Quel est le bilan des victimes civiles dans la guerre en Ukraine  ? (3 sur 3)

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Jean Neige pour France-Soir
Publié le 23 novembre 2023 - 16:48
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Taganrog
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La ville russe de Taganrog, près de la frontière sud-est de l'Ukraine, a été la cible de bombardements ukrainiens à de multiples reprises., notamment fin juillet 2023.
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TRIBUNE - Troisième et dernier volet de notre tribune sur la guerre en Ukraine et ses morts : un ratio de victimes civiles globalement très bas pour un conflit de cette intensité.

D’après le journaliste brésilien Lucas Leiroz, la campagne militaire russe a un taux de victimes civiles comparé aux victimes militaires extrêmement bas. Il chiffre cela autour de 2 %.  

D’après lui, il s’agit du taux le plus bas de tous les conflits depuis la Seconde Guerre mondiale. Il compare ce chiffre aux guerres précédentes : Corée, 74 % ;Bosnie-Herzégovine, 56 % ; Vietnam, 46 % (et, s'agissant de la récente résurgence de la guerre israélo-palestinienne, la proportion de civils tués semble très importante). 

Pour Leiroz, cela semble bien démontrer que les forces russes sont soucieuses de limiter les pertes civiles. Ainsi, après la phase dure de conquête des premiers mois, la Russie a tenté de minimiser les dommâges collatéraux, bombardant généralement les cibles stratégiques la nuit. Malgré le bombardement massif des infrastructures électriques et portuaires depuis la fin de l’année 2022, le nombre de victimes reste ainsi limité.  

Quant au calcul utilisé, si on prend en compte le nombre de tués côté ukrainien confirmé par l’ONU, la dernière mise à jour est de 7481 victimes. Si cela correspond à 2% des victimes militaires, cela nous donnerait un chiffre des tués en uniforme autour de 375 000. Or, les chiffres qui circulent depuis septembre, notamment ceux avancés par le colonel Douglas Macgregor, ancien conseiller du Secrétaire à la Défense sous Trump, font état de 400 à 500 000 soldats ukrainiens et assimilés tués au combat, dont 75 000 depuis la dernière contre-offensive lancée le 4 juin.  

Evidemment, en fonction du chiffre réel que l’on retient des pertes militaires, le ratio pertes civiles/pertes militaires peut changer radicalement. Il faudra donc attendre la fin de la guerre et le travail des historiens pour confirmer ces chiffres. A condition qu’on les laisse travailler... 

Rappelons que l’ONU a prévenu qu’elle pensait que les chiffres réels des victimes civiles étaient certainement plus élevés. Mais on a vu dans la première partie de cette tribune qu’il y avait des raisons de douter qu’il y ait tant de victimes non répertoriées. 

Il y a aussi eu une surestimation des victimes de la guerre civile en Bosnie-Herzégovine, dans les années 1990. Je me souviens que certains avançaient le chiffre de 250 000 morts. Finalement, on pense aujourd’hui que le bilan est plus proche de 100 000...  

Victimes russes

Enfin, il ne faut pas oublier les victimes civiles russes des régions limitrophes de l’Ukraine, comme celles de Bryansk, Koursk, Belgorod, au nord et même Rostov, à l’est, et de la ville de Taganrog, qui ont été ciblées à de multiples reprises, essentiellement en 2023, et particulièrement les 14 et 18 septembre.  

Parfois les dépôts de carburant et les infrastructures électriques étaient visés, comme une vengeance après les bombardements des infrastructures électriques de l’Ukraine, eux-mêmes consécutifs à la première attaque du pont de Crimée. Cercle vicieux de la guerre !  

A d’autres moments, les bombardements ciblaient villes et villages sans que des objectifs militaires soient apparemment visés. Terroriser les populations semblait être le seul but. Alors que, contrairement à ce que racontent les médias comme LCI à longueur de journée, les bombardements russes ont toujours des objectifs militaires, jusqu’à preuve du contraire. Mais il y a malheureusement de temps en temps des victimes collatérales. 

Souvent Kiev nie son implication, car ses fournisseurs d’armes occidentaux, notamment la France, ne soutiennent pas (officiellement en tous cas...) les attaques contre les territoires reconnus par le droit international comme étant russes. Jeu de dupes et d’hypocrites, car les actes comptent bien plus que les mots.   

Des raids menés par des groupes armés soi-disant composés d’opposants russes, mais équipés par l’Ukraine, ont aussi été menés en 2023. L’un de ces groupes, le Corps des volontaires russes, est dirigé par Denis Kapustin, un homme interdit de séjour dans l’UE, accusé de liens avec des néo-nazis.

Si de nombreuses dépêches font état de morts et de blessés civils, y compris des enfants, lors de ces attaques, je n’ai pas trouvé de décompte global des victimes dans ces régions. Et apparemment, cela n’intéresse pas non plus l’ONU car je n’ai trouvé aucune réaction de l’institution au bombardement des régions russes. Ou alors les médias ne s’y intéressent pas. 

Mais comment s’attendre à une approche équilibrée du conflit russo-ukrainien de la part de l’ONU quand cette dernière promeut par la voix de son chef António Guterres un agenda de censure mondiale généralisée ? Une censure contre tout questionnement des dogmes que l’élite planétaire veut imposer. Et une lecture binaire de la guerre en Ukraine en fait partie.  

Les organisations internationales constamment sous pression

Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, ne s’est d’ailleurs pas privé, lors de son discours à New York en septembre dernier, de rappeler le secrétariat de l’ONU à ses devoirs d’impartialité et de strict respect de la Charte des Nations unies, reprochant à l’organisation d’ignorer ses propres principes sur le droit à l’autodétermination des peuples s’agissant de certaines régions de l’Ukraine, et de recevoir des instructions de “certains pays”...  

Quand je travaillais dans le Donbass, un cadre du Haut-Commissariat aux droits de l’homme (HCDHde Genève et ressortissant d’un pays occidental, m’avait avoué qu’il subissait d’énormes pressions de la part de son gouvernement pour orienter les rapports de l’organisation sur l’Ukraine dans un sens et pas dans l’autre. Il n’y avait bien sûr pas besoin de demander dans quel sens… A l’époque, le HCDH parvenait encore à faire des rapports globalement équilibrés.  Ainsi, sur la période 2014-2021, à la veille de l’attaque russe, le HCDH estimait que le conflit du Donbass avait fait au total plus de 14 000 morts, dont environ 4400 soldats ukrainiens, 6500 combattants séparatistes, et au moins 3 404 civils… sans préciser de quel côté.  

L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) savait que la plupart des victimes civiles se comptaient du côté séparatiste, mais refusa de rendre les chiffres publics après qu’un premier rapport sur l’année 2016 mentionnant cet aspect ait été violemment critiqué par Kiev. Or, cette tendance ne s’est jamais inversée. 

Si les choses continuent ainsi, un jour, la Russie et les BRICS vont fonder leurs propres institutions internationales et l’ONU ne sera plus que le club des pays occidentaux et de leurs Etats vassaux.  

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