Ukraine  : quelles réactions de l’OTAN  ? (2 /2)

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Jean-Neige pour France-Soir
Publié le 15 mars 2024 - 16:20
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Siège de l'OTAN - le 12 Octobre 2023 à Bruxelles
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SIMON WOHLFAHRT - AFP
Siège de l'OTAN - le 12 Octobre 2023 à Bruxelles
SIMON WOHLFAHRT - AFP

TRIBUNE - Suite de la première partie publiée le 13 mars

Face à la probable victoire de la Russie qui se dessine, l’OTAN tente de passer à la vitesse supérieure. En Europe, il faut passer en « économie de guerre ». Et si l’Ukraine n’a plus assez de soldats pour tenir les lignes, qui d’autre que les soldats de l’OTAN pour tenir le rôle ?  

Autorisation de frapper le territoire russe

La déclaration du Secrétaire général de l’OTAN, Jens Stoltenberg, qui a annoncé le 21 février que l’Ukraine pourra utiliser les F-16 promis pour frapper des cibles en Russie, suscite l’inquiétude. Même s’il parle de « cibles militaires légitimes », les Russes ne verront certainement pas d’un bon œil des frappes sur leurs infrastructures. 

Par ailleurs, on ne sait toujours pas où et comment l’Ukraine pourra stocker ses F-16, sachant que, au contraire des avions de fabrication soviétique qu’ils ont encore dans leur flotte, les F-16 ne peuvent décoller à partir de routes. Il leur faut une vraie piste, et des ateliers pour la maintenance. Les Russes chercheront évidemment à détruire ces avions avec leurs missiles de longue portée dès qu’ils les localiseront. 

Une autre option envisagée était que les avions décollent de pays limitrophes qui, mis à part la petite Moldavie, appartiennent tous à l’OTAN. Cela ferait des aérodromes utilisés dans ces pays des cibles légitimes pour les Russes, d’autant plus si les F-16 devaient frapper des cibles en Russie même. 

Le pays de l’OTAN qui subirait une frappe russe sur son territoire pourrait ainsi invoquer l’Article 5 du Traité de l’Atlantique-Nord. Tous les pays de l’OTAN se verraient juridiquement impliqués dans une guerre contre la Russie. 

La France, de son côté, promet en plus des drones kamikazes, voire des Mirage. 

Et comme tout cela risque fort de ne pas suffire, même si cela pourra tuer encore plus de Russes, le chef de l’Etat a aussi annoncé que les alliés de l’Ukraine allaient créer une coalition pour livrer des missiles de moyenne et longue portée à l’Ukraine. 

Le 1er mars, RT et Sputnik ont publié un enregistrement entre 4 officiers Allemands, dont le chef d’état-major de la Luftwaffe, discutant de la façon de frapper le pont de Crimée avec des missiles Taurus, qu’officiellement l’Allemagne refuse toujours de fournir à l’Ukraine. Ils précisent même que le Rafale français peut porter ces missiles. Or, la France a déployé 3 Rafales en Roumanie... Cette conversation, qui a été authentifiée, confirme le niveau de duplicité de l’OTAN et son rôle crucial dans le manœuvre de guerre de l’Ukraine. Au passage, on comprend mieux aussi pourquoi Von Der Leyen a annoncé l’interdiction des médias russes en Europe. 

En Russie, un politicien a appelé à ce que, en cas de frappe sur le pont de Crimée, l’usine qui fabrique les Taurus en Allemagne soit visée par un missile russe en représailles. 

Nos dirigeants jouent tellement avec le feu, en repoussant toujours les limites, que l’on en arrive à se demander ce qu’ils cherchent vraiment. Encore une fois, si on voulait créer un casus belli pour justifier une entrée en guerre officielle de l’OTAN contre la Russie, on ne s’y prendrait pas autrement.

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergei Lavrov, a sèchement averti que les Occidentaux s’engageaient sur une voie suicidaire. Y-a-t-il des gens sains d’esprit au gouvernement qui l'entendent ? 

Le schéma de l’engrenage fatal

Poutine a beau alerter sur le risque de guerre nucléaire, nos grands stratèges et leurs laquais dans les médias ne prennent pas ces menaces au sérieux. Or, le schéma de l’engrenage probable est clair. 

Avec un engagement officiel de nos troupes, nous deviendrions de facto, voire même de jure, cobelligérants. Les Russes auront alors toutes les raisons de s’en prendre à nos soldats. Que fera-t-on alors ? On déclarera la guerre officiellement contre la Russie ? 

Très vite, les combats risquent de sortir des frontières de l’Ukraine. Au premier F-16 ou missile de longue portée qui s’en prendra à une cible sur le territoire internationalement reconnu comme russe, ces derniers pourront frapper des cibles militaires en Europe en représailles. Et alors, ce sera une vraie guerre continentale, comme l’annonce un général russe, avec des échanges de missiles tous azimuts, jusqu’à épuisement. Et après, que restera-t-il ? 

Les bombes nucléaires. 

Le discours de Macron et de ceux qui le soutiennent consiste à dire qu’il ne faudrait céder au « chantage nucléaire » de la Russie. Le pari fou qu’ils font, c’est que les Russes n’oseront pas répliquer avec des armes atomiques, car ce serait l’annihilation garantie de tous. 

Le Français Jean-Marie Guéhenno, ancien chef du Département des Opérations de Maintien de la Paix à l’ONU, et qui a fait depuis toute sa carrière aux Etats-Unis, soutient l’initiative de Macron, en expliquant que, lors de la guerre du Vietnam, il y avait des conseillers soviétiques auprès de l’armée Viêt-Cong, et que cela n’a pas provoqué de guerre nucléaire. 

Mais ici, il ne s’agit pas de conseillers militaires clandestins engagés auprès d’une armée d’un pays tiers, il s’agit directement de l’armée russe, première puissance nucléaire, qui se bat sur sa frontière, et sur ses terres ancestrales. Qu’un ancien diplomate ayant eu ses fonctions ne fasse pas cette distinction essentielle est proprement hallucinant. L’Occident semble vouloir démontrer chaque jour qui passe non seulement sa faillite intellectuelle et morale, mais aussi sa dangerosité.

La doctrine nucléaire russe prévoit l’utilisation en premier du feu nucléaire seulement si les intérêts vitaux du pays sont menacés. Toute la question est de savoir ce qu’on définit comme les intérêts vitaux. Les pays laissent généralement ce concept flou afin de garder une marge de manœuvre et d’imprévisibilité. Et en cas de guerre conventionnelle impliquant l’OTAN, la Russie se réserve le droit d’utiliser des armes nucléaires tactiques en dernier avertissement. 

Poutine, qui avait déclaré à Tucker Carlson qu’il était toujours disposé à négocier, s’est vu opposer une fin de non-recevoir. C’est l’OTAN qui veut régler cette affaire sur le champ de bataille. Le président russe a déjà expliqué que si les Occidentaux tentaient de détruire la Russie, il n’hésiterait pas à déclencher le feu nucléaire, car pour lui, un monde sans la Russie ne vaudrait pas la peine d’exister. 

Qui peut savoir à quel moment Moscou va considérer que cela suffit ? 

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