat : l'entretien essentiel
Il avait été notre invité au Défi de la vérité en fin d'année dernière, le voici de retour pour un Entretien essentiel dans lequel il s'explique sur son absence à la g...
22 juillet 2021 - 15:53
Vidéos
Image
Martine Wonner au Défi de la vérité
"Si on ne retrouve pas nos libertés en France, je pense que l’avenir de notre pays est très sombre" - Martine Wonner au Défi de la vérité
Martine Wonner, médecin-psychiatre et députée de la circonscription du Bas-Rhin a accepté de relever le défi de la vérité pour France Soir. Elle revient sur son parcou...
22 juin 2021 - 19:03
Vidéos

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
ARA
Décès de ARA, Alain Renaudin, dessinateur de France-Soir
Il était avant toute chose notre ami… avant même d’être ce joyeux gribouilleur comme je l’appelais, qui avec ce talent magnifique croquait à la demande l’actualité, ou...
07 novembre 2024 - 22:25
Portraits
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.